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Le Français Boris Charmatz pose sous le monorail suspendu de Wuppertal, ville de la Ruhr dans l'Ouest de l'Allemagne, le 21 mai. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Âgés de trois mois à 88 ans, ces 182 professionnels et amateurs participent au premier projet du Français Boris Charmatz, 50 ans, intendant depuis neuf mois du Tanztheater Pina Bausch, à Wuppertal, ville de la Ruhr dans l'Ouest de l'Allemagne.
"Comme premier geste je trouve cela très beau de voir se mêler d'immenses professionnels, qui dès l’âge de 5 ans ont tout sacrifié pour ce métier, à des gens qui travaillent dans des boutiques de lingerie, enseignent ou sont retraités", explique le chorégraphe, dans un entretien.
La rue de la performance n'a pas été choisie au hasard : elle apparaît dans le road movie Alice dans les villes, filmé en 1974 par le réalisateur allemand Wim Wenders, grand ami de Pina Bausch, à qui il a consacré un documentaire en 3D en 2011.
Depuis la mort de l'artiste allemande, terrassée par un cancer fulgurant en 2009 à l'âge de 68 ans, cinq directions se sont succédé au Tanztheater, créé en 1973.
Dans ce temple légendaire de la danse contemporaine, occupé par une compagnie d’une trentaine de danseurs et d’une soixantaine de salariés, "l'esprit de Pina Bausch est partout", reconnaît Boris Charmatz. Il a été nommé en septembre dernier pour huit ans.
S'il n'a jamais rencontré l'artiste allemande, qui a transcendé les frontières entre danse et théâtre, il "connaît son travail et est entouré de gens qui l'ont connu, son fils, le chauffeur de taxi, les danseurs".
"Je suis là pour apprendre", estime celui qui est considéré comme l'un des chefs de file de la "non-danse", faisant profession d'investir tous types d'espaces publics et de décloisonner les frontières entre les arts.
"Style hybride"
Et avec les danseurs de la troupe "on est en train d’inventer un style hybride entre son travail et le mien", explique-t-il. Lors du happening de dimanche, qui dure trois heures et a nécessité dix jours de répétition, Boris Charmatz a eu à cœur d'inclure toutes sortes de personnes différentes, comme un petit bébé de trois mois, Samu, trisomique.
Quelque 200 danseurs, amateurs et professionnels réunis lors d'un happening sous le monorail suspendu de Wuppertal, la ville de la célèbre chorégraphe allemande Pina Bausch, le 21 mai. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Pour nous, c'était important de participer en tant que famille", expliquent ses parents, Günter Kömmet, 52 ans et sa femme Nadine, 45 ans, qui danse en portant son fils.
Accompagnés par une musique d'orgue, les danseurs exécutent chacun leurs propres mouvements qu'ils ont eux-mêmes inventés d'après des thèmes variés comme amour, mort, bug informatique.
Pour illustrer "manifestation", l'un d'entre eux se met à crier wir sind das Volk (nous sommes le peuple, ndlr le fameux slogan scandé par les manifestants de l'ex-RDA communiste avant la chute du mur à l'automne 1989). "Ne nous regardez pas, rejoignez-nous”, lance quant à elle, la danseuse française Marie Garric venue d'Angers (ouest de la France), en faisant deux doigts d'honneur.
Jutta Geike, 65 ans, habitante de la ville voisine de Remscheid, dit retrouver dans cette performance l'esprit de Pina Bausch, pour qui elle avait dansé cinq ans durant. "Elle nous laissait faire nos mouvements, ce qui est le cas aussi ici", raconte cette ancienne interprète qui n'avait pas dansé depuis douze ans.
Après ce spectacle gratuit, Boris Charmatz va présenter pendant une semaine, jusqu'au 29 mai, différents projets à l'extérieur et l'intérieur, à Wuppertal : un solo "somnole" qu'il a conçu et interprète en sifflant, un ballet de Pina Bausch Palermo, Palermo, dont la première remonte à 1989.
Toujours dans cet esprit de casser les frontières entre les danseurs et le public, les spectateurs sont invités pendant deux journées à participer à l'échauffement et à un bout de répétition de Palermo, Palermo. Sa première création intitulée Liberté cathédrale avec la troupe sera présentée dans une église à Wuppertal en septembre.
AFP/VNA/CVN