>>Une troisième journée pour contester la réforme du Code du travail
L'Assemblée nationale lors d'un débat. |
Photo : Archives AFP/VNA/CVN |
Entrées en vigueur en septembre et paraphées devant les caméras par Emmanuel Macron depuis l'Élysée, les cinq ordonnances doivent être ratifiées par le Parlement pour avoir force de loi et ne pas devenir caduques.
La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a vanté dans l'hémicycle leur "effet psychologique réel" dans les petites et moyennes entreprises, qui ont, selon elle, davantage "confiance pour embaucher". Elle a aussi affirmé que les ordonnances initient plus largement "un changement de mentalité" et transforment "l'esprit du code du travail".
Le gouvernement est déjà tourné vers un nouveau chapitre. Outre les ordonnances, la ministre est venue mardi devant les députés LREM évoquer les réformes de la formation professionnelle, de l'apprentissage et de l'assurance chômage.
Les députés de la majorité espèrent, eux, ne pas "faire une redite" des débats tendus de l'été lors de l'examen du projet de loi habilitant le gouvernement à réformer par ordonnances, comme l'a expliqué mardi 21 novembre le MoDem Patrick Mignola. Ils veulent profiter de ce nouveau passage pour "faire partager aux Français en quoi ces ordonnances s'inscrivent dans un projet social global".
Sur le papier, les ordonnances peuvent encore être modifiées par les députés, qui examineront quelque 360 amendements d'ici la fin de la semaine, avant un vote solennel le 28 novembre, puis un passage au Sénat.
Le gouvernement entend faire quelques retouches, notamment sur des volets controversés, pour préciser les garanties apportées aux salariés dans le cadre des nouvelles ruptures conventionnelles collectives ou pour exclure le bonus des traders du calcul des indemnités en cas de licenciement abusif.
Mais l'équilibre global des ordonnances ne sera pas remis en cause.
Les quelque 260 amendements des trois groupes de gauche - Nouvelle Gauche, Insoumis et communistes - ont peu de chances d'infléchir les mesures les plus controversées, comme la barémisation des indemnités prud'homales en cas de licenciement abusif, la fusion des instances représentatives du personnel, dont le CHSCT, ou le rôle accru de l'accord d'entreprise.
Code de travail devenu "passoire"
Les députés communistes se disent néanmoins décidés à "ne pas lâcher l'affaire" et à "continuer à mener bataille d'arrache-pied". "Il a fallu 17 ans de travail législatif pour édifier le code du travail. Un siècle plus tard, il vous a fallu 17 semaines pour en faire une passoire", a lancé Pierre Dharéville, défendant en vain une motion de rejet.
Les Insoumis n'entendent pas non plus "désarmer" contre un "plan de marche anti-social", même si leur chef de file, Jean-Luc Mélenchon a reconnu récemment qu'Emmanuel Macron avait "le point pour l'instant". Ils rejettent les ordonnances "en bloc", comme ils avaient combattu, avant d'entrer à l'Assemblée, "la loi El Khomri" sous le quinquennat Hollande, a affirmé Alexis Corbière.
Les socialistes de Nouvelle Gauche, qui ont échoué à renvoyer le texte en commission, voteront contre. "Notre désaccord demeure", a déclaré Boris Vallaud, qui a dénoncé ensuite dans l'hémicycle une réforme qui "accroîtra les inégalités" et satisfait "les plus grandes entreprises".
Et ils préparent "un recours au Conseil constitutionnel" qu'ils comptent déposer avec les autres groupes de gauche, sur "la non-réparation intégrale du préjudice subi devant les prud'hommes" ou "la liberté syndicale par rapport aux compétences" de la nouvelle instance représentative du personnel.
Mais la ratification est assurée avec le soutien d'une large majorité, au delà de LREM et MoDem. En août, la loi d'habilitation avait été largement approuvée avec aussi les voix des LR et Constructifs.
S'il défendra "quelques amendements", le groupe LR "votera la ratification", a confirmé son président Christian Jacob.
Côté rue, la mobilisation semble s'essouffler, mais une cinquième journée de protestation n'est "pas exclue" par la CGT pour qui la "bataille" syndicale n'est "pas terminée". La contestation se déplace aussi sur le terrain judiciaire avec différents recours devant le conseil d'État.