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Le "père" de nombreuses espèces de libellules récemment découvertes dans le pays est le Docteur Phan Quôc Toan, directeur du Centre de recherche sur les insectes - parasitologie de l’université Duy Tân, ville de Dà Nang (Centre).
"En 2013, lorsque j’ai commencé à préparer une thèse de doctorat sur les libellules au Japon, mes professeurs m’ont tapé sur l’épaule en me disant de rentrer au Vietnam pour +chercher de l’or+", se souvient M. Toan.
"Plus tard, j’ai finalement compris ce qu’ils voulaient dire et une fois terminé mon doctorat à l’Université métropolitaine de Tokyo en 2016, j’ai continué à rechercher de nouvelles + mines d’or+", ajoute-t-il, avant de parler de ses campagnes de terrain qui ont abouti à l’annonce de la découverte de 19 nouvelles espèces de libellules au Vietnam et en Asie du Sud-Est.
Sur son lieu de travail, le Dr. Toan collectionne d’innombrables spécimens d’insectes, résultat de ses recherches. Si vous ne connaissez pas le propriétaire du bureau, situé rue Hoàng Minh Thao, arrondissement de Liên Chiêu (Dà Nang), vous pourriez penser vous trouver dans un espace d’exposition d’un musée d’histoire naturelle. Il a d’ailleurs le rêve de fonder un jour le premier musée du genre dans le Centre du Vietnam.
Une foisonnante biodiversité
Les libellules sont des bio-indicateurs utilisés pour évaluer la qualité de l’eau et des écosystèmes. Elles jouent également un rôle important dans le développement agricole, contribuant à réguler les insectes ravageurs.
Le Dr. Toan (droite) et ses collègues lors d’une recherche sur le terrain. |
Photo: GL/CVN |
Les recherches du Dr. Toan sur les libellules vietnamiennes visent à constituer une base de données sur la biodiversité au Vietnam afin d’évaluer les zones et espèces nécessitant une protection. En 2007, 235 espèces de libellules étaient connues dans le pays. Dix ans plus tard, ce chiffre est passé à près de 400. Ces deux dernières années seulement, M. Toan et ses collègues ont découvert
des dizaines d’espèces, inconnues pour le Vietnam voire pour la science, aux quatre coins du pays: des forêts aux montagnes, le long de minuscules ruisseaux ou de puissants fleuves, dans des zones protégées ou non.
En outre, M. Toan a également publié avec un certain nombre de travaux sur des espèces découvertes en Indonésie et en Malaisie. "Dans un pays à la science développée comme le Japon, rien que pour le groupe des espèces du genre Agrion, il y a une association qui regroupe une centaine de passionnés, aussi bien des entomologistes amateurs que des professionnels. Dans les pays en développement où peu de recherches de terrain sont menées, les probabilités de trouver de nouvelles espèces sont importantes", analyse-t-il.
Selon Tô Van Quang, du Bureau de la faune à l’Institut de l’écologie du Sud, ces
20 dernières années, avec l’aide d’organisations étrangères, des scientifiques vietnamiens et surtout japonais se sont penchés sur les études des libellules. Le
Dr. Phan Quôc Toan est l’un des deux seuls scientifiques vietnamiens, avec Dô Manh Cuong, menant des recherches de terrain sur les odonates (autre nom des libellules, ndlr) dans le pays.
"Avec les succès de Dô Manh Cuong, expert des grandes libellules, les découvertes d’une nouvelle espèce par le Dr. Toan, spécialisée dans les agrions, ont prouvé que le Vietnam est un des +points chauds+ de la biodiversité", commente M. Quang.
D’après lui, les récentes découvertes du Dr. Toan permettront à long terme de disposer de plus de données sur la richesse entomologique du pays et des zones méritant une protection. Il espère que les succès de M. Toan inciteront des scientifiques internationaux à venir effectuer des recherches de terrain au Vietnam. Le pays recèle en effet de nombreuses "zones blanches" où aucun odonatologue (entomologiste spécialiste des libellules) n’a mis les pieds et où tout reste à découvrir.
Les libellules, un nom en forme d’hommage
Lorsqu’une nouvelle espèce pour la science est découverte, c’est le chercheur qui l’a trouvée qui se charge de lui donner un nom scientifique (en latin). Ne pouvant lui donner son nom, le découvreur choisit souvent un personnage important, pour exprimer son respect ou sa gratitude envers lui. Dans un rapport scientifique publié récemment dans la revue internationale Zootaxa, la nouvelle espèce d’agrion trouvée par le Dr. Toan a été nommée Coeliccia leconcoi, d’après le nom du fondateur de l’Université Duy Tân, Lê Công Co, qui fut "Enseignant Emérite" et "Héros du Travail". C’est en effet à lui que le Docteur doit sa passion. En 2017, le Dr. Phan Quôc Toan avait également publié une étude sur une nouvelle espèce d’agrion appelée Coeliccia duytan, trouvée dans le Parc national de Chu Mom Rây, province de Kon Tum, sur les hauts plateaux du Centre.
Huong Linh/CVN