Mexique
Quand l'art change la vie d'un quartier déshérité

Il y a encore peu, le quartier de Palmitas, dans la ville de Pachuca, à une petite centaine de kilomètres de Mexico, avait mauvaise réputation.

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Le quartier de Palmitas à Pachuca, près de Mexico, a été repeint par un collectif d'artistes, le 6 août 2015.

On ne se risquait pas dans ses ruelles abruptes, à flanc de colline, où la délinquance était élevée. Des bandes s'affrontaient à mort entre ses murs décrépis. Mais aujourd'hui, ce quartier déshérité est au centre de l'attention, depuis qu'un collectif d'artistes mexicains baptisé Germen Crew a réalisé une immense fresque murale sur l'ensemble des maisons avec l'aide de ses habitants.

Repeintes aux couleurs de l'arc-en-ciel, les modestes habitations dessinent ensemble une immense vague gaie et colorée qui redonne de la fierté à toute sa population et lui ouvre de nouveaux horizons. Au total, près de 20.000 m2 de murs ont été repeints, dont 202 maisons, impliquant 452 familles.

Une vingtaine d'habitants a été embauchée pour réaliser cette fresque, "la plus grande de tout le Mexique", selon la mairie, au cours d'un chantier qui a duré cinq mois. Initié en 2012, ce projet visait à faire baisser la délinquance et régénérer le tissu social. Financé par le gouvernement mexicain, il a coûté 5 millions de pesos (280.000 euros).

"Il a fallu convaincre les habitants d'accepter qu'on repeigne leur maison", explique à l'AFP Ana Estefania Garcia, chargée de l'urbanisme à la mairie de Pachuca. "Le quartier a d'abord été repeint en blanc, comme pour dire que nous repartions de zéro, ce qui fut un choc pour eux".

Parallèlement, les rues du quartier ont été nettoyées, les carcasses de voitures retirées, l'éclairage amélioré et huit caméras de surveillance installées. Puis la fresque murale a été élaborée et peinte avec eux sur les maisons, relançant ainsi une tradition mexicaine, aujourd'hui un peu tombée dans l'oubli, dans la lignée du grand peintre mexicain Diego Rivera (1886-1957).

Délinquance en baisse

Le projet, en embellissant le quartier, a également fait baisser le taux de délinquance et commencé à modifier les relations entre les habitants. "La délinquance a diminué de 35% depuis le lancement du projet en 2012", souligne Mme Garcia, "les jeunes de bandes rivales ont travaillé ensemble. Ils ont appris à se connaître".

Le seul habitant réfractaire au projet, qui a finalement accepté qu'on repeigne sa maison, tempère: "C'est surtout les caméras qui ont fait baisser les violences. Un délinquant reste un délinquant, peu importe la couleur des murs". Mais il reconnaît que l'ambiance dans le quartier a changé: "Les couleurs ont apporté de la gaieté et l'attitude des gens s'est améliorée".

"Un enfant m'a dit que depuis qu'on avait peint sa maison, il avait davantage envie d'aller à l'école, parce qu'il était plus heureux", raconte Roberto Robles Jaimez, 36 ans, un graffeur au pantalon moucheté de peinture. "Certains habitants nous ont offert des vêtements et de la nourriture. Les gens sont moins fermés". Dans une rue adjacente, entre des murs aux couleurs éclatantes, des enfants tapent dans un ballon.

"Avant, les parents ne les autorisaient pas à jouer dans la rue après l'école, par crainte d'affrontements entre bandes rivales, mais aujourd'hui les choses changent", souligne Ana Estefania Garcia. Depuis l'achèvement de la fresque, aucune dégradation n'a été constatée et aucun graffiti sauvage n'est apparu.

Les artistes de street-art du collectif Germen Crew réalisent maintenant sur les murs quelques dessins plus élaborés, racontant l'histoire du quartier et de ses habitants. "L'art doit être apporté à ceux qui n'y ont pas accès", explique Irving Trejo, jeune peintre de 24 ans, tandis qu'il achève le portrait en grand format d'une vieille habitante du quartier, mains ouvertes, qui ornera le mur de la maison où elle vit, façon de "rendre hommage à la sagesse des anciens".

Preuve du succès de l'opération, des habitants de la colline voisine sont venus voir les artistes au travail pour leur demander s'ils pouvaient faire la même chose dans leur quartier. Un projet d'extension serait à l'étude. Quant aux responsables de la municipalité, ils veulent désormais discuter avec les habitants pour donner une suite touristique au projet et pérenniser ainsi le succès de "l'arc-en-ciel de Pachuca".

AFP/VNA/CVN

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