>>Des technologies nano à base de balles de paddy, une fierté du Vietnam
Nguyên Thi Hoè, originaire du district de Nghi Lôc (province de Nghê An, Centre), est attirée par le monde scientifique depuis son enfance. Malgré ses maigres moyens financiers - étant jeune, elle vendait tableaux et journaux pour gagner de l’argent - elle a toujours eu la détermination de suivre de hautes études. Après son mariage et la naissance de ses trois enfants, elle a réussi le concours d’entrée universitaire et a intégré l’Université polytechnique de Hanoi. Diplôme en poche, la direction de l’université lui a proposé d’enseigner dans l’établissement.
Nguyên Thi Hoè dans son laboratoire. |
Enseignement et recherche
En 1979, Mme Hoè, 69 ans aujourd’hui, a été mutée à l’Université de Cân Tho (delta du Mékong). Malgré son travail d’enseignante, elle a toujours trouvé le temps de se consacrer à ses recherches scientifiques. En 1986, elle a été promue responsable du Centre d’études chimiques et de matériaux haut de gamme de l’Université polytechnique de Hô Chi Minh-Ville.
En 1993, grâce à son projet de peinture imperméable, Nguyên Thi Hoè s’est vu décerner le prix Kovalevskaia, la plus haute distinction honorifique attribuée aux femmes scientifiques vietnamiennes. Ce prix lui a permis d’entrer en contact et d’échanger ses expériences avec de nombreux scientifiques, professionnels vietnamiens et étrangers, et de se familiariser avec des technologies développées aux États-Unis.
Cette récompense a donc marqué le début d’un nouveau chapitre de sa vie et a été l’un des moteurs du succès qu’elle a rencontré dans les années suivantes. C’est ainsi que la société de peinture Kova (en référence aux quatre premières lettres du prix Kovalevskaia) a vu le jour, en 1998.
Grâce aux compétences scientifiques et au sens des affaires de Nguyên Thi Hoè, la peinture Kova a réussi à se faire une place sur le marché de la construction vietnamien. Elle est aussi expédiée à l’étranger, notamment à Singapour, en Malaisie, au Cambodge et au Laos. La peinture Kova a remporté une vingtaine de médailles d’or lors d’expositions internationales. Actuellement, le groupe Kova, dont le conseil d’administration est présidé par Mme Hoè, comprend douze sociétés et compte plus de 1.000 distributeurs vietnamiens et étrangers. Quelque 2.000 employés y travaillent.
Transformer la balle de riz en peinture
Après plus de dix ans de recherche, Nguyên Thi Hoè a réussi, en 2003, à fabriquer des matières premières pour la peinture à base de balle de riz. Une première mondiale, dont l’écho a dépassé les frontières du pays. Depuis avril 2003, de nombreux types de peinture Kova, respectueuses de l’environnement, ont donc vu le jour. Protégées par un brevet aux États-Unis, elles sont appréciées de la clientèle.
La peinture antibactérienne de Kova est fabriquée à base de balle de riz. |
Photo : Quê Anh/CVN |
«Cette découverte n’est pas le fruit du hasard. À l’époque, notre groupe était confronté à des problèmes économiques. Nous avons donc cherché à produire nous-mêmes des matières premières que nous importions à des prix très élevés. Et la balle de riz s’est avérée être la meilleures solution», partage la femme Docteur. Et d’ajouter: «Chaque année, les agriculteurs utilisent la balle de riz comme engrais pour leurs champs. Ils ignorent que la nanosilice, extrait de la balle de riz, est utilisée pour synthétiser le colloïde, un intermédiaire de grande valeur utilisé dans divers secteurs, dont la production de peinture».
Quatre types de peintures à base de balles de riz développés par Kova rencontrent un franc succès: anti-incendie, antibactérienne, pare-balles et antirouille.
«J’ai lu beaucoup d’articles concernant des incendies. Je voulais donc fabriquer une peinture qui puisse être utile aux citoyens», confie Nguyên Thi Hoè. Pour tester l’efficacité de sa peinture, elle utilise une torche de soudage (1.000°C) et tente de faire brûler le bois recouvert de peinture anti-incendie, pendant trois heures. Résultat : le bois n’est pas endommagé. «Je ferais tester cette peinture partout dans le monde, sans souci», dit-elle avec fierté.
Sa peinture antibactérienne est, pour sa part, utilisée dans les hôpitaux et les écoles, notamment les crèches. Elle est déjà certifiée à Singapour.
«Actuellement, un gilet pare-balles comprend de 20 à 40 de plaquettes de kevlar. Il est donc lourd et épais, et son prix est élevé. Si on le recouvrait de notre peinture pare-balles, seules 4 à 6 plaquettes kevlar seraient nécessaires. L’efficacité du gilet serait la même, mais son poids serait réduit de 60-70%», souligne la scientifique. Quant à la peinture antirouille, elle reste efficace même après dix ans passés dans l’eau.
À l’aube de ces 70 printemps, Nguyên Thi Hoè est aujourd’hui une femme d’affaires connue, pleine d’idées. Sa passion pour la science est toujours vive.
Quê Anh/CVN