Un tendre souvenir d’enfance

Je me souviens d’avoir pleuré à chaudes larmes en regardant la pièce Pham Công - Cúc Hoa, contant les tribulations de deux petits orphelins chassés du foyer paternel par leur marâtre. Le fantôme de leur mère revint une nuit pour les soigner…

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Une scène de la pièce de théâtre populaire "Pham Công - Cúc Hoa".
Photo: CTV/CVN

Quand j’étais petit, ma mère, ange de bonté et de douceur, et atteinte de choléra, dont les épidémies étaient fréquentes au temps de la colonisation, nous quitta de manière fulgurante. C’est ainsi que j’ai été hanté toute ma vie par la scène de chèo (théâtre populaire) Pham Công - Cúc Hoa. Cette dernière est tirée d’un roman populaire en nôm (idéogrammes inspirés par les caractères chinois pour transcrire phonétiquement le vietnamien) dont le genre est né sans doute vers la fin du XVIIIe siècle - début du XIXe.

Voici le récit en bref

Fils unique d’un pauvre bûcheron, Pham Công, orphelin de père dès son enfance, doit mendier pour subvenir à ses besoins et nourrir sa mère, ce qui ne l’empêche pas de suivre les cours d’un lettré charitable. Une camarade de classe, Cúc Hoa, s’éprend de lui et l’épouse avec le consentement de ses parents (le père de Cúc Hoa était mandarin).

Peu après, la mère de Pham Công meurt. Trois ans passent. Le jeune ménage est soumis à de dures épreuves. Cúc Hoa, enceinte, a dépensé tous ses biens, tandis que Pham Công doit se rendre à la capitale pour se présenter au concours royal.

Reçu premier lauréat, il décline l’offre du roi Nguy qui lui propose sa fille en mariage. Le monarque l’envoie en exil chez les Huns. Là, il est encore reçu premier Docteur et contraint de nouveau à épouser une princesse. Comme il refuse, le roi Hun lui fait couper les mains, crever les yeux et arracher les dents.

L’Empereur céleste punit le tyran et guérit toutes les mutilations de la victime. Sur le chemin de retour, Pham Công est encore reçu premier Docteur au pays Triêu. Cette fois, c’est heureusement la princesse, fille du roi, qui intervient pour éviter le mariage proposé par son père. Il retrouve enfin sa femme qui lui donne, après leur premier fils, une fille.

L’une des adaptations du roman populaire "Pham Công - Cúc Hoa" en BD.

Cúc Hoa meurt à 30 ans, au moment où les troupes étrangères envahissent la région frontalière. Pham Công, à la tête d’une armée, part au-devant de l’ennemi, emmenant avec lui la dépouille de sa femme.

À la fin de la campagne, il épouse en secondes noces Tào Thi. Trois ans après, il est affecté à un nouveau poste dans la lointaine province de Cao Bang (Nord). Pendant son absence, Tào Thi se console avec un amant et met à la porte les enfants de Cúc Hoa. Celle-ci revient du pays des morts pour revoir ses enfants. Avant de les quitter, elle coud à leurs vêtements une lettre de dénonciation.

La mission terminée. Pham Công revient chez lui où il apprend la vérité. Il répudie Tào Thi qui sera frappée par la foudre et s’en va à la recherche de sa première femme dans le royaume des ténèbres, afin de la ramener chez les vivants. La famille à nouveau réunie connaît cette fois un bonheur sans tache.

Caractéristiques communes des romans populaires

Pham Công - Cúc Hoa offre des caractéristiques communes aux romans populaires de la même époque (fin du XVIIIe et début du XIXe siècle).

Premièrement, au point de vue de la forme, il emploie les distiques 6+8 pieds spécifiquement vietnamiens. Le style parlé est simple, parfois gauche mais assez souple et lyrique.

Deuxièmement, il est anonyme, plutôt destiné à être raconté.

Troisièmement, dans ce roman, la plupart des noms propres et des descriptions de paysages et mœurs sont vietnamiens.

Quatrièmement, le Happy end: les bons récompensés, les mauvais punis. Il traduit l’aspiration des masses paysannes exploitées et opprimées par le régime de la monarchie absolue.

Cinquièmement, la morale féodale teintée par le confucianisme exalte la fidélité au roi et au mari, la piété filiale, l’honnêteté et le courage. Mais il chante aussi l’amour d’une fille de bonne famille (Cúc Hoa) pour un mendiant, la loyauté d’un mari qui ose désobéir à l’ordre royal d’épouser une princesse. Ce sont des dérogations à l’ordre confucéen.

Sixièmement, plusieurs thèmes sont communs à des contes populaires: la présence d’esprit de l’ambassadeur vietnamien en Chine, la descente dans le royaume des ombres, l’offre à un premier Docteur de se marier avec une princesse étrangère, le lettré pauvre reçu premier Docteur, etc.

Huu Ngoc/CVN
(Mai 1999)

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