Après 20 ans de discussions, accord "historique" entre UE et Mercosur

L'Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay) ont annoncé vendredi 28 juin s'être entendus sur un vaste traité de libre-échange, touchant près de 770 millions de consommateurs, qu'ils négociaient depuis 20 ans.

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Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, le 21 juin à Bruxelles.

"Je mesure mes paroles avec soin car c'est un accord réellement historique", a réagi le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, depuis le Japon où il participait au sommet du G20.

La conclusion de ce pacte envoie "un réel message en soutien à un commerce ouvert, équitable, durable", a-t-il insisté. "Cela montre que dans ces temps turbulents (...), des compromis peuvent être trouvés".

Derrière lui, avaient pris place, pour la photo, l'ensemble des dirigeants européens et du Mercosur - dont la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Emmanuel Macron -, comme pour symboliser leur union face au courant protectionniste.

Le président argentin Mauricio Macri a aussi salué à Osaka un "jour historique", tandis que le Brésil se félicitait de l'engagement des deux blocs, à une époque "de tensions et d'incertitudes dans le commerce international, en faveur de l'ouverture économique".

Les négociateurs étaient entrés mercredi soir 26 juin à Bruxelles dans la dernière ligne droite des discussions, avec l'objectif de s'entendre enfin sur ce texte, dans un contexte mondial déstabilisé par la politique commerciale offensive du président américain, Donald Trump.

Cet accord permettra d'éliminer de nombreux droits de douane entre les deux parties au niveau industriel et agricole, mais concerne aussi les services, les marchés publics, les obstacles techniques au commerce, les mesures sanitaires et phytosanitaires et la propriété intellectuelle.

"Défis"

Des agriculteurs brûlent de la paille et des pneus lors d'une manifestation à Bordeaux (France), le 21 février 2018, contre un projet d'accord avec le Mercosur.
Photo: AFP/VNA/CVN
Photo: AFP/VNA/CVN

Le PIB de l'UE et du Mercosur représente un quart de celui de la planète, soit 18.000 milliards d'euros. L'accord, un des plus vastes jamais conclus par les 28, suscite cependant la profonde inquiétude des agriculteurs européens, qui craignent une concurrence jugée déloyale, ainsi que des ONG, préoccupées par ses conséquences pour le climat.

Le compromis négocié par la Commission devra être approuvé par les 28 États membres, un parcours qui s'annonce délicat, puis par le Parlement européen.

Les Européens ont obtenu de dernières avancées du côté du Mercosur en matière d'indications géographiques: 357 seront finalement protégées. Et surtout l'ouverture de leur secteur automobile, les droits élevés du Mercosur sur les voitures (35%) et les pièces détachés (jusqu'à 18%) devant à terme être éliminés.

À l'inverse, les Sud-Américains obtiennent un accès accru au marché européen pour leur production agricole, en particulier leur boeuf. Les agriculteurs européens n'ont cessé de protester ces derniers mois contre ces discussions.

Le compromis comporte "certains défis pour les agriculteurs européens et la Commission européenne sera à leur disposition pour les aider", a concédé le commissaire à l'Agriculture Phil Hogan. Il leur promet "une aide financière" jusqu'à un milliard d'euros "en cas de perturbation du marché".

"Pour que cet accord soit gagnant-gagnant, nous ne nous ouvrirons aux produits agricoles du Mercosur qu'avec des quotas soigneusement gérés qui garantiront qu'aucun produit ne risque d'inonder le marché européen", a-t-il insisté.

L'accord permettra au Mercosur d'exporter 99.000 tonnes de viande bovine en Europe sans droit de douane chaque année.

Inquiétudes sur l'environnement

Le président français Emmanuel Macron (gauche) et son homologue brésilien Jair Bolsonaro lors d'une réunion au Sommet du G20 à Osaka, le 28 juin.
Photo: AFP/VNA/CVN

Les négociations ont aussi été attaquées dans une lettre ouverte par 340 ONG européennes et sud-américaines, dont Greenpeace et Friends of the Earth, sur deux autres fronts: l'environnement et les droits de l'Homme.

Ces organisations, déjà opposées pour certaines aux précédentes négociations commerciales de l'UE avec les États-Unis ou le Canada, condamnent "la détérioration des droits humains et de la situation écologique au Brésil" depuis l'investiture en janvier du président d'extrême droite, Jair Bolsonaro.

Bruxelles met en avant que l'accord inclut un chapitre sur le développement durable, qui couvre "la conservation des forêts, le respect des droits des travailleurs et la promotion d'un comportement responsable des entreprises".

"Les normes de sécurité alimentaire de l'UE resteront inchangées et toutes les importations devront être conformes" à ces règles, comme c'est déjà le cas actuellement, ajoute aussi la Commission.

L'UE et le Mercosur ont échangé en 2018 pour près de 88 milliards d'euros de marchandises. Les pays d'Amérique du Sud ont essentiellement exporté leurs produits agricoles, et les Européens des produits industriels et pharmaceutiques.

AFP/VNA/CVN

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