>>Légende du singe aux fesses rouges
Les "bánh chung" et "bánh dày", symboles du Ciel et de la Terre. |
Photo : CTV/CVN |
C’était il y a très longtemps, à l’aube du Vietnam. Le 6e roi Hùng - de la dynastie des fondateurs de la nation - avait 20 fils. Quand vint le moment de transmette le sceptre, le souverain était bien embarrassé. Lequel de ses enfants pourrait-il lui succéder ? Il fallait que le futur roi soit capable de régner avec justice et intelligence. Il décida donc de mettre ses fils à l’épreuve, les convoqua tous et déclara : "Mes fils, allez dans le vaste monde et regardez autour de vous ! Celui qui ramènera de son voyage la recette du meilleur plat montera sur le trône après moi".
Un céleste défi
Les princes se mirent donc en route, accompagnés d’une escorte correspondant à leur âge et à leur position. Seul le 18e prince, Lang Liêu, dont la mère était morte juste après sa naissance, ne possédait ni conseiller, ni serviteur. Quand il vit ses frères, plus favorisés que lui, partir à cheval vers les quatre coins de l’horizon, il soupira : "Ah, comme j’aimerais pouvoir répondre au vœu de mon père ! Mais je n’ai même pas de monture. Qu’est-ce que je vais faire ?"
Une légende si bonne à déguster ! |
Cette même nuit, un bon génie lui apparut en rêve, lui disant : "Je connais ta solitude, ainsi que le souci qui pèse sur ton jeune cœur. Et puisque tu ne convoites pas la couronne, mais désires simplement exaucer le souhait de ton père, je vais t’aider. Pourquoi aller si loin alors qu’il n’est rien de plus précieux que le riz qui nourrit notre pays depuis des temps immémoriaux ? Prends du riz gluant, lave-le dans l’eau claire et fais-le cuire à la vapeur.
Quand ce sera fait, formes-en deux gâteaux. Le premier sera rond, il évoquera la voûte céleste et rendra grâce au Ciel les bienfaits qu’il a accordés aux hommes. Le second, carré, représentera la terre qui nourrit tous les êtres vivants. Fourre-les tous les deux d’une garniture à base d’haricots verts et de viande de porc hachée, gras et maigre mélangés. N’oublie pas d’y ajouter du saindoux et de l’oignon ! Enroule le tout dans des feuilles vertes de bananier que tu maintiendras à l’aide de jeunes bambous, et fais cuire à l’étuvée un jour et une nuit".
Lang Liêu s’éveilla. Il réfléchit longtemps à ce rêve étrange. Il alla trouver sa vieille nourrice et lui tout raconta. "C’était la voix du Ciel, et tu dois lui obéir", dit la vieille. Encouragé par ses paroles, il se mit à l’ouvrage. C’était à ce moment-là, précisément, que le délai accordé par le roi expirait. De tous les coins de la terre, les autres princes revinrent. Leurs serviteurs portaient sur des plateaux d’argent nombre de mets inconnus, de spécialités étrangères, de fruits exotiques… Le palais tout entier était rempli d’odeurs suaves.
Les "bánh dày" symbolisant le Ciel. |
Lang Liêu resta en arrière avec ses gâteaux, personne ne faisant attention à lui. L’un après l’autre, les princes lurent leurs recettes. Ce n’étaient que de noms étranges. Puis, le roi et ses conseillers goûtèrent l’un après l’autre tous les plats présentés. Plus il goûtait, plus son front se plissait car la décision devenait de plus en plus difficile.
Un royal succès
Enfin, bon dernier, le prince Lang Liêu offrit ses gâteaux à son père. Le roi en prit une bouchée, une saveur exquise flattait son palais, tandis que ses yeux contemplaient avec plaisir la forme des deux gâteaux, symboles du Ciel et de la Terre.
"Mes chers fils ! déclara le souverain d’une voix ferme malgré son émotion. Je ne peux blâmer aucun d’entre vous : tous, vous m’avez rapporté des mets délicieux. Mais, dites-moi, comment préparerez-vous ces plats quand vous aurez épuisé les légumes, les épices, les fruits, les poissons rares que l’on ne trouve pas chez nous ? Les gâteaux de Lang Liêu sont non seulement exquis, mais ils sont faits de riz, d’haricots verts, de viande de porc, des ingrédients qui ne manquent pas dans notre pays. En outre, loin de songer uniquement au ventre, il a donné à ses gâteaux une forme qui nous rappellera toujours la gratitude que nous devons au Ciel et à la Terre".
Les "bánh chung" symbolisant la Terre. |
Ce discours terminé, Lang Liêu s’inclina profondément et dit : "Je suis plus heureux que je ne saurais le dire de l’immense honneur que vous me faites, père, mais je n’ai pas le droit d’accepter une telle faveur". Et il raconta au roi tout son rêve : "Je vois dans ce rêve la preuve de la volonté du Ciel, et je sais à présent qu’il t’assistera dans la tâche".
Mais avant de nommer Lang Liêu à sa place, le roi ordonna de faire connaître la recette de ses gâteaux dans tout le pays. Le gâteau rond prit le nom de bánh dày, le gâteau carré celui de bánh chung. Depuis ce temps-là, dans tout le Vietnam, on les mange à l’occasion des grandes fêtes traditionnelles, surtout le Têt traditionnel ou le Nouvel An lunaire.
Ông Ngoai/CVN