Pause lecture au café de M. Thành à Hanoi

Depuis 2 ans, Hanoi a son Café littéraire. Un lieu connu seulement des initiés. Le cafetier, Nguyên Thê Thành, souhaite partager sa passion avec ses clients et leur faire découvrir sa belle collection.

Le parcours professionnel de ce Hanoien né en 1948 est mouvementé comme pour beaucoup de gens de sa génération : ouvrier, cyclo… Seule constance dans sa vie : la passion des livres qui ne s'est pas démentie depuis 40 ans. M. Thành en possède 3.600. Des ouvrages que depuis longtemps il voulait faire découvrir aux bouquineurs.

Beaucoup des clients du Café littéraire (40, rue Âu Co, arrondissement de Tây Hô) sont ses amis. Il y a aussi des jeunes, étudiants notamment. Ils dégustent un café pour 6.000-8.000 dôngs, un prix qui n'a pas bougé depuis 2 ans. D'autres cafetiers des environs ne pourraient pas en dire autant… Lui qui a connu une vie difficile a toujours considéré les livres et l'amour de la lecture comme sa plus grande richesse. Le Café littéraire n'est pas un lieu où l'on parle fort. Au contraire. Ici on cultive plutôt le silence, celui qui élève, propice à la réflexion et bien sûr à la lecture… Comme il est peu commode de lire un ouvrage entier sur place, M. Thành accepte de prêter…, sauf les plus précieux qui doivent être consultés sur place."Très peu de mes voisins viennent lire ici", déplore le cafetier, qui se sent un tantinet responsable de ne pas avoir su les convertir à sa passion. Une tâche peu commode, on en conviendra...

Le Café littéraire, c'est en quelque sorte la bibliothèque familiale exposée au vu et au su de tous. Avec comme leitmotiv : le partage. Le partage des ouvrages certes, mais des émotions en tant que lecteur aussi. Et boire une tasse de café tout en lisant, quoi de plus agréable. Évoquant la littérature vietnamienne, M. Thành déclare posséder environ 70% des œuvres de l'écrivain Tô Hoài, le recommandant volontiers à ses clients. Il a aussi des raretés telles ces vieilles éditions du Truyên Kiêu, ce Dictionnaire chinois-vietnamien de Ðào Duy Anh, une édition originale de 1932, le Dictionnaire français-vietnamien de Ðào Ðang Vy et puis, bien sûr, de grands classiques comme Guerre et paix , Notre-Dame de Paris…

"J'aime la littérature parce qu'elle englobe toutes les questions de la vie et de la société...", avoue-t-il. Ses livres sont rangés par catégories : littérature populaire, littérature nationale, littérature étrangère, littérature américaine, classiques, recherche littéraire, dictionnaires…

M. Thành ne sait pas utiliser internet, bien que Trân Thùy Vân, une journaliste, lui ait pourtant souligné l'utilité de la Toile pour suivre l'actualité littéraire dans le monde et échanger avec d'autres bibliomanes. Peu importe, M. Thành écoute les idées de ses clients, ce qui semble lui suffire. Il leur glisse une confidence ou des conseils de lecture éclairés, s'efforce de se perfectionner à leur contact. Et se considère particulièrement chanceux d'avoir un fils partageant la même passion ! "Je suis très fier car les livres m'ont aidé à dépasser ma condition de simple travailleur manuel. Deux tiers de mes connaissances, je les ai acquises en lisant". Pour lui, chaque ouvrage est une "vraie ouverture sur le monde, sur le mystère de la vie".

Mai Huong/CVN

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