Le criquet, un mets fin à la table des Koweïtiens

Certains le préfèrent tendre, d’autres croustillant ou encore séché. Si le criquet, insecte aux propriétés nutritives insoupçonnées, est considéré comme un mets fin au Koweït, de plus en plus de Koweïtiens, en particulier chez la jeune génération, répugnent à le consommer.

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Moudi al-Miftah cuisine des criquets chez elle à Al-Ahmadi, au Koweït.
Photo : AFP/VNA/CVN

Moudi al-Miftah, elle, en raffole. "J’aime son goût, il fait remonter des souvenirs d’enfance et me rappelle mes grands-parents et mon père", raconte cette journaliste qui tient une colonne hebdomadaire dans un quotidien local.

Chaque hiver, cette Koweïtienne de 64 ans dit faire le plein de criquets, qu’elle cuisine elle-même et préfère croustillants. Dans une marmite d’eau bouillante, elle déverse un sac de criquets, qui deviennent aussitôt rouges et emplissent la cuisine d’une odeur proche de la viande de mouton mijotée.

"Comme une crevette"

Après une demi-heure de cuisson, ils peuvent être consommés immédiatement, ou enfournés pour devenir croustillants. Elle en fait aussi sécher, pour pouvoir consommer du criquet tout au long de l’année. Mais la plupart des proches de la journaliste ont abandonné cette pratique dont l’origine est inconnue.

La consommation de criquets est en recul au Koweït, en particulier chez les jeunes qui, à l’instar d’Ali Saad, la vingtaine, font part de leur répugnance à la seule évocation de manger cet insecte. "Je n’ai jamais songé à manger du criquet, dit-il. Pourquoi mangerais-je un insecte quand nous avons toute sorte de viandes ?"

Les criquets sont considérés comme un ingrédient de base dans les cuisines de plusieurs pays. Selon les experts, manger ces insectes serait une excel-lente alternative aux sources de protéines traditionnelles.

Au Koweït, le criquet garde de nombreux adeptes chez les personnes âgées entre 60 et 70 ans.

Les premiers arrivages sur les marchés se font en janvier, les insectes étant importés d’Arabie saoudite dans des sacs rouges de 250 grammes. Ils sont proposés à côté des truffes blanches du désert - autre mets fin apprécié par les Koweïtiens, cueillies en hiver - dans le marché d’Al-Raï, niché dans une zone industrielle à la sortie nord-ouest de la ville de Koweït.

La journaliste Moudi al-Miftah montre un criquet qu’elle vient de cuisiner dans sa maison à Al-Ahmadi, au Koweït.
Photo: AFP/VNA/CVN

Abou Mohammed, 63 ans, originaire d’Ahvaz en Iran, vend habituellement des poissons au marché. Mais il se convertit en vendeur de criquets et de truffes quand la saison démarre.

"Le criquet est attrapé de nuit en hiver (lorsqu’il ne peut sauter ni voler) et est importé d’Arabie saoudite", indique-t-il. Selon lui, l’insecte est "comme une crevette et sa chair est délectable, notamment celle des femelles qui sont remplies d’œufs". La femelle criquet est très recherchée car plus volumineuse que le mâle.

Abou Mohammed dit écouler une dizaine de sacs par jour au prix unitaire variant entre 3 et 5 dinars (8 à 16 USD). "Je vends quelque 500 sacs durant la saison qui court de janvier à avril", précise-t-il.

Regain d’intérêt

Le Koweïtien Mohammed al-Awadi, 70 ans, qui se livre au commerce des criquets depuis de longues années, garde toujours en poche des insectes séchés pour en croquer dès qu’il en a envie. Appelé "le roi du marché", ce vendeur se livre à une démonstration avalant un premier criquet, après l’avoir débarrassé de ses pattes, puis un autre et un troisième.

"Le meilleur des mets. je suis rassasié et je n’ai plus besoin de déjeuner aujourd’hui, dit-il. Plus c’est sec plus c’est bon (...) mon père en avait toujours en poche".

Les autorités avaient tenté en vain il y a deux ans d’interdire la consommation de criquets, en raison de craintes qu’ils contiennent des pesticides. Lors-qu’ils se multiplient, les criquets forment des essaims qui peuvent endommager les cultures et certains pays recourent à l’épandage de pesticides pour stopper leurs ravages.

Un autre vendeur, Adel Tariji, a placé sa marchandise dans deux sacs noirs près de son véhicule. Les clients défilent en voiture, examinent les criquets et en négocient le prix.

M. Tariji, qui vend des criquets depuis qu’il a 18 ans, dit avoir constaté un regain d’intérêt pour ce met chez de jeunes acheteurs, convaincus qu’il est bon pour la santé et n’hésitant pas à en payer le prix fort. Il assure que "certains font même des réserves, de peur qu’il n’y ait pas de criquets la saison prochaine".


AFP/VNA/CVN

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