>>L’emblème de Hanoï, incarnation de l’histoire et des valeurs du pays
>>Unis pour préserver et valoriser le patrimoine culturel vietnamien
Selon les archéologues, la citadelle de Cô Loa est considérée comme l’ouvrage le plus ancien et le plus important du Vietnam, mais aussi d’Asie du Sud-Est. Elle est construite en adéquation avec les conditions naturelles de cette région. Les fleuves servaient de protection aux murailles externes, tandis que les tertres permettaient de renforcer les capacités de défense de cet ouvrage historique.
La citadelle se composait à l’origine de trois spirales concentriques séparées par des fossés. Des parties de l’ouvrage ont été gravement endommagés par l’activité humaine. Et ces empiétements ne sont pas nouveaux.
Lê Viêt Dung, directeur adjoint du Comité de gestion de l’ancienne citadelle de Cô Loa, a expliqué que près de 1.000 familles habitaient dans le site depuis des générations. Certaines vivent dans les fameuses spirales depuis 300 ans. Il est donc évident que cette présence humaine a contribué largement à la modification du site et à sa dégradation. "Cô Loa a été reconnu comme vestige national en 1962 alors que ces familles étaient déjà installées ici", a-t-il indiqué.
"Avant 1962, le site n’était géré par aucun organisme et les habitants locaux étaient libres d’y construire des maisons. En 2006, des certificats d’utilisation foncière ont été accordés à ces familles en vertu de la loi foncière, ce qui a involontairement créé une contradiction entre les efforts de préservation et les contraintes de la vie réelle".
Actuellement, quelques parties ont été bétonnées pour servir de routes et de base à des logements résidentiels. La spirale intérieure a perdu sa forme d’origine, elle n’est plus visible que par quelques monticules. Les murs du milieu et ceux extérieurs conservent leur forme, bien qu’ils ne soient pas aussi hauts qu’autrefois: 1 à 3 m au lieu de 7-8 m auparavant.
Les fossés, un des témoins de grande valeur du site, ont été largement dénaturés. Certains, remblayés, servent à la construction de logements ou à la culture du riz, d’autres à l’élevage de poissons, altérant ainsi leur forme d’origine.
Le site architectural de Dông Vông, au bord de la rivière Hoàng Giang, est sur le point d’être complètement effacé par des maisons privées.
Vue aérienne du site national spécial de l’ancienne citadelle de Cô Loa, dans le district de Dông Anh, à Hanoï. |
Trân Dinh Thành, directeur adjoint du Département des patrimoines culturels du ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme, a reconnu que le site était habité depuis bien avant 1962. "C’est pourquoi il y a des bâtiments, des maisons et des routes", a-t-il affirmé.
Selon Lê Viêt Dung, cette citadelle a été gérée de manière contradictoire par plusieurs agences publiques. "Le Comité de gestion ne contrôle que les temples, les maisons communes, les puits, les jardins et les étangs, tandis que les murs, les canaux et la rivière Hoàng Giang sont sous le contrôle des autorités de la commune", a-t-il informé.
"Les organismes concernés avaient tenté de ne protéger que le cœur du site. Ils ont préservé les maisons communes et les temples, mais ont laissé les murs, les canaux et la rivière, éléments constitutifs de la structure unique de la citadelle, sans protection", a souligné le Professeur Lai Van Toi, chef adjoint de l’Institut d’étude des citadelles impériales.
Bien que le nombre de violations ait diminué ces dernières années, les experts ont indiqué que les quelques cas individuels actuels sont plus graves.
"Les violations deviennent de plus en plus graves, a ajouté le Professeur Nguyên Van Huy. Si les organismes de gestion ne réagissent pas rapidement, les anciens murs et canaux disparaîtront complètement dans un avenir proche".
Le Professeur Huy a déclaré que les empiètements persistants témoignaient d’un manque de sensibilisation du public et de 60 années de mauvaise gestion du site.
Le Professeur Lâm My Dung, de l’Université des sciences sociales et humaines, relevant de l’Université nationale de Hanoï, a indiqué que les échecs de gestion résultaient d’une coopération insuffisante entre chercheurs et autorités de gestion. "Je réalise que les économistes n’aiment pas les archéologues. Donc, pour préserver ce patrimoine, les scientifiques ont dû accepter de le rendre plus attrayant pour les investisseurs. Personne ne semble penser que nous devrions protéger notre patrimoine pour des raisons de fierté nationale".
Le plan de préservation et de restauration de 2015, approuvé par le gouvernement, a posé une base légale pour réduire progressivement les violations et faire du site un espace historique, culturel et écologique.
Récemment, le Comité populaire de Hanoï a aussi approuvé le plan de gestion, de préservation et de valorisation du site national spécial de Cô Loa pour la période 2018-2020, dans le but, notamment, de restaurer les murs de la citadelle. Le budget prévisionnel s’élève à plus de 60 milliards de dôngs.
"Je pense qu’avec ce plan global, le site sera mieux géré", a affirmé Trân Dinh Thành.
"Les visiteurs peuvent clairement constater que le tourisme n’a pas été développé sur le site, a indiqué le Professeur Huy. Les gens affluent ici lors des fêtes au début du Nouvel An lunaire, mais le reste de l’année, il est presque désert. Les touristes visitent les temples mais ne prêtent guère attention aux murs et aux canaux de la citadelle en ruine".
La porte du temple An Duong Vuong. |
Fleuron de l’histoire du Vietnam
Située dans le district de Dông Anh, à environ 20 km du centre-ville, l’ancienne citadelle de Cô Loa était la capitale du Royaume Âu Lac sous le règne du roi An Duong Vuong au IIIe siècle avant Jésus-Christ. Elle couvre 500 ha et abrite de nombreux sites archéologiques dont les fouilles ont montré que le développement du Vietnam a été continu durant l’âge de la pierre, l’âge du bronze et l’âge du fer.
Cô Loa, la plus ancienne citadelle du Vietnam, témoigne des techniques de construction de l’époque et du génie dans l’architecture militaire des Vietnamiens, qui surent profiter de la configuration du terrain pour construire deux enceintes en colimaçon.
Elle comportait, à l’origine, neuf spirales de terre selon la légende, et trois selon les archéologues: celle à l’extérieur mesurait environ 8 km, celle du milieu, 6,5 km, et la dernière, 1,6 km. Hautes en moyenne de 4 à 5 m avec un maximum en certains endroits de 8 m à 12 m, leur base était épaisse de 20 m à 30 m. Constituées de terre, elles étaient renforcées par des haies de bambous et bordées de larges douves...
Au 6e jour du premier mois lunaire de l’année, la population locale organise une fête solennelle en l’honneur des bâtisseurs de la citadelle et du roi An Duong Vuong.
En 1962, l’ancienne citadelle de Cô Loa avait été reconnue en tant que site national. En 2012, elle est devenue un site national spécial de grande valeur sur les plans tant historique, architectural qu’archéologique.
Il est urgent de sauver ce fleuron de notre patrimoine national.