La conservation des anciennes rues de Hanoi a été abordée depuis près de 2 décennies écoulées. Pourquoi, jusqu'à présent, aucune solution équitable et faisable n'a été avancée et prise ? A votre avis, comment faire pour les conserver ?
En tant qu'architecte attaché depuis des années à la capitale Hanoi, je pense qu'il est nécessaire d'appréhender les quintessences de cette ville, surtout ses caractères qui la rendent séduisante vis-à-vis du monde entier. D'ailleurs, dans l'actuelle conjoncture, nous ne sommes pas parvenus à un point de vue identique en ce qui concerne l'estimation des valeurs de patrimoine culturel, ni n'avons su relier les patrimoines de tout le pays en réseau de sites et ouvrages culturels. Après un millénaire, Hanoi, surtout le vieux quartier -appelé encore quartier des 36 corporations-, a pu sauver plusieurs vestiges historiques diversifiés. Par procuration de l'autorité municipale de Hanoi, je me charge de la présentation du projet de conservation de la valeur du vieux quartier à l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO). Il est regrettable que ce projet soit élaboré relativement tardivement.
D'après vous, quelles sont des entraves au déploiement de ce projet ? Est-il difficile d'évaluer la valeur du vieux quartier ?
Je pense que le déplacement de la population constitue une difficulté. Il a débuté durant les années 2003-2004, or personne ne s'en occupait réellement et aucune solution satisfaisante n'avait été proposée. Dans ce domaine, les gestionnaires, les chercheurs et les citadins ont parfois manqué de pertinence dans l'estimation à sa juste valeur de l'ancien quartier. Citons par exemple, qu'autrefois, certains experts ont recensé dans ce quartier, 200 ouvrages de valeur historique et culturelle. Mais, certains autres jugeaient qu'il en existait une centaine. Tout récemment, le nombre de ces ouvrages, lors d'un colloque consacré à la conservation de ce quartier, n'était que 60. Ainsi, quels sont les critères sur lesquels les chercheurs et experts se basent pour estimer de façon exacte la quantité d'ouvrages à conserver. À mon avis, nous devons estimer la valeur globale du vieux quartier pour son processus de développement millénaire, puis dans l'architecture générale de toute la région, notamment dans l'ensemble du plan de réaménagement de la capitale élargie. Je pense que la valeur des logements s'attache bien au mode de vie des habitants locaux. Pour la conservation du quartier, il est nécessaire de tenir compte de leur participation et de leur rôle.
Certains jugent que la conservation du vieux quartier va à l'encontre de l'intérêt des habitants locaux. Qu'en pensez-vous ?
La conservation et la sauvegarde de ce quartier doivent se baser sur des politiques concrètes. En ce qui concerne le déplacement de la population, il faut élaborer des mesures d'indemnisation adaptées tout en octroyant certains privilèges. Il ne faut pas estimer tous les logements à la même valeur. Une fois classé "quartier de valeur", il est nécessaire d'élaborer un statut spécifique concernant la participation de la population locale. Je pense qu'il n'est pas indispensable de le transformer en patrimoine culturel, mais avant tout il vaut mieux de le laisser vivre. Ce qui va de pair avec le maintien du mode de vie des citadins et la garantie de la stabilité de leurs conditions de vie, qui sont importants, je pense.
À votre avis, comment rendre le plan d'aménagement de ce quartier harmonieux à celui de la capitale élargie ?
À mon avis, la conservation de ce quartier se fera par la réalisation du plan de réaménagement global de la capitale élargie. Par exemple, comment développer 1.300 villages de métiers traditionnels sans valoriser leurs valeurs culturelles ? Ou bien pour conserver l'ancien village de Duong Lâm, il est nécessaire qu'il soit en harmonie avec le paysage et la physionomie des pagodes et temples de cette localité. Ainsi, il faut avancer doucement et adapter le processus de conservation de ce quartier tout en étudiant l'expérience tirée d'autres grandes villes régionales, surtout alors que l'anniversaire du millénaire de Thang Long-Hanoi approche au fil des jours.
Docteur japonaise Utsumi Sawako
Selon une enquête effectuée depuis le début de 2003, dans 102 logements du vieux quartier de la capitale, seulement 83 foyers disposent de leur propre cuisine, 42 doivent partager la salle de bain. Afin d'améliorer la qualité de vie, les habitations doivent être élargies. Ce qui fait pourtant obstacle à la conservation du quartier. Je pense qu'il est nécessaire d'avoir une réglementation sur la conservation de la physionomie du quartier et la réhabilitation des ouvrages intérieurs au service de la vie quotidienne.
Professeur-Docteur Furukawa (université japonaise Chiba)
En ce qui concerne la conservation du vieux quartier de Hanoi, aucune solution satisfaisante n'a été trouvée à présent. Pour que le projet de conservation aboutisse, l'autorité et la population doivent parvenir à un consensus et conjuguer leurs efforts. Les habitants pourront déménager lorsqu'ils recevront une indemnité adaptée. En se référant à l'expérience tirée dans la conservation de l'ancien chef-lieu de Kawagoe, à 35 km du centre de Tokyo, je pense qu'outre une politique d'indemnisation adaptée, il faut une politique qui encourage la conservation et l'assistance financière aux familles obligées de déménager hors du vieux quartier.
Lê Hà/CVN
(10/04/2009)