Le salut des peintres vietnamiens passe par l’étranger

Entre richesse matérielle et accomplissement artistique, les peintres vietnamiens sont à la constante recherche d’un équilibre. Mais la différence de revenu est visible dans ce domaine, et pour les aider à atteindre pleinement leur succès, une nouvelle piste leur est ouverte : vendre leurs œuvres à l’étranger.

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La peinture "Soleil de Hanoï" de Pham Luân, à l'exposition «Mo Cua» en septembre 2016.
Photo : Dang Duong/CVN

Le marché de la peinture du Vietnam est devenu mobile depuis les années 1990. Rapidement, les professionnels ont constaté que les œuvres n’étaient pas qualifiées par le marché domestique, mais plutôt par les collectionneurs étrangers. Même les marchands ne font pas confiance aux acheteurs vietnamiens. «On peut dire qu’il n’y a pas de vrai marché des beaux-arts au Vietnam», avoue Nguyên Nga, gérante de la galerie Maison des arts à Hanoï. «Nos clients sont majoritairement étrangers. Les Vietnamiens sont riches, mais ils ne s’intéressent pas à la peinture : ils achètent les œuvres +feng shui+ à plusieurs milliers de dollars, mais ils ne cherchent que les peintures copiées», partage-t-elle.

Les peintures vietnamiennes ne reconnaissent pas vraiment de succès à l’étranger, où elles sont vendues pour trois à quatre fois moins que leur valeur d’estimation. Vi Kiên Thành, responsable du Département des beaux-arts, de la photographie et des galeries, dépendant du ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme, explique que «le Premier ministre a ratifié le plan de développement de l’activité des beaux-arts jusqu’en 2030, favorisant plutôt les musées publics et sans donner une solution à la régularisation du marché domestique».

Pour Pham Luân, un des plus fameux peintres au Vietnam, «j’ai des collègues qui ont vendu aisément leurs œuvres. Mais ils ne peuvent plus dès lors assurer leur créativité, et ils n’ont plus de temps pour inventer. Ils paient d’autres peintres moins qualifiés qui copient leurs styles, assurant dès lors la quantité. Le public, loin d’être dupe, reconnaît néanmoins la différence et on assiste à une chute à la fois de la qualité et des prix des œuvres».

Certains professionnels proposent de vendre en ligne, permettant d’encadrer les prix et de réduire les difficultés du déplacement, en suivant le fameux modèle des enchères internationales comme Christie’s ou Sotheby’s. Ces sites sont nombreux, mais les revenus restent modestes : le public n’apprécie pas le système de réputation et a peur des copies.

Vendre à l’étranger pour une vie au paradis

L'artiste Bùi Thanh Tâm à côté de l'une de ses œuvres.
Photo : Internet

«La très grande majorité des artistes sont pauvres. Cependant, les plus cotés vivent au paradis, littéralement», s’exclame un responsable de galerie depuis plus de 20 ans. «Ils s’éloignent du marché domestique, et ne cherchent que les collecteurs étrangers. Je n’ai pas cru mes oreilles lorsque mon ami peintre m’a dit qu’il pouvait vendre chaque mois au moins une œuvre à 40.000 dollars. Oui, 40.000 ! Pour lui, c’est mort de dessiner une peinture pour 4.000 dollars», raconte-t-il.

Bùi Thanh Tâm a choisi également cet itinéraire. En 2013, il a exposé pour la première fois dans une galerie à Hong Kong (Chine), où il a vendu une peinture pour 11.000 dollars. Par la suite, il a décidé de contacter davantage les collecteurs étrangers. Un succès considérable qui a fait grimper la valeur de son œuvre, vendue récemment à 30.000 dollars aux États-Unis après avoir tourné dans huit foires internationales.

Depuis 2013, Luu Tuyên expose à Hong Kong, en Malaisie, en Chine et à Singapour, et ses tableaux se vendent régulièrement autour de 6.500 dollars. Un cas pas si exceptionnel, car d’autres artistes comme Dang Xuân Hoa, Pham An Hai, Liêu Nguyên ou encore Huong Duong s’exportent sur des marchés étrangers. De plus, l’Europe commence à découvrir et s’intéresser aux œuvres qui sont sorties en dehors de l’École des beaux-arts de l’Indochine.

Pourtant, marchander les peintures à l’étranger n’est jamais si simple pour les artistes vietnamiens, ces derniers devant supporter eux-mêmes tous les frais de séjour, avec aucune garantie de succès à la clé.

«Préserver les traits particuliers de la culture vietnamienne est très important, mais en réalité, le commerce de l’art requiert une ouverture à l’international», commente Bùi Thanh Tâm. «Les collectionneurs étrangers n’apprécient pas les concepts "démodés" de la peinture du Vietnam. Ils adorent plutôt la différenciation, la diversification et la possibilité d’identifier d’un coup d’œil le style de chaque artiste», confie-t-il.

Dang Duong/CVN

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