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Le «piège à rochers» de Pinang Tac, dans la province de Ninh Thuân (Centre méridional). |
En 1961, les conseillers américains au Sud-Vietnam ainsi que le régime de Ngô Dình Diêm ont commencé la mise en œuvre d'un plan pour tenter de couper les paysans de l'influence du Front national de libération du Sud Vietnam (FNL). Le programme, appelé «Hameau stratégique», visait à séparer les paysans des insurgés communistes en créant des «villages fortifiés» (en fait des camps de concentration déguisés). Le programme s'est retourné contre ses auteurs et a finalement conduit à une diminution du soutien au régime de Diêm et à une augmentation de sympathie pour les partisans communistes.
Devant l’échec de leur stratégie, les forces ennemies ont lancé nombre d’opérations de ratissage dans les zones passées sous influence communiste, laissant derrière eux un spectacle de désolation : maisons brûlées, exécutions sommaires…
Bien décidé à faire front, un chef de village, Pinang Tac, a créé la «Guérilla montagnarde» de Bac Ai, un district montagneux de la province de Ninh Thuân (Centre méridional), forte de quelque 500 hommes.
«Vu les faibles moyens militaires des montagnards, mieux valait attaquer les ennemis avant qu’ils n’entrent dans le village, en jouant sur l’effet de surprise. L’idée de monter des pièges à rochers est venue à l'esprit de Pinang Tac lorsqu’il a vu sur une falaise proche du col de Gia Tuc, à la saison des pluies, de gros rochers sur le point de dégringoler», raconte Chamaléa Sau, 76 ans, du village de Gia E, un des derniers survivants de l’embuscade du col de Gia Tuc. Ce col se trouve à plus de 100 km de la ville de Phan Rang – Thap Chàm. C’est là que passe la route – à l’époque un chemin – menant à Bac Ai.
Un déluge de roches
Guidés par Pinang Tac, les habitants se mettent à l’ouvrage. De grandes planches sont arrimées à la falaise, soutenues au-dessous par des troncs d’arbre - ceux-ci jouant de «gâchette» du dispositif. Puis de gros rochers sont posés dessus. Au total, 17 pièges sont dressés contre la falaise.
Le modèle du «piège à rochers» de Pinang Tac présenté au musée de l’histoire militaire du Vietnam. |
En contrebas du chemin, les partisans creusent des «trous de loup» (fosse dissimulée par un treillis végétal où est enfoncé un pieu, ndlr) et posent des chausse-trappes (piège métallique constitué de pointes disposées de telle sorte que l'une d'elles, posée sur une base stable, est orientée vers le haut, ndlr). Les préparatifs terminés, les valeureux montagnards n’attendent plus que les agresseurs.
Enfin arrive le jour J. «L’attaque s’est produite alors que les troupes ennemies menaient une opération de ratissage», se rappelle Chamaléa Sau. Un bataillon armé jusqu’aux dents, composé de soldats américains et fantoches, et une compagnie des forces de sécurité de Saigon, apparaissent sur le chemin. Les guérilleros se placent des deux côtés du chemin.
Au point prévu, les pièges sont dégoupillés et des centaines de pierres dévalent la pente, accompagnées d’une volée de flèches. Pris de panique, beaucoup d’ennemis cherchent à s’enfuir en contrebas du chemin, mais tombent dans les «trous de loup». En quelques minutes, une centaine d’entre eux succombent, victimes de pieux, de flèches ou de rochers.
L’embuscade du col de Gia Tuc est entrée dans l’histoire nationale. Le chef Pinang Tac, trois fois titulaire de l’Ordre de Libération du Sud, s’est vu décerner le titre de «Héros des forces armées du Vietnam».
Rien qu’en 1967, la Guérilla montagnarde a lancé 61 attaques contre les opérations de ratissage ennemies, tuant plus d’un millier de soldats dont quelque 300 avec les seuls «pièges à rochers».
Nghia Dàn/CVN
La falaise où les «pièges à rochers» de Pinang Tac ont été posés a été reconnue «Vestige historique national». En 2002, la province de Ninh Thuân a investi 17 milliards de dôngs dans un projet de reconstitution du dispositif et d’aménagement du site, au service des touristes. À visiter absolument !