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A déclaré Monica Lewinsky, qui d’une personne ordinaire est devenue le sujet de l’humiliation publique, lorsque sa liaison avec le président américain Bill Clinton a été révélée sur un site web. Avant Internet, les nouvelles provenaient de trois sources principales : le journal papier ou le magazine, la radio et la télévision. C’était la première fois que les médias traditionnels étaient devancés par Internet : "un clic qui s'est répercuté partout dans le monde". Sur Internet, les informations circulent à grande vitesse. De nos jours, l’accès facile à Internet couplé à l’anonymat derrière l’écran offre un espace idéal à la liberté de l’expression. Par conséquent, les harceleurs se sentent protégés par l’écran, ils peuvent laisser aller leurs penchants agressifs.
Image du projet de Brise le Silence contre le cyber-harcèlement de la Police Nationale. |
Photo : Internet |
Le Vietnam n’est pas en marge de ce phénomène tandis qu'Internet est en plein essor avec 49 millions d’internautes, ce qui représente 52% de la population vietnamienne. Selon le Programme du Vietnam sur Internet et la Société, 61,7% des internautes sont témoins ou victimes de discours de haine, humiliation et diffamation. S’y ajoute le fait désolant que la plupart des victimes sont des femmes.
Quelles intentions les harceleurs ont-ils ?
D’un côté, les harceleurs se prennent pour des justiciers. Ils pensent qu’ils ont le devoir de condamner une action qu’ils jugent mauvaise. La colère les conduit à l’action. Pourtant, les harceleurs ne se concentrent pas vraiment sur le problème, mais ils salissent surtout la réputation des victimes. Si l’on prend le cas de la chanteuse vietnamienne - Hồ Ngọc Hà qui a eu une liaison extra-conjugale avec un homme marié, les insulteurs ont non seulement attaqué le geste mais aussi sa dignité humaine. De plus, certains pensent qu’ils ne peuvent avoir recours qu’à eux-mêmes et qu’il vaut mieux mettre les affaires en lumière car la loi en vigueur n’est pas assez stricte.
Par ailleurs, les harceleurs insultent les victimes afin de se distraire. Ils éprouvent de la satisfaction en regardant les malheurs qui arrivent des autres. Par ce moyen malsain, ils peuvent sentir qu’ils sont plus chanceux et réduire leur stress dans la vie réelle. Considérons le cas cette jeune fille de 15 ans à Đồng Nai. Après une rupture amoureuse, son ex-copain a publié une vidéo de leurs ébats amoureux sur Facebook par vengeance. Néanmoins, les gens ont attaqué la fille, insulté son apparence et sa dignité au lieu de condamner l’action du garçon. À la suite de cela, la fille a décidé de se suicider.
Et les victimes dans tout cela ?
Le cyber-harcèlement est malheureusement un phénomène fréquent, exacerbé par le fait que les victimes ont souvent tendance à se taire.
Le rôle des témoins évoluant dans l’espace public d’Internet contribue aussi à renforcer le sentiment d’oppression et les souffrances des victimes qui sentent ainsi leur détresse exposée au monde entier. Le rôle de ces spectateurs peut néanmoins être déterminant dans la persistance du phénomène ou dans la résolution de celui-ci.
Pour la victime, tout d’abord, le cyber-harcèlement engendre un sentiment de détresse qui s’aggrave au fur et à mesure que le phénomène persiste. Il peut avoir des conséquences désastreuses à long terme sur le développement socio-émotionnel des victimes. Le fait d’être victime de cyber-harcèlement peut engendrer des comportements d’anxiété et de dépression. La souffrance morale est parfois difficile à saisir dans son intensité mais on sait que les conséquences les plus dramatiques peuvent pousser un jeune au suicide comme le cas de la fille de 15 ans.
"Les victimes de cyber-violence et de cyber-harcèlement rapportent des sentiments de colère, de tristesse, de peur, de honte et de plus hauts niveaux d’anxiété que les jeunes qui n’en sont pas victimes". (Juvonen & Gross, 2008 ; Rémond, Kern, & Romo, 2015). Puis, le cyber-harcèlement conduit à plus d’introversion, à une perte de confiance en soi. Les harceleurs insultent tout ce qui appartient à la victime telle que ses actions, son apparence, etc., et donc les victimes sentent qu’elles perdent toutes leur dignité et leur valeur à cause de ces commentaires haineux.
Enfin, les victimes ne peuvent pas s’exprimer en public parce que les harceleurs dirigent toutes leurs attaques sur elles. Ils ne laissent pas aux victimes l’opportunité de se défendre parce qu’ils pensent que leurs explications ne sont pas dignes de confiance.
Internet nous offre certes un espace idéal pour la liberté d’expression, un espace démocratique où tout le monde peut s’exprimer malgré son niveau socio-économique voire éducatif. Mais cet espace souffre du fait d’être transformé à cause du manque de capacité à s'écouter et être compatissant envers les femmes.
Alors comment faire d’Internet un lieu sûr pour les femmes ?
Les victimes sont outragées dans leur honneur et lapidées virtuellement. |
Photo : Internet |
À une échelle plus grande, à côté d’une loi claire, précise et stricte, il s’agit aussi de prendre des mesures qui visent à gérer rapidement les notifications de violation et supprimer les contenus entravant au règlement. En réalité, les prestataires de service de réseaux sociaux ne sont pas vraiment actifs ni réactifs dans la lutte contre les discours de haine. En dépit de la présence de la fonction "signaler la publication" pour les contenus illégaux, le taux de la suppression de ces contenus après le signalement reste bas et ineffectif : 46% sur Facebook, 10% sur YouTube et 1% sur Twitter. Le Code de Conduite rendu public par la Commission européenne en tant que moyen d’aider à la lutte contre les discours haineux et pour éviter une prolifération de tels propos en 2016 est un cas d’espèce pour traiter ce problème.
Dans un aspect plus personnel, il faut cesser le "victim blaming" (blâme de la victime). "Pas étonnant que tu sois lapidée en agissant de cette façon" est la phrase la plus commune des cyberharceleurs en parlant du cas de la chanteuse Hồ Ngọc Hà ou celui de la lycéenne de Đồng Nai.
Cette pensée que les victimes sont responsables de ce qu’il leur arrive et qui méritent l’humiliation publique doit être éliminée parce que bien que les victimes puissent commettre des erreurs, elles restent des êtres humains avec dignité et fierté. Non seulement devons-nous arrêter le blâme de la victime, mais nous devrions également donner la parole aux victimes, spécialement quand nous soulignons le fait que nous le faisons par principe et non pas pour protéger ceux du même côté.
De surcroît, il ne faut pas non plus harceler ceux qui nous harcèlent et éviter une communication violente parce qu’il n’est pas concevable de combattre le mal par le mal.
Minh Anh - Kiều Nga/CVN
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