Après l'épidémie, la crise, le chômage, le désarroi

Avec l'épidémie, leur vie a basculé. Salariés ou précaires, aisés ou pauvres, dans le tourisme, le secteur aérien ou la restauration, ils ont perdu leur emploi et vivent dans l'angoisse, la honte parfois, voire la déchéance.

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Sans touristes, le guide touristique mexicain Jesus Yepez n'a plus de quoi vivre. Ici, dans le centre historique de Mexico vidé par le COVID-19, le 10 juillet.
Photo : AFP/VNA/CVN

Avec la crise née de l'épidémie de COVID-19, le FMI prévoit une récession de 4,9% cette année, et selon son économiste en chef Gita Gopinath, "ce sont les ménages à faibles revenus et les travailleurs peu qualifiés qui sont les plus affectés". Des millions de personnes dans le monde sont ou seront au chômage en 2020.

De Paris à Mexico, de Kiev à Madrid, les journalistes de l'AFP sont allés à la rencontre d'employés et travailleurs des secteurs les plus touchés (tourisme, aérien, restauration, distribution, numérique), qui ont confié leur désarroi, raconté leur quotidien fait de sacrifices, leurs projets avortés, leurs craintes pour l'avenir.

Voici leurs témoignages.

Neuilly-sur-Marne (France) - "Précarité" pour l'extra de la restauration

"J'ai basculé dans la précarité". Depuis dix ans, Xavier Chergui, Français de 44 ans, faisait des extras dans la restauration comme maître d'hôtel en région parisienne. Il gagnait entre 1.800 et 2.600 euros par mois avec des pointes à 4.000 parfois.

"Là, le Covid est arrivé, tout s'est cassé la figure. Le 13 mars on m'a annoncé : +Xavier tu ne viens plus, c'est fini+". "Je n'ai pas payé mon loyer (950 euros) en mars, en avril, en mai (...) Je continue de payer 250 euros mon crédit automobile mais pas EDF (l'électricité) depuis trois mois. On remplit le frigo. On devait partir 15 jours en vacances dans les Landes (sud-ouest de la France) mais on ne part pas". "On a tout perdu (...) Psychologiquement, faut l'encaisser".

Avec son épouse qui ne travaille pas et ses deux enfants, ils vivent des 875 euros du Revenu solidarité active (RSA), qui en France assure un minimum de revenu aux personnes sans ressources. "Ma femme, elle est en mode dépression, elle pleure tous les jours". Lui, il s'accroche. "Je courbe l'échine, je fais le dos rond, en septembre l'activité va reprendre, les premières paies tomberont début octobre", espère-t-il. "Faudrait pas un retour du COVID".

Le secteur aérien, un des plus touchés par la crise du COVID-19. Manifestation d'employés d'Airbus qui prévoit la suppression de 5.000 emplois en France. À Blagnac (Sud-Ouest de la France), le 8 juillet.
Photo : AFP/VNA/CVN

Medellin (Colombie) - Reconversion forcée pour l'assistant de vol

Roger Ordonez, Colombien de 26 ans, se préparait à devenir pilote. Le jeune homme était assistant de vol pour la compagnie Avianca depuis 2017, son premier emploi déclaré, son premier salaire décent.

"Tu entres à Avianca et tu t’habitues à un certain style de vie parce que tu as un bon salaire et tu peux voyager", dit-il. Ces années-là, il est allé au Mexique, au Brésil, en Uruguay, Argentine, au Chili, aux États-Unis, il a pu emmener sa famille à l'étranger pour la première fois.

Fin mars, à la demande de l'entreprise, il accepte de prendre un congé non rémunéré de 15 jours, qui sera prolongé. Deux mois plus tard, il apprend que son contrat temporaire, échu le 30 juin, ne sera pas renouvelé. Entre-temps, la deuxième compagnie aérienne du pays a été poussée à la faillite.

Tout une vie et des projets qui basculent. Il n'a plus les moyens d'aider sa famille à payer "certaines factures". Ses études pour devenir pilote, il doit y renoncer. Sa formation ne lui sert plus à rien.

"J’ai cherché du travail mais c’est compliqué parce que mon secteur, c’est le tourisme et c’est ce qui est le plus affecté par le COVID-19". Il pense plutôt se former à quelque chose "qui ait à voir avec (…) l’administration, le commerce ou la vente".

Madrid - "La honte" de la banque alimentaire pour la femme de ménage au noir

Pour remplir le frigo et nourrir son fils étudiant, sa fille, son petit-fils, Sonia Herrera n'a pas le choix : elle dépend de la banque alimentaire. "Ça me fait un peu honte de demander de l'aide". Il y a le regard des autres et la culpabilité de se dire que "peut-être d’autres en ont encore plus besoin", dit cette Hondurienne de 52 ans.

Employée de maison non déclarée, elle gagnait 480 euros par mois. Jusqu'à ce que ses employeurs, des particuliers du centre de la capitale espagnole, se séparent d'elle au lendemain du confinement. Sans papiers, elle n'a droit à rien, aucune protection sociale.

Sa fille Alejandra, 32 ans, cuisinière dans une garderie pour environ 1.000 euros par mois, a aussi perdu son emploi avec la fermeture des centres éducatifs durant le confinement. Régularisée, elle touche le chômage : environ 600 euros qui font vivre toute la famille.

Avec leurs petites économies, ça paye "tout juste" les factures et le loyer. Les petits plaisirs quotidiens "que vous remarquez quand vous les perdez", c'est fini. "Avant, on pouvait aller manger dehors de temps en temps, une glace..." L'opération de leur chatte Bella a dû être repoussée.

"Les fins de mois me font plus peur que le virus. Il faut bien manger", dit Mme Herrera.


AFP/VNA/CVN

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