>>Bruxelles menace la Pologne de sanctions inédites pour ses réformes judiciaires
>>Pologne : les nouvelles réformes de la justice dans le viseur de Bruxelles
Le vice-Président de la Commission européenne, Frans Timmermans, le 26 juillet à Bruxelles. |
La Commission européenne avait lancé une première salve d'avertissements la semaine dernière en demandant la suspension des réformes controversées du gouvernement conservateur polonais, contestées par des manifestations massives.
"Des choses ont changé en Pologne" depuis, a admis le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, en référence au veto inattendu qu'a opposé lundi 24 juillet le président Andrzej Duda, issu du parti au pouvoir, à deux des lois accusées de menacer l'indépendance de la justice.
Mais les préoccupations de l'exécutif européen sont loin d'être éteintes, a prévenu M. Timmermans, inquiet de voir certaines mesures controversées réapparaître dans les prochaines versions des lois bloquées par le veto présidentiel.
Concernant en particulier la réforme de la Cour suprême, il a demandé "aux autorités polonaises de ne prendre aucune mesure pour révoquer ou mettre à la retraite forcée" ses juges. "Si une telle mesure est prise, la Commission est prête à déclencher immédiatement la procédure de l'article 7", a averti M. Timmermans.
"Chantage"
Cet article du traité de l'UE, encore jamais utilisé, est souvent décrit comme "l'arme nucléaire" dans la panoplie de mesures que peut prendre l'Union contre l'un de ses membres. Au terme d'une procédure complexe, il peut déboucher sur une suspension des droits de vote d'un pays au sein du Conseil de l'Union, l'instance regroupant les 28 États membres.
La Commission a donné mercredi 26 juillet un mois à la Pologne pour répondre à une nouvelle "recommandation" contre les risques pesant sur l'État de droit, une des valeurs fondamentales de l'UE. "Nous n'accepterons aucun chantage de la part des fonctionnaires de l'UE, en particulier un chantage qui n'est pas fondé sur des faits", a répliqué sans tarder le porte-parole du gouvernement polonais, Rafal Bochenek.
L'exécutif européen a par ailleurs annoncé qu'il allait déclencher une procédure d'infraction - une mesure plus habituelle, pouvant mener à des sanctions financières - contre Varsovie, dès la publication officielle de sa nouvelle loi sur l'organisation des juridictions de droit commun, contre laquelle le président polonais n'a pas opposé de veto.
Selon Bruxelles, cette réforme des tribunaux ordinaires contient des mesures discriminatoires, avec des âges différents de départ à la retraite pour les hommes et les femmes. La Commission déplore également une mesure accordant au ministre de la Justice le pouvoir de prolonger le mandat des juges ayant atteint l'âge de la retraite.
Le président Andrzej Duda, issu du parti Droit et Justice (PiS) au pouvoir, a créé la surprise en opposant lundi 24 juillet son veto à deux autres lois visées par Bruxelles, l'une portant sur la Cour suprême, et l'autre sur Conseil national de la magistrature, prévoyant que ses membres seront désormais choisis par le Parlement.
"La Pologne a besoin de paix et je m'en sens responsable en tant que président", avait expliqué le chef de l'État polonais, après plusieurs jours de manifestations. Les deux lois devront être renvoyées devant le Parlement et il faudrait une majorité des trois cinquièmes, que le PiS n'a pas, pour les adopter sous leur forme actuelle.
Irrités par le veto présidentiel, les dirigeants nationalistes du PiS ont signifié qu'ils n'avaient pas l'intention de faire machine arrière, malgré les appels venus de la rue, de Bruxelles et de Washington.
AFP/VNA/CVN