La Chine s’est arrogée la souveraineté sur les archipels de Hoàng Sa (Paracel) et Truong Sa (Spratly) du Vietnam et s’est justifiée en s’appuyant sur un principe de "souveraineté historique". De facto, seule l’occupation effective, continue et pacifique au nom d’un État peut légitimer le principe en question. Or, en ce qui concerne Hoàng Sa et Truong Sa, et au regard de l’Histoire, il est clair que la Chine ne saurait se targuer d’avoir occupé de manière continue et pacifique ces deux archipels.
On ne peut pas en dire autant du Vietnam ! Les États féodaux vietnamiens ont déployé nombre d’activités pour exercer leur souveraineté sur ces archipels depuis le XVIIe siècle alors qu’ils étaient terra nullius (territoires sans maître), envoyant des détachements étudier les îles, établir des cartes, en dresser le cadastre et contruire temples et stèles.
Les "châu ban" de la dynastie des Nguyên (documents administratifs annotées à l’encre rouge par les empereurs Nguyên, 1802-1945), ne disent pas autre chose. Parmi les 773 liasses, 18 "châu ban" reflètent spécifiquement le processus d’établissement de la souveraineté sur Hoàng Sa et Truong Sa. Il s’agit des documents uniques sur la Mer Orientale qu’aucun autre pays ne possède.
En 1827, Philippe Vandemaelen (1795-1869), éminent géographe et cartographe, publiait un atlas universel en six tomes avec sept cartes des cinq continents, 381 cartes détaillées, 40 pages de statistiques et de nombreuses informations sur la géographie, la nature, la politique et les produits minéraux.
L’atlas contient 111 cartes de pays asiatiques, classées dans le deuxième tome. Le Vietnam figure dans les cartes numéro 97, 105, 106 et 110. Mais la 106e est particulièrement intéressante puisqu’elle montre le littoral du Centre du Vietnam, du 12e au 16e parallèle. L’archipel de Hoàng Sa est dessiné avec détails et exactitude, de 16 à 17 degrés de latitude et de 109 à 111 degrés de longitude.
Dans cet atlas, la carte numéro 98, intitulée "Partie de la Chine", de 18 à 21 degrés de latitude et de 106 à 114 degrés de longitude, reproduisant le Guangdong et l’île de Hainan, montre que la frontière sud de la Chine est au dessus de 18 degrés de latitude et que la partie au dessous du 18e parallèle appartient bel et bien au Vietnam.
Au temps de la domination française en Indochine, c’est au nom du Vietnam que l’administration coloniale française a poursuivi l’administration de ces deux archipels. Elle y a régulièrement envoyé des patrouilleurs afin d’assurer la sécurité et lutter contre les trafiquants.
Depuis les années 1930, la France a rattaché ces deux archipels à deux provinces du continent et y a institué des garnissons permanentes. Plus tard, conformément à l’Accord de Genève, la France les a transférés à l’administration de Saigon qui a envoyé des troupes et procédé à l’organisation administrative de ces deux archipels. En 1975, l’État de la République socialiste du Vietnam a succédé à l’administration des îles relevant de l’archipel de Truong Sa.
Le 7 septembre 1951 à la Conférence de paix de San Francisco, aux États-Unis, le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères Trân Van Huu du gouvernement Bao Dai a réaffirmé la souveraineté de l’État vietnamien depuis de longues années sur ces deux archipels. "Et comme il faut franchement profiter de toutes occasions pour étouffer les germes de discorde, nous affirmons nos droits sur les îles Spratly et Paracel qui de tout temps ont fait partie du Vietnam".
Cette déclaration qui a été notée dans le procès-verbal de cette conférence, n’a soulevé aucune protestation ni même observation. En d’autres termes, c’est un rejet explicite par la communauté internationale des revendications chinoises sur les archipels de Hoàng Sa et Truong Sa, et la reconnaissance de la souveraineté du Vietnam sur ces deux archipels.
Lors de cette conférence, la réalité historique s’est une fois de plus imposée. Ainsi donc, l’assertion de Pékin selon laquelle au terme de la Seconde Guerre mondiale, la Chine aurait récupéré les archipels de "Xisha" (Hoàng Sa en vietnamien et Paracel internationalement) et de "Nansha" (Truong Sa et Spratly) est dénuée de tous fondements actuels dès cette période.
La souveraineté vietnamienne sur ces archipels a été exercée de manière effective, continue et pacifique par les États vietnamiens, en conformité avec le droit international. Mais la Chine a tracé arbitrairement une ligne de revendication chimérique en Mer Orientale. La première carte représentant ce périmètre vague a été élaborée par le ministère de l’Intérieur de la République de Chine en décembre 1947 et publiée en 1948 sous l’intitulé "Carte des îles de la mer du Sud".
La fameuse ligne qui ressemble à une langue de bœuf, a ensuite été introduite dans la carte du gouvernement de la République populaire de Chine. Jusqu’à ce jour, la Chine n’a pas clairement déclaré si cette ligne est sa frontière nationale discontinue ou une ligne de démarcation maritime conventionnelle. Elle n’a aucune définition, ni de latitude, ni de longitude géographique.
Ne s’arrêtant pas là, la Chine a commencé à occuper la partie Est de l’archipel vietnamien de Hoàng Sa en 1956, puis la partie Ouest, gérée à l’époque par l’administration de Saigon, en 1974 en employant la force, et de même le 14 mars 1988 pour s’emparer de certaines îles coralliennes de l’archipel vietnamien de Truong Sa. Ces actes ont violé le droit international, sont allés à l’encontre de la Charte de l’ONU et ont été condamnés par nombre de pays.
"La ligne de langue de bœuf", qui n’a aucune définition, ni de latitude, ni de longitude géographique mais est utilisée par Pékin pour revendiquer tout simplement l’ensemble de la Mer Orientale, est dénuée de bases historiques comme juridiques. Son tracé arbitraire suivant ces dernières données n’est destiné qu’à satisfaire les prétentions expansionnistes de la Chine. Dépourvu de coordonnées précises, elle n’a jamais été acceptée sur le plan international.
C’est en 2009 que la Chine a affirmé à l’ONU sans fournir aucune argumentation et pour la première fois cette "ligne de langue de boeuf", conduisant le Vietnam, l’Indonésie et les Philippines à envoyer immédiatement des notes à l’ONU pour protester contre cette délimitation absurde. Lors des séminaires internationaux organisés depuis cette date, de nombreux spécialistes du monde entier ont critiqué l’irrationnalité d’une telle revendication, tout en soulignant que cette dernière était la cause directe des regains de tensions et de la complexification de la question de la Mer Orientale.
Cette "ligne de langue de boeuf" ne répond, de facto comme de jure, à aucun des critères de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982 (CNUDM) dont la Chine, en sa qualité de signataire, est tenue d’appliquer in extenso. La réalité montre que les pays bordant la Mer Orientale comme ceux en hors de cette zone réfutent tous cette revendication qui ne tient aucunement compte des zones économiques exclusives et des plateaux continentaux de ses cinq voisins que sont le Vietnam, les Philippines, l’Indonésie, la Malaisie et le Brunei.
La position du Vietnam concernant les archipels de Hoàng Sa et Truong Sa est non seulement claire, mais aussi conséquente. Il est le premier et le seul État à avoir acquis la maîtrise de manière pacifique, stable et continue sur ces archipels, fondements véritables de la souveraineté d’un pays sur un territoire. Il dispose de tous éléments historiques ayant force de preuve lui permettant d’affirmer conformément au droit international sa souveraineté sur Hoàng Sa et Truong Sa.
Par ailleurs, un autre aspect de sa position constante en ce domaine est que le Vietnam préconise de régler les différends de la Mer Orientale par voie des mesures pacifiques, en respectant le droit international comme les pratiques internationaux, en l’occurence la CNUDM et la Charte de l’ONU, outre la Déclaration sur la conduite des parties en Mer Orientale (DOC) signée 2002 entre la Chine et l’ASEAN.
Le Vietnam, en tant qu’État partie à la CNUDM, a appliqué pleinement et applique toujours l’ensemble des dispositions de la CNUDM qui l’ont autorisé et l’autorise à faire valoir ses droits souverains et de juridiction - selon les termes propres de cette Convention - sur ses eaux territoriales, sa zone économique exclusive ainsi que son plateau continental dont elle fixe l’étendue conformément aux règles de cette dernière.
Et, en conséquence, elle a légitimement exercé son contrôle sur son territoire maritime afin d’y assurer la sécurité, exploré et exploité des ressources halieutiques comme les ressources en énergies fossiles, tout en protégeant l’environnement maritime dans le cadre de ces activités. Concernant ces dernières, elles n’ont été menées que dans sa zone économique exclusive ou son plateau continental de 200 milles marins qui ne font l’objet d’aucune revendication territoriale.
La Chine, qui a signé et ratifié la CNUDM, se doit d’appliquer cette Convention dans son intégralité. Son installation de la plate-forme pétrolière Haiyang Shiyou-981 dans la zone économique exclusive et le plateau continental du Vietnam depuis début mai 2014 ne saurait en aucun cas être justifiée par ses revendications irrationnelles qu’elle tente d’asseoir une politique du fait accompli en prétendant que toutes opérations de prospection et d’exploitation pétrolière par les pays en Mer Orientale présupposent son accord préalable.
Une telle position qui consiste d’abord à dénier la CNUDM, compte tenu des caractéristiques de ses revendications territoriales, pour, ensuite, tirer pleinement profit de cette convention, montre à tout le moins que la Chine fait fi de la manière la plus cynique de ses engagements internationaux, tout en n’hésitant pas à gravement porter atteinte à la souveraineté des États bordant la Mer Orientale, à commencer par celle du Vietnam.
VNA/CVN