L'enfer des remorques de camions : des migrants témoignent

José Mario et sa famille ont traversé une partie du Mexique pendant 18 heures dans la remorque d'un camion en route vers les États-Unis, la même odyssée qui a coûté la vie à 53 migrants près de San Antonio.

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Vue aérienne d'un camion dans lequel des migrants ont été retrouvés morts, le 27 juin 2022 à San Antonio, au Texas.
Photo : AFP/VNA/CVN

Mexicaines et Centro-Américaines, les victimes du Texas ont été retrouvées lundi 27 juin asphyxiées et déshydratées à l'intérieur d'un poids-lourd après une journée de fortes chaleurs avec des température proches des 40 degrés.

Pour aller de Mexico à la frontière, José Mario, Hondurien de 48 ans, et sa famille ont enduré eux aussi des conditions extrêmes.

Avec sa femme et ses trois enfants de huit, six et deux ans, ils ont été entassés avec une centaine de personnes dans la remorque d'un frigorifique.

"C'était très froid", raconte le commerçant qui a dû fuir le 20 mai la violence dans son pays où il a été blessé au bras par des assaillants armés.

"J'ai mis deux pantalons à mes enfants, trois chemises, et une couette pour les protéger. Ils ont dormi, ils n'ont pas vu le trajet passer", raconte-t-il..

Jusqu'au dernier moment, José Mario, 48 ans, a pourtant tenté d'éviter cette option. Il savait que 56 migrants étaient morts lors d'un accident de camion dans le Chiapas, dans le sud du Mexique, début décembre.

Mais les "coyotes" -le surnom des passeurs de part et d'autre du Rio Grande/Rio Bravo-, à qui il avait versé 13.000 dollars, ne lui ont laissé aucun choix.

"La première chose qu'on leur demande c'est de ne pas monter dans le conteneur. Mais en chemin, ils font ce qu'ils veulent", témoigne à l'AFP José Mario Licona.

José Mario ajoute que le frigorifique "n'a pas été contrôlé" pendant les plus de 1.000 kilomètres du trajet.

De la même façon, le camion de la tragédie de San Antonio a passé deux contrôles aux États-Unis sans encombre, d'après les autorités mexicaines. Ses plaques avaient été changées.

Des 53 victimes de San Antonio, 14 venaient du Honduras, 27 du Mexique, sept du Guatemala, et deux du Salvador, d'après les autorités mexicaines.

L'épouse de José Mario ne veut plus entendre parler de voyage en camion : "On risque nos vies et celles de nos enfants".

Et souvent les risques sont inutiles.

"Entreprises criminelles"

Une famille de migrants passe illégalement la frontière américaine à Eagle Pass, le 30 juin 2022 au Texas.
Photo : AFP/VNA/CVN

Au Texas, la famille s'est livrée à une patrouille frontalière, avant d'être renvoyée au Mexique, à Ciudad Juarez, où ils ont témoigné auprès d'une correspondante de l'AFP. Ils espèrent aujourd'hui une "exception humanitaire" pour être acceptés sur le territoire américain.

Les gens sont entassés comme des "animaux" dans les remorques, témoignent l'ensemble des migrants interrogés par l'AFP à Ciudad Juarez.

En raison de la chaleur, des passagers s'évanouissent ou évitent de boire pour ne pas avoir à uriner. C'est la raison pour laquelle Jenny, qui a quitté le Honduras avec ses filles de huit et quatorze ans, a refusé de monter dans un "trailer" (un camion) et décidé de poursuivre sa route sans les "coyotes".

Rassurée de ne pas avoir eu recours à ces trafiquants, Jenny espère également une "exception humanitaire" avec un message au gouvernement des États-Unis : "Toute personne a le droit à une opportunité".

Depuis 2014, environ 6.430 migrants sont morts ou ont disparu sur la route vers les États-Unis, d'après les chiffres de l'Organisation internationale des migrations (OIM). Les réseaux de passeurs sont "de plus en plus complexes", explique à l'AFP Dolores Paris. "Nous parlons d'entreprises criminelles".

L'experte est surprise du peu d'intérêt porté à la question de la "corruption" des autorités présumément liées aux trafiquants.


AFP/VNA/CVN

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