Un roman musical et gustative

Hanoi, le nouveau roman d’Adriana Lisboa est paru aux Éditions Métailié le 12 mars dernier. L’écrivaine brésilienne nous raconte la musique, les déplacements, les détails qui changent un destin. Une histoire contemporaine sur les rencontres entre cultures différentes et le métissage.

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Adriana Lisboa a été récompensée par de nombreux prix littéraires. Après Des roses rouge vif en 2009 et Bleu corbeau en 2013, elle est considérée comme une des romancières les plus importantes de la nouvelle génération littéraire brésilienne. Son roman Hanoi dans la Collection Bibliothèque brésilienne sera certainement aussi très remarqué et salué comme il se doit.

Des personnages attachants

Six chapitres, 175 pages et des dizaines de personnages inoubliables font de ce roman une vraie découverte. Le livre s’ouvre sur la vie de David, personnage principal, trompettiste passionné de jazz, exerçant un tout autre métier pour vivre et qui se découvre très malade. Il ne lui reste plus que quelques mois à vivre : «Une maladie. Un nom pompeux, n’est-ce pas ? Glioblastome multiforme. Ça pourrait être le nom d’une figure géométrique…»

Parallèlement au destin de David, on suit celui d’Alex, une jeune mère célibataire d’origine vietnamienne et de son fils de 4 ans, Bruno. La jeune femme travaille dans une supérette asiatique à Chicago, dans le quartier de la ville appelé «Little Vietnam» : «Elle s’appelait Alex. Un nom occidental pour un visage qui ne l’était qu’à cinquante pour cent. Comme ça, tout de go, il était difficile de savoir d’où elle venait». Le grand-père d’Alex était Américain et les parents de David sont Brésiliens et Mexicains. On est ainsi ici vraiment dans une histoire d’immigrants, de langues différentes et d’adaptation à un nouveau pays.

La couverture du roman Hanoi.
Photo : Hervé Fayet/CVN

Si David n’a plus de famille proche, Alex côtoie toujours sa grand-mère Linh, sa mère Huong et M. Trung, le propriétaire de l’épicerie asiatique où elle travaille comme caissière, lieu capital, au cœur du roman. Des liens forts unissent tous ces gens et on le comprend vite, Alex et David vont se rencontrer, se côtoyer, s’aider l’un l’autre, s’aimer. Alex aidera David à accepter sa maladie et son futur. David poussera Alex à aller de l’avant, à dévoiler à son enfant qui est son vrai père. Se sachant perdu, David décidera de se débarrasser de tout ce qu’il possède et voudra chercher un lieu pour mourir en paix. Alex lui soufflera alors l’idée d’aller avec lui… à Hanoi.

Un voyage impossible pour David

Hanoi est donc le titre du roman et aussi la ville qui unit tout le monde : «Hanoi, la ville entre les fleuves, la ville de la grand-mère d’Alex…». Ainsi, si l’ouvrage d’Adriana Lisboa n’est pas à proprement parler un livre sur le Vietnam, les références au pays y sont légion. C’est assez bouleversant de voir que cette romancière brésilienne rapproche finalement les continents et œuvre pour une meilleure compréhension du monde.

On comprend vite que David ne pourra pas se rendre au Vietnam et c’est Alex qui y retournera pour lui avec Bruno et le père de Bruno, comme un retour aux racines et un hommage au musicien et à l’homme au grand cœur. De fait, Adriana Lisboa aurait pu tomber dans une ambiance glauque, remplie de souffrance et de désespoir. Pourtant, il n’en est rien, Hanoi peut se lire d’une traite tant il est passionnant et souvent drôle, mais aussi de temps en temps acide : «Il alla aux toilettes ou une petite plaque au-dessus du lavabo disait vous êtes-vous lavé les mains ? Cette habitude simple évite les maladies».

Le lac Hoàn Kiêm (lac de l’Épée restituée), un plan d’eau central de Hanoi.
Photo : Anh Tuân/CVN

C’est un bel ouvrage qui permettra à tous les lecteurs de découvrir une capitale asiatique, mais au-delà une langue, une histoire, un mode de vie, des traditions et la gastronomie : «Huong plaça sur la table le grand bol plein de riz, le tofu frit, les haricots frits et la salade fraîche, la soupe, la papaye au vinaigre, la sauce. Bruno se lança dans l’aventure et expérimenta tous ces plats avec la joie rare consistant à manger un repas confectionné par sa grand-mère».

Le dernier chapitre du roman est extrêmement émouvant : «En rentrant à l’hôtel, Alex dit adieu à David. Cette promenade solitaire, le premier matin, était une promenade qu’elle avait faite pour lui et, dans un certain sens, avec lui aussi. Sa compagnie était gravée dans sa mémoire».

On referme le livre à regret et les personnages continuent de vivre en nous, à la manière de l’écriture de l’auteur et de sa vision de la vie, en mode jazz. À lire d’urgence et à offrir à vos proches. Quelque chose me dit que ce roman fera du bruit et pourrait peut-être inspirer quelques réalisateurs de cinéma. On prend les paris ?

Hervé Fayet/CVN

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