Tinna Tinh et son rêve vietnamien

Abandonnant sa vie de vendeuse de barbecue en République tchèque, Tinna Tinh a rejoint le Vietnam pour réaliser son rêve de devenir artiste. Sur le chemin tortueux de la recherche de soi, succès et réussites étaient toujours teintés du doute et de sa sensibilité.

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La chanteuse et actrice Tinna Tinh.
Photo : TN/CVN

Tinna Tinh, de son vrai nom Tinna Dinhova ou Dinh Thi Tinh, est née en 1982 en République tchèque. Enfant métisse de père vietnamien et de mère tchèque, elle voit sa famille brisée par le divorce de ses parents, à l’âge de 16 ans, et décide de changer de vie en émigrant dans le pays natal de son père. Après des débuts difficiles, elle réussit à atteindre le succès peu à peu et est reconnue aujourd’hui comme artiste polyvalente : chanteuse, compositrice, actrice et réalisatrice. Mais, le parcours de la réussite est semé d’embûches.

Des cachets de 30.000 dôngs

Tinna Tinh commence la conversation en évoquant la raison pour laquelle elle a décidé de s’installer au Vietnam. Après le divorce de ses parents, ses études à l’arrêt, elle vit seule à l’âge de 15 ans. "Je vendais de la viande au barbecue mais mon rêve, encouragé par mon âme romantique, n’était pas simplement de gagner de l’argent. Je voulais devenir une véritable artiste et j’ai pensé au pays natal de mon père. En un an et demi de travail, j’ai économisé suffisamment pour le voyage".

Elle choisit Hanoï comme destination pour sa carrière de chanteuse. "C’était en 1999 dans la voiture quittant l’aéroport international de Nôi Bài vers mon appartement loué dans la capitale, je pleurais en voyant les femmes enceintes travailler dans les rizières et les enfants assis sur le dos des buffles sous le soleil brûlant. Je n’osais imaginer tout ce qui pourrait advenir dans les jours qui allaient suivre", se souvient-elle.

La jeune femme rencontre ses premiers échecs et ne reçoit aucune opportunité de se produire pendant un an et demi. Alors que ses poches sont complètement vides, elle rentre en République tchèque pour économiser à nouveau, sans abandonner pour autant son rêve initial. En 2001, la chance lui sourit enfin, lors de sa deuxième expérience au Vietnam. Elle chante chaque soir dans un bar de Hanoï pour un cachet de 30.000 dôngs. De temps en temps, la somme s’élève à un million de dôngs.

Un soir, la voyant se produire sur scène, le réalisateur Nguyên Quang lui propose de jouer le rôle féminin principal dans son projet de film utilisant les technologies 3D de l’époque. "C’est le film +Tro đùa cua thiên lôi+ (Rigolades du Génie de la foudre) sorti en 2004 pour lequel j’ai décroché le Cerf-Volant d’or de la catégorie +Nouvelle Révélation+, à l’âge de 22 ans". Pour information, les Cerfs-Volants d’or constituent le prix le plus prestigieux du 7e art vietnamien.

Tinna Tinh devient alors un véritable phénomène, non seulement dans la musique mais aussi dans le cinéma. Avec son contrat d’artiste signé pour sept ans avec la société de développement artistique Vân Son, Tinna Tinh se produit largement dans le pays et auprès de la communauté des Vietnamiens à l’étranger. Elle commence à composer ses œuvres qu’elle soumet au concours télévisé "Bài hát Viêt" (Chansons vietnamiennes) et qui lui décerne plusieurs prix prestigieux pendant trois années consécutives (2009-2011), pour la chanson Give me back my life (Meilleure chanson du mois d’août et meilleure chanteuse) en 2009 par exemple.

"Pour moi, composer est partager mes pensées, mes joies et mes chagrins. Je n’ai jamais imaginé que cela intéresserait le jury et les téléspectateurs", avoue-t-elle. Parallèlement à la musique, elle reçoit des propositions de rôles pour des films au cinéma. En 2011, la rockeuse obtient son 2e Cerf-Volant d’or pour son rôle secondaire dans Long Ruôi (Long le Mouche) du réalisateur Charlie Nguyên.

Se retrouver après le tumulte du showbiz

À 27 ans, Tinna Tinh a tout pour elle, et est devenue une jeune artiste accomplie, débordée de contrats pour se produire sur scène et de propositions de rôle. Son premier livre Mat na (Le masque), écrit en 2012, est aussi un succès. Révélant les aspects moins glamours du showbiz, l’ouvrage a été réimprimé à plusieurs reprises et se vend encore bien.

La rockeuse Tinna Tinh sur scène.
Photo : TN/CVN

Mais, c’est à cette période qu’elle commence à ressentir une énorme fatigue et un profond sentiment de solitude. Elle a l’impression de se perdre complètement. "Je faisais face à des pressions quotidiennes en voyant les contrats s’accumuler. On me demandait de chanter comme une autre personne, et de faire des concerts qui ne me représentaient pas. Un jour, je me suis demandée : +Qu’est-ce qui m’appartient réellement ? À quoi ça sert d’avoir une belle maison, une superbe voiture et toutes les récompenses qui vont avec si je ne peux pas vivre ma propre vie ?+".

La rockeuse relate ses mois de stress, de travail acharné et de scandales crées par la jalousie d’autrui, notamment quand elle a dû faire face à la rumeur de sa séropositivité au VIH. Désespérée, elle se serait sûrement suicidée si sa mère ne lui téléphonait pas fréquemment pour la soutenir. Pour rééquilibrer sa vie professionnelle et sa vie privée, et reprendre confiance en elle, Tinna Tinh choisit alors de suspendre ses projets musicaux. Elle se consacre désormais à l’écriture, à sa chaine Youtube ainsi qu’à plusieurs projets cinématographiques.

Cette année, à cause de la situation de pandémie, son film Hat giông thuc tinh, version vietnamien de Awakening Seed, n’a pas pu sortir dans les salles obscures. Il est diffusé gratuitement sur sa chaine Youtube personnelle depuis le 6 mars. Selon elle, cette production cinématographique permet au public de mieux comprendre nos attentes dans la vie et de faire face aux aspects les plus noirs de la société, comme l’envie de se suicider, le stress et la pression au travail.

Linh Thao - Nguyên Anh/CVN

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