>>Éducation des enfants grâce à la méthode éducative STEAM
>>Succès du projet d’éducation des enfants atteints de surdité
Le rôle des parents évolue avec l’âge de l’enfant. |
Photo : CTV/CVN |
Au cours d’un dîner chez un ami commun, Francisco Roque, fonctionnaire philippin de l’UNFPA, m’a parlé des relations entre les parents et les enfants. Il a évoqué à ce sujet l’image employée par un certain poète libanais que je trouve magnifique : le père est un arc qui prépare et déclenche le vol de la flèche, son enfant. Une fois la flèche partie, elle ne dépend plus de l’arc.
Cette métaphore me fait penser par contre-coup aux relations entre les parents et les enfants en Asie.
L’éthique confucéenne
Dans l’ancien Vietnam qui avait adopté l’éthique confucéenne, les relations "père-fils" (seul l’homme peut perpétuer le culte familial) faisaient partie des trois principaux liens sociaux (tam cuong, avec les deux autres relations roi-sujet et mari-femme). La piété filiale (hiêu) était l’une des cinq grandes vertus cardinales (ngu thuong).
Toutefois, en passant au Vietnam, la "piété filiale" de conception chinoise avait perdu beaucoup de son mysticisme.
Les enfants exemplaires de l’Antiquité chinoise se martyrisaient littéralement pour manifester leurs sentiments à l’égard des parents vénérés à l’égal des saints du catholicisme. À nos yeux, leurs agissements frisent la folie. Des enfants de 4 ans, qui refusaient de manger quand leur père ou leur mère était malade, un homme qui faisait maigre pendant 10 ans après la mort de son père, un adolescent acceptant d’être frappé continuellement et sans raison par sa marâtre et son père, une fille de treize ans qui se suicida dans un fleuve après avoir pleuré pendant sept jours son père mort noyé…, des histoires édifiantes de ce genre fourmillent dans la littérature classique.
Aujourd’hui, les pères s’impliquent davantage dans l’éducation de leurs enfants. |
Photo : CTV/CVN |
Donald Holzman, sinologue français, a suggéré une explication de ces comportements d’un fanatisme quasi-religieux : légitimée par une organisation sociale communautaire et patriarcale, ma sanctification des parents, surtout du père, traduit un besoin de transcendance du peuple chinois dont la Weltanschauung est plus terre à terre et moins portée à la métaphysique que certains peuples d’Occident.
La piété filiale
L’éducation traditionnelle vietnamienne cultive aussi la piété filiale. Même au temps de la colonisation française, les premiers textes de l’abécédaire traitaient des devoirs envers les parents. La parole du père faisait loi dans la famille. L’enfant était, à n’importe quel âge, un objet des parents. Cette conception "possessive" des parents s’est fortement estompée depuis la Révolution de 1945 et surtout pendant les 30 ans de guerre de résistance où l’instruction civique exaltait de patriotisme et mettait en veilleuse les devoirs familiaux. Depuis le retour de la paix, l’individualisme longtemps réprimé trouve un terrain de développement favorable avec l’implantation dans les cités du mode de vie de la société de consommation. Certains enfants en arrivent à négliger complètement leurs vieux parents.
Nous sommes en train de revenir aux valeurs morales anciennes dans une optique sélective. Nous ne voudrions pas restaurer - ce serait d’ailleurs impossible - l’autorité absolue des parents. Le père et la mère se doivent d’être un arc, l’enfant se doit d’être une flèche qui s’oriente, reconnaissante envers l’arc qui l’a impulsée. L’idéal pour l’enfant serait d’amalgamer le grand respect oriental dû aux parents avec l’esprit démocratique occidental pour créer une affectueuse amitié faite de compréhension et d’estime mutuelles.
(Novembre 1992)