Le métier des "đồng nát", un métier honteux ?

"Ai nhôm đồng, sắt vụn, vỏ chai bán đê…" ("Il y a-t’il quelqu’un qui veut vendre du cuivre, des ferrailles ou des bouteilles, allez allez…"), il s’agit de la voix très familière des "đồng nát" qui résonne souvent dans tous les coins de rues de Hanoï, surtout dans les villages.

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Un entrepôt de dông nat.
Photo: Thùy Dương/CVN

Depuis toute petite j’entends ces voix comme une musique :

Ces personnes qui passent chez l’habitant pour récupérer tous les déchets comme des plastiques, des cannettes ou bien des cartons et des papiers, on les appelle généralement "đồng nát" parce que personne n’a besoin de connaître leur prénom…

La plupart d’entre elles sont des femmes travailleuses mais pauvres qui habitent dans les provinces aux alentours de Hanoï tels que Vinh Phuc, Hà Nam, Phu Tho et Bac Giang. Elles se rendent à la capitale en souhaitant gagner leur vie. Ce qui a nos yeux ne sont que des ordures ménagères inutiles, pour les "đồng nát" il s’agit de leur gagne-pain. En effet, elles peuvent les acheter et les revendre dans les "bãi", lieux d’entreposage. Pour pratiquer ce métier, une vieille bicyclette, une balance à crochet en fer rouillé, quelques sacs sont les "compagnons" indispensables des "đồng nát".

Đồng nát - "mains sales" au "bon cœur"

On peut affirmer qu’il n’y a aucun critère d’évaluation permettant de définir si un métier est noble ou pas. Mais si cela devait être le cas, cela pourrait être dans le fait d’effectuer un travail légal et non contraire à l'éthique. Cependant, le regard et la perception que l’on a des métiers relatifs aux déchets et de ceux qui s’en occupent sont souvent négatifs. Bien que les "đồng nát" fassent un bon travail contribuant au système de recyclage des déchets, elles restent en bas de l’échelle sociale. Certes, ce "sale boulot" souffre toujours d’une mauvaise image de marque. C’est la raison pour laquelle les "đồng nát" s’habillent avec un chapeau conique, une serviette couvrant le visage ne révélant que les yeux, des vêtements effilochés et n’osent pas effectuer ce travail dans leur région d’habitation pour éviter les regards méprisants de leurs connaissances. Elles ne passent pas toujours chez l’habitant, souvent, je les vois chercher des objets recyclables aux mains nues dans des poubelles ou des petits sites d'enfouissement au bord des routes.

À 35 ans, après avoir passé plus de 5 ans à travailler dans ce métier : "Je commence ma journée à partir de 7 heures et finit à 18 heures mais l’horaire peut être variable. Ce matin, je suis parvenue à acheter beaucoup de "déchets", donc à midi, je suis là pour les revendre aux personnes en charge du "bãi" qu’elles revendront par la suite aux ateliers de transformation de déchets. Il y a un prix pour tout : les ferrailles, 8.500 dôngs/ kg, les papiers, les cartons, 2.500 dôngs/kg, les bouteilles, les pots en plastique, 9.000 dôngs/kg. Si j’ai de la chance, je pourrai gagner entre 300.000 et 400.000 dôngs chaque jour", fait savoir Nguyên Thi Hoa, originaire de la province de Phu Tho.

La récupération de cartons.
Photo: Thùy Dương/CVN

Comme Hoa, avec 5 ans d’expériences dans ce travail, Pham Thi Be, 32 ans, originaire de la province de Hà Nam, doit porter un lourd fardeau financier sur ses épaules depuis que son mari est en fauteuil roulant, suite à un accident de la route. "Comme d’autres mères, je fais toujours des efforts pour travailler, pour gagner de l’argent afin que mon fils ait l’opportunité d’aller à l’école. La dernière fois, j’ai acheté une vieille bicyclette pour 100.000 dôngs. Il a maintenant un moyen pour se déplacer chaque jour", partage Be avec la joie sur son visage.

En effet, c’est le sens des responsabilités et le sacrifice de ces femmes, des mères vietnamiennes pour la famille et les enfants qui leur permettent d’être plus fortes et résistantes leur permettant de marcher ou faire plusieurs dizaines de kilomètres à vélo ou tenir face à l’indifférence et au mépris des autres pour leur "sale boulot". Et dans ce contexte, comment donner un sens à son travail ?

Pham Thi Be se confie à moi avec émotion.
Photo: Thùy Dương/CVN

Aujourd’hui, on a tendance à privilégier les travaux intellectuels comme les médecins, professeurs, ingénieurs mais on devrait se poser une question : les professions intellectuelles dites "supérieures" peuvent-elles exister sans celles manuelles dites "inférieures" ? Il nous faudrait donc changer de regard sur les travailleurs des déchets parce que ce regard négatif peut être source de blessure pour les autres. En conclusion, on ne sait pas combien de temps ce métier pourra exister mais les "đồng nát" m’ont dit qu’elles continueront quoi qu’il en soit car non seulement cela leur permet de gagner leur vie mais en plus, elles participent à une tâche noble d’utilité publique.

Thùy Dương/CVN
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