Bien que le delta du Mékong soit la région agricole de pointe du pays, avec plus de 65% de sa population travaillant dans l’agriculture, les revenus des agriculteurs restent encore faibles. Les entreprises de transformation d’aliments et d’export de produits agricoles rencontrent également de nombreuses difficultés.
En général, toute la chaîne d’approvisionnement agricole laisse encore à désirer.
Pour cette région, la stratégie nationale de sécurité alimentaire pour 2020 prévoit une augmentation de la production rizicole annuelle de 21 millions à 22,1 millions de tonnes. Quant à la production aquicole totale, elle doit croître de 28% pendant la même période. Pour atteindre ces objectifs, l’agriculture du delta du Mékong doit renforcer ses relations régionales, améliorer sa productivité et investir dans le développement d’infrastructures de transport.
Une grande parcelle de rizière du district de Vi Thuy, province de Hâu Giang, dans le delta du Mékong. |
Investir davantage
dans la distribution
La chaîne d’approvisionnement agricole de la région a beaucoup d’intermédiaires, c’est-à-dire des commerçants qui sont autant de barrières entre les agriculteurs, d’une part, et les transformateurs, les distributeurs domestiques et les exportateurs, d’autre part, car ils fournissent à de faibles prix tout en réalisant des profits, au détriment des agriculteurs. Les commerçants ont l’avantage d’avoir de bonnes connaissances sur leurs localités, ainsi que de disposer de moyens de transport fluvial et de réseaux d’entrepôts locaux. Ils privilégient le réseau fluvial du Mékong pour transporter les produits agricoles, ce qui leur permet une grande souplesse malgré le sous-développement des infrastructures de transport.
Plus de 90% des agriculteurs considèrent les commerçants comme la seule source d’information sur le marché, et comme les acquéreurs uniques de leurs produits. S’agissant des entreprises de transformation, de distribution sur le marché domestique ou d’exportation, parce qu’il n’y a pas de relations avec les producteurs, presque toutes ne comprennent pas la situation de l’offre, ce qui, au final, affecte l’efficacité de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.
Par rapport aux pays voisins d’Asie du Sud-Est (Philippines, Malaisie ou Thaïlande), le Vietnam a un précieux avantage, son réseau fluvial du delta, né de la multitude des affluents du Mékong. Ce réseau fournit non seulement l’eau pour les cultures, mais permet aussi de transporter les produits agricoles en grand volume. Néanmoins, les infrastructures des voies navigables comme des routes rurales du delta du Mékong ne sont toujours pas complètement développées.
Un centre de création
et de recherche
Aux dires de spécialistes, l’avenir de la chaîne d’approvisionnement du delta du Mékong réside dans la centralisation de la production, des achats et de la distribution afin de réduire les délais de commercialisation des produits agricoles, tout en satisfaisant les conditions adéquates à la recherche et à l’innovation.
Actuellement, la centralisation de la production est en cours grâce à la mise en œuvre de projets pilotes, dont l’expérimentation du modèle de culture à grande échelle des champs de grande superficie (relations verticales), et de celui de coopérative (relations horizontales).
Le delta du Mékong est le premier fournisseur de poissons, de crevettes et de fruits du pays. |
À l’avenir, pour une production centralisée à grande échelle, les deux modèles seront associés. Les coopératives gèreront et coordonneront la production agricole et contrôleront la qualité tout le long du processus, tandis que les entreprises donneront les orientations de production en fonction de la situation du marché, créeront des marques et investiront dans le renouvellement et le développement des technologies.
La centralisation des achats en gros implique de construire un réseau de centres de produits agricoles dans chaque province du delta, lesquels seront chargés de collecter et de procéder à des transformations primaires. Après collecte et traitement au niveau provincial, les produits agricoles seront regroupés dans un grand centre logistique moderne, où ils seront distribués pour traitement, transformation, emballage et conditionnement. La construction de systèmes de stockage à froid, d’entrepôts, de centres de traitement primaire et d’un réseau de transport multimodal, par voies routière et fluviale, demeure essentielle. De l’autre côté de la chaîne, un réseau de distribution centralisé est également à développer, avec un grand centre de distribution moderne et des marchés en gros. Il approvisionnera directement les points de vente des zones urbaine et rurale. Ce modèle est particulièrement au point dans les pays développés comme la France, et le Vietnam en aura un grand besoin dans un avenir proche.
La centralisation de la production, des achats et de la distribution n’améliorera pas seulement l’effectivité de la chaîne d’approvisionnement, mais permettra également au delta du Mékong de devenir un «centre de création et de recherche» qui poussera le développement d’autres secteurs comme les technologies de l’agroalimentaire et les biotechnologies.