>>De Phát Diêm à Bái Ðính, un saut du catholicisme au bouddhisme
>>Les vœux de Noël aux catholiques à Ninh Binh, Nam Dinh et Bac Ninh
On trouve des églises dans les trois grandes régions du Vietnam. |
Photo : VNA/CVN |
Quand j’avais 6 ou 7 ans, je m’amusais souvent à regarder les images du gros Catalogue de la Manufacture d’armes et de cycles de Saint-Étienne. Toutes sortes d’articles enchantaient mon imagination. Mais je feuilletais toujours rapidement les pages présentant les crucifix tant j’éprouvais une horreur viscérale à la vue du Christ ensanglanté. Plusieurs de mes amis partageaient le même sentiment. C’est dire combien les Vietnamiens se sentent depuis leur enfance étrangers au Dieu des Occidentaux.
C’est plus tard, au lycée, que j’ai découvert la beauté de cette religion à travers le Génie du christianisme de Chateaubriand.
Pourquoi, depuis son implantation au XVIIe siècle, le catholicisme n’a-t-il pas pu acquérir chez nous un caractère national comme le bouddhisme, le confucianisme et le taoïsme qui ont été aussi au départ des religions étrangères. Parce qu’il ne tolère pas le culte des ancêtres et les divinités païennes.
En outre, il a toujours épousé la cause des conquérants et des occupants étrangers. Les efforts des intellectuels et des prêtres catholiques lucides tendent à ramener leur communauté au bercail national.
Il est temps que les Vietnamiens non catholiques se rendent compte des contributions culturelles du catholicisme au patrimoine national. Il manque encore d’études approfondies et d’ouvrages de vulgarisation à ce sujet.
Il y a une culture catholique marquée par de grands noms et de grandes œuvres.
Cathédrale en pierre originale
La cathédrale de Phát Diêm dans la province de Ninh Binh, au Nord. |
Photo : VNA/CVN |
En politique, chacun connaît Nguyên Truong Tô (1828-1871), lettré confucéen, érudit patriote ouvert aux idées de l’Occident. Face à la conquête française, il a avancé des réformes judicieuses en vue de la modernisation. Si ses propositions avaient été agréées par la Cour de Huê, le Vietnam aurait connu un autre destin.
En architecture, le Père Six a construit à Phát Diêm, province de Ninh Binh, au Nord, une cathédrale en pierre originale, marqué par l’empreinte traditionnel.
En peinture, Lê Van Dê (1906-1966) s’est fait un nom grâce à ses fresques au Vatican et à ses magnifiques laques et peintures sur soie qui allient la perspective occidentale à l’art oriental.
En littérature, Hàn Mac Tu (1912-1940) s’affiche dans les années 1930 comme un promoteur du mouvement de la "Poésie Nouvelle" (Tho Moi) avec ses œuvres d’une veine symbolique et mystique.
Signalons également les nombreux chants liturgiques en vietnamien, les orchestres de cuivre de paroisse qui popularisent la musique occidentale, les fêtes des Saints avec leurs fastes régionaux, autant d’apports à la culture populaire. Enfin n’oublions pas que les tâtonnements dans les traductions de la Bible ont enrichi et assoupli la langue vietnamienne.
(Février 1995)