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"Nous avons enregistré environ 630.000 franchissements illégaux de frontières, fin septembre", a indiqué M. Leggeri, en parlant de "crise migratoire sans précédent en Europe depuis la fin de la Seconde guerre mondiale", dans cette interview à paraître le 5 octobre dans les quotidiens Dernières nouvelles d'Alsace et l'Alsace (Est).
À l'approche du Conseil européen des 15 et 16 octobre, il plaide ainsi pour la coopération européenne, car "les États-membres doivent comprendre qu’au lieu de déployer des centaines de policiers à leurs frontières nationales, il serait plus utile de les envoyer à la frontière extérieure. La vraie frontière de la France, elle est à Vintimille, mais aussi à Lampedusa, à Lesbos, à Melilla ?"
Des migrants en provenance de Croatie franchissent la frontière hongroise par le village de Baranjsko Petrovo Selo, le 4 octobre. |
"Si chaque État gère la crise dans son coin, sans se coordonner avec ses voisins, les flux ne cessent de passer d’un pays à l’autre, au détriment de tous", met-il en garde.
Tout en se félicitant du doublement des effectifs de Frontex prévu en Grèce, qui sont aujourd'hui de moins de cent personnes, il affirme que, "si nous avions mille ou deux mille garde-frontières européens pour aider les autorités grecques, cela aurait un effet spectaculaire sur la crise à cette frontière".
Alors que les Européens planchent sur la mise en place de "hotspots" en Grèce et en Italie pour accueillir les migrants à leur arrivée en Europe et évaluer leur besoin d'asile, M. Leggeri souligne qu'"en moyenne, 39% des décisions d’éloignement sont effectivement exécutées", notamment à cause du refus des pays d’origine de reprendre leurs ressortissants.
"Soyons réalistes ? : si nous voulons pouvoir renvoyer les migrants irréguliers vers leur pays d'origine, il faut des lieux de rétention, en particulier dans les hotpots", affirme-t-il.
Alors que Frontex a affrété 39 avions l'an dernier pour renvoyer des migrants chez eux, M. Leggeri fixe un objectif plus ambitieux pour 2015 : "Nous devrions atteindre le nombre de 60 avions de retour de migrants illégaux à la fin de l’année".
Interrogé sur la mise en place d'un corps européen de garde-frontières, tel qu'évoqué par le président de la Commission Jean-Claude Juncker, M. Leggeri avertit qu'un tel corps "n’est pas envisageable à moyen terme, et l’objectif est d’être efficace rapidement".
"Il faut aller vers une gestion plus intégrée des frontières, un réseau européen de surveillance dont Frontex est la préfiguration. Et envisager une capacité d’action autonome dans certains cas ? : par exemple, que Frontex puisse intervenir dans une crise, sans attendre que l’État concerné en ait fait la demande", martèle-t-il.
Enfin il prévient que "la pression migratoire est un défi de longue durée", même si "nous devrions, d’ici un an, parvenir à maîtriser l’afflux brutal, sans précédent, auquel nous faisons face".
En effet, explique-t-il, "je ne vois pas de solution à court terme en Syrie et dans la Corne de l’Afrique, ni à la différence de développement entre l’Europe et l’Afrique subsaharienne ?".