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Des gerbes de fleurs en hommage aux victimes du carnage dans deux mosqués de Christchurch, le 16 mars 2019 en Nouvelle-Zélande. |
Une liste de ces victimes publiée dimanche 17 mars montrait qu'elles avaient de trois à 77 ans.
L'auteur de la tuerie est un extrémiste australien, Brenton Tarrant, qui à l'occasion de sa comparution samedi a fait avec la main le signe de reconnaissance des suprémacistes blancs devant le tribunal néo-zélandais qui l'inculpait pour meurtres.
L'ex-instructeur de fitness de 28 ans, "fasciste" autoproclamé, est globalement resté impassible lorsque son inculpation lui a été notifiée, lors d'une brève audience à laquelle seule la presse était admise pour raisons de sécurité.
Debout dans la tenue blanche des prisonniers, menotté et flanqué de deux policiers, il a cependant fait de la main droite le signe "OK" en joignant le pouce et l'index, un symbole utilisé à travers le monde par les adeptes du suprémacisme blanc.
Il restera en détention jusqu'à une prochaine audience fixée au 5 avril.
Un autre homme, arrêté vendredi 15 mars, sera présenté devant la justice lundi 18 mars pour des accusations "en lien" avec les attaques, même s'il n'a apparemment pas été directement impliqué dans la tuerie, selon le commissaire Mike Bush.
"Monstrueux"
Brenton Tarrant, un extrémiste de droite qui a fait un carnage dans deux mosquées de Christchurch, comparaît au tribunal, le 16 mars en Nouvelle-Zélande. |
Cette tragédie a provoqué une onde de choc en Nouvelle-Zélande, un pays de cinq millions d'habitants dont 1% se disent musulmans, connu pour sa douceur de vivre, sa tradition d'accueil et sa faible criminalité.
Près du tribunal, le fils de Daoud Nabi, un Afghan de 71 ans tué, demande justice: "C'est monstrueux. Cela dépasse l'imagination".
Le bilan de l'attaque est passé de 49 à 50 morts après la découverte d'un corps supplémentaire quand les cadavres ont été extraits des mosquées al-Nour et Linwood, a annoncé la police.
Coiffée d'un foulard noir, la Première ministre Jacinda Ardern est allée samedi 16 mars à la rencontre des rescapés et des familles dans une université où a été installé un centre d'information.
"Nous aimons toujours ce pays", a lancé de son côté Ibrahim Abdul Halim, imam de la mosquée de Linwood. Les extrémistes ne parviendront "jamais à entamer notre confiance".
Bien que nombre de commerces soient restés fermés samedi et que beaucoup d'habitants aient choisi de rester chez eux, des bouquets s'empilaient près d'un mémorial improvisé proche de la mosquée al-Nour. "Je suis désolé que vous ne soyez pas en sécurité ici. Nos cœurs sont brisés par vos pertes", pouvait-on lire sur un mot déposé près des fleurs.
Le site internet d'information Stuff.co.nz publiait les propos d'Abdul Aziz, originaire d'Afghanistan, qualifié de "héros" pour avoir risqué sa vie afin faire fuir le meurtrier. Agé de 48 ans, ce musulman raconte être sorti de la mosquée située à Linwood laissant ses deux garçons de 5 et 11 ans à l'intérieur, après avoir entendu des tirs.
À ce moment-là, il poursuit le tireur qui se dirigeait vers sa voiture pour s'emparer d'une nouvelle arme. Lorsque l'assaillant recommence à tirer Aziz s'approche de lui en se faufilant derrière des voitures garées. Il observe une arme abandonnée faute de munitions.
L'Australien se précipite vers sa voiture une deuxième fois pour changer d'arme. Abdul Aziz raconte qu'il prend l'arme abandonnée et, comme il n'y a plus de cartouche, la lance comme une flèche pour briser une vitre du véhicule. "C'est la raison pour laquelle il a pris peur", dit Abul Aziz, évoquant comment l'assaillant quitte alors les lieux.
Élan de solidarité Dans tout le pays, un élan de solidarité interconfessionnelle a été observé, avec des millions de dollars de dons, des achats de nourriture halal pour les victimes. Des Néo-Zélandais se proposent même d'accompagner les musulmans qui auraient peur de sortir. Des fidèles de l'Église anglicane de Christchurch priaient dimanche dans ce qui est surnommé leur "cathédrale en carton", bâtie après le séisme de 2011. "Mes enfants ont peur mais il faut faire front, en tant que communauté", confie Azan Ali, 43 ans, d'origine fidjienne, qui était dans la mosquée de Linwood avec son père au moment de l'attaque. Trente-six blessés sont toujours hospitalisés, selon la police. Les victimes venaient des quatre coins du monde musulman, a souligné Jacinda Ardern. Quatre Egyptiens, un Saoudien, un Indonésien, quatre Jordaniens et six Pakistanais figurent parmi les victimes. Mme Ardern a précisé que le tireur avait amassé un arsenal et obtenu en novembre 2017 un permis de port d'armes. Elle a promis des réformes: "Je peux vous garantir que nos lois sur les armes vont changer". Manifeste
Des gerbes de fleurs en hommage aux victimes du carnage dans deux mosqués de Christchurch, le 16 mars en Nouvelle-Zélande. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
Au moins deux armes semi-automatiques, vraisemblablement des AR-15, et deux fusils ont été utilisés par le tireur. Certaines armes avaient été modifiées pour être plus efficaces. Avant de passer à l'action, l'homme, qui se présente comme un blanc de la classe ouvrière aux bas revenus, a publié sur Twitter un "manifeste" raciste de 74 pages, intitulé "Le grand remplacement", en référence à une théorie complotiste populaire dans les milieux d'extrême droite selon laquelle les "peuples européens" seraient "remplacés" par des populations non-européennes immigrées. Le manifeste détaille deux années de radicalisation et de préparatifs. L'auteur affirme que les facteurs déterminants dans sa radicalisation ont été la défaite à la présidentielle française de 2017 de la dirigeante d'extrême droite Marine Le Pen et la mort de la petite Ebba Åkerlund à 11 ans dans l'attaque au camion-bélier de 2017 à Stockholm. Il dit avoir choisi pour cible la Nouvelle-Zélande pour montrer "qu'aucun endroit au monde n'est épargné, les envahisseurs sont partout sur nos terres, aucune place même la plus reculée n'est sûre". Il y rend aussi hommage au président américain Donald Trump. Brenton Tarrant a diffusé en direct sur les réseaux sociaux les images du carnage, où on le voit passer de victime en victime, tirant sur les blessés à bout portant alors qu'ils tentent de fuir. Le commissaire Mike Bush a salué "la grande bravoure" des policiers et citoyens ordinaires "qui se sont mis en danger" pour arrêter le tireur, appréhendé 36 minutes après les premiers appels à la police. Deux autres suspects, un homme et une femme,arrêtés avec des armes à feu dans leur voiture au moment des attaques, avaient été placés en garde à vue, mais la police a annoncé qu'ils n'étaient pas directement impliqués dans le carnage. La femme a été relâchée mais l'homme reste en état d'arrestation pour détention d'armes à feu, a précisé M. Bush.
AFP/VNA/CVN