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Christine Lagarde, présidente de la BCE, à Bruxelles le 17 février. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Chacun espère que la banque centrale ramènera le calme", alors que la panique des marchés a atteint des niveaux rappelant la crise financière de 2008-2009, souligne Bruno Cavalier, économiste chez Oddo Seydler.
En perturbant la vie quotidienne et l'économie avant de se muer "en choc financier majeur", aux conséquences imprévisibles, cette épidémie constitue "le premier vrai test pour Christine Lagarde", aux manettes de la BCE depuis novembre, observe M. Cavalier.
D'autant que la Réserve fédérale américaine a baissé ses taux de 0,5 point dès le 3 mars, sans attendre sa réunion mi-mars ni une quelconque action coordonnée. Et qu'elle a été imitée mercredi 11 mars par la Banque d'Angleterre.
Si les banquiers centraux avaient répondu de concert à la crise des "subprime", à l'été 2008, cette fois chacun a agi "dans son coin" et mis les autres "sous pression, voire en difficulté", estime Eric Dor, directeur de recherche à l'Institut d'économie scientifique et de gestion (IESEG).
Prêts aux PME
Ainsi, la Fed n'a guère apaisé les marchés et a de surcroît renchéri l'euro face au dollar américain. Cela complique la tâche de la BCE : un euro fort nuit à la compétitivité de la zone euro et réduit les pressions inflationnistes. Or l'institut est depuis 2013 en-dessous de son objectif, soit une inflation tendant vers 2%.
Personne ne doute donc que la BCE délivre jeudi 12 mars son ordonnance anti-coronavirus, malgré des marges de manœuvre réduites puisque son principal taux, permettant aux banques de se refinancer, est déjà à zéro depuis 2016.
Le siège de la Banque centrale européenne, à Francfort. |
Le siège de la Banque centrale européenne, à Francfort. |
Dans un communiqué laconique la semaine dernière, l'institution a promis des mesures "appropriées", et surtout "ciblées", face à l'épidémie.
Jeudi 12 mars, elle pourrait donc innover avec un programme de prêts bancaires ciblant les PME en difficulté, pour aider les entreprises perturbées par l'épidémie à boucler leurs fins de mois, indique une source proche de la BCE.
Côté taux, l'institut pourrait descendre à -0,60%, contre -0,50% jusque-là, celui appliqué aux liquidités que les banques laissent à la banque centrale au lieu de les prêter aux ménages et aux entreprises.
Destinée à stimuler l'offre de crédits, cette politique de taux bas vaut déjà à la BCE de vives critiques, en particulier en Allemagne, où on l'accuse de spolier les épargnants.
Autre piste : augmenter le rythme des rachats de dette sur le marché, réactivés depuis novembre 2019 à raison de 20 milliards d'euros par mois, "aussi longtemps que nécessaire".
Aux États d'agir
Mais pour que la politique monétaire ne soit pas seule à la manœuvre, Mme Lagarde a interpellé mardi 10 mars les chefs de gouvernement européens en faisant "référence à (la crise financière de) 2008" lors d'une conférence téléphonique, a indiqué une source européenne.
Elle souhaitait mettre les décideurs devant leurs responsabilités, quand bien même les effets du virus sur l'économie restent "très difficiles à prévoir", a ajouté Mme Lagarde, selon la même source.
L'Allemagne, déjà critiquée par la BCE pour sa réticence à recourir à la dépense publique, a cette fois promis de faire "ce qui est nécessaire", a indiqué mercredi 11 mars la chancelière, Angela Merkel, quitte à revenir sur son dogme du zéro déficit.
Pays européen le plus touché par l'épidémie du COVID-19, alors même qu'elle est déjà fragilisée par son énorme dette publique, l'Italie a débloqué mercredi 11 mars une enveloppe d'aides de 25 milliards d'euros.
Enfin, l'UE a fait miroiter mardi 10 mars un "fonds d'investissement en réponse" à l'épidémie allant jusqu'à 25 milliards d'euros. Le lendemain, elle précisait cependant qu'il s'agirait d'enveloppes déjà existantes.
Quant aux mesures attendues jeudi 12 mars de la BCE, elles peuvent au moins "contribuer à stopper la déroute des marchés", souligne Florian Hense, économiste chez Berenberg. Un enjeu crucial pour maintenir un bon niveau de "liquidité" et éviter d'asphyxier un peu plus les entreprises.
AFP/VNA/CVN