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Lors d'un cours de la "Classe de la joie" | .
Lors d'un cours de la "Classe de la joie" . |
"Quand mon cancer du gros intestin au stade 4 a été diagnostiqué, je me suis effondré. La terre s’est écroulée sous mes pieds. C’était en août 2016", confie Nguyên Công Nôi, 29 ans, créateur de la "Classe de la joie" il y a trois ans en faveur des enfants de la commune de Cu K’Po, dans la province de Dak Lak.
Ce natif du Tây Nguyên (hauts plateaux du Centre), pays au sol basaltique peuplé de nombreuses ethnies minoritaires, s’est montré studieux dès son enfance. "Seules les études pouvaient me permettre de m’extraire de ma condition sociale", précise-t-il. Il s’est plongé avec passion dans les études et a passé avec succès les examens d’entrée à l’Université bancaire de Hô Chi Minh-Ville.
Une fois diplômé, Nguyên Công Nôi a travaillé pour une compagnie d’affaires, avant d’établir la sienne, aussi à Hô Chi Minh-Ville. "Les affaires marchaient bien. J’étais content. Jusqu’au jour où ce coup de massue m’est tombé dessus. J’ai eu l’impression que ma vie était terminée", confie l’homme d’affaires.
La joie avant tout
Après de longues chimiothérapies qui n’ont pas réussi à tuer son mal, Nguyên Công Nôi a décidé de vendre sa compagnie, avant de rentrer chez lui pour passer ses derniers jours sur sa terre natale bien aimée, selon ses termes.
"Ma terre natale m’a redonné de la force et de l’énergie. Plus de tourments, ni de désespoir, juste l’envie ardente de vivre utilement, de faire quelque chose de bien, dans la mesure de mes possibilités, pour mes compatriotes et les enfants surtout", confie-t-il. Son idée d’ouvrir une classe d’anglais s’est rapidement concrétisée.
Le projet de Công Nôi a commencé chez lui, par l’achat de quelques pupitres. La "Classe de la joie" était ainsi créée, devenant peu à peu une adresse très appréciée des écoliers désireux d’apprendre l’anglais, gratuitement bien sûr. Les enfants y apprennent aussi à confectionner des gâteaux, à cultiver des légumes..., pratiquent des activités sportives comme le football, des jeux populaires...
"L’effectif de la classe augmente de plus en plus, atteignant parfois 80 écoliers. J’ai dû recruter quatre enseignants pour assurer les cours. Tant mieux, je suis heureux", avoue Công Nôi.
Pour lui, "l’important, ce n’est pas que les écoliers apprennent plein de mots chaque jour, mais plutôt qu’ils ressentent de la joie en classe et aiment l’anglais". Guidé par cette idée, le maître cherche souvent à animer ses cours soit par des histoires drôles, soit par des jeux de mots.
"J’aime bien les cours de Công Nôi. Il nous apprend bien des choses utiles. Grâce à lui, nous avons pris désormais l’habitude de discuter en anglais. Il nous conseille aussi d’aider nos parents à la maison et de veiller à notre hygiène …", partage Tuân Anh, 15 ans.
"La confection de fleurs en papier m’intéresse beaucoup, confie Mai Lan, 12 ans. Comme mes autres camarades de classe, je suis encouragée à exprimer franchement mes idées, à partager avec les autres ma joie et mon affection. Car la classe de la joie la doit être remplie de rires, comme l’a dit notre maître".
Une école Arc-en-ciel en projet
Nguyên Công Nôi et ses élèves. |
Photo : CTV/CVN |
Les commentaires élogieux des élèves sont complétés par ceux de Hô Thi Quynh, enseignante du lycée de Buôn Hô où Công Nôi a étudié. "Công Nôi était parmi les meilleurs élèves. Un garçon intelligent, vif, dynamique, sociable et plein de finesse…", se souvient-elle. Elle ne cache pas son émotion : "Fin 2016, à la nouvelle de son cancer, j’ai été très triste. Mais le voir reprendre de l’énergie et faire des choses utiles me réjouit au plus haut point.C’est un homme courageux que j’admire".
Le rêve de Công Nôi ne s’arrête pas là : "J’ai l’ambition d’édifier une école où les enfants pourront enrichir leurs connaissances générales, mais aussi perfectionner d’autres compétences de savoir-vivre. Ma future école que je souhaite bâtir au milieu d’un champ de tournesols, portera le nom d’ +Arc-en-ciel+". Chaque enfant a un caractère distinct et digne de respect. Le tout formera un arc-en-ciel splendide", explique le maitre dévoué.
Công Nôi a vendu son verger d’avocatiers pour louer le terrain, malgré le soutien de l’administration locale et de nombreux entrepreneurs et hommes de cœur qui ont apporté leurs contributions. Malheureusement, le projet, en cours de construction, a dû être subitement arrêté. En cause : le terrain se situe dans un périmètre interdit.
"Le projet est à l’arrêt. Je le regrette. Quoi qu’il en soit, je veux exprimer mes remerciements à tous ceux qui m’ont soutenu spirituellement et matériellement. Je me promets de faire tout en mon pouvoir, y compris emprunter auprès de mes proches et d’amis pour rembourser les bailleurs de fonds. Dans l’avenir, une fois que nous aurons trouvé un terrain, j’espère que tout le monde apportera sa part à la construction de l’école", conclut le maître optimiste. D’ici là, la "Classe de la joie" continuera de s’épanouir sur le sol basaltique du Tây Nguyên.
Nghia Dàn/CVN