La fabrication des turbans dans le village de Giap Nhât. |
Comme dans beaucoup d’autres pays asiatiques, les Vietnamiens, hommes et femmes, ont leur propre turban, appelé khan xêp, qui accompagne l’ao dài, la fameuse tunique traditionnelle connue bien au-delà des frontières nationales. Certes, l’ao dài peut se porter sans turban. Mais, ce dernier est obligatoire dans un certain nombre de circonstances, par exemple lors des cérémonies cultuelles des fêtes de village, lors des fiançailles, des mariages ou lors des cérémonies de la longévité (où l’on souhaite longue vie aux anciens).
Et attention, pas d’impair ! S’il est un pays où l’on ne badine pas avec la tradition, c’est bien le Vietnam. Dans le Nord, seuls les artisans du village de Giap Nhât, district de Nam Truc, province de Nam Dinh, perpétue la fabrication de ce couvre-chef traditionnel. Giap Nhât recense 140 familles vivant de cet artisanat. Quand le métier est-il né ici ? à cette question, même les plus âgés des villageois peinent à répondre. «On ne sait pas trop, avoue M. Tùng, artisan nonagénaire. Mais une chose est sûre, il se transmet de génération en génération».
Bùi Thi Kên, une artisane septuagénaire, raconte qu’à l’origine, tous les turbans étaient de couleur noire. Au fil du temps, pour s’adapter à l’évolution de la société, d’autres couleurs sont apparues. Mais la forme et la méthode de fabrication sont, eux, restés inchangées. Les turbans qui se portent au Nord ont préservé leur forme originelle alors que ceux du Sud ou du Centre ont connu de petites variations. Les turbans se divisent en trois catégories : pour l’homme, pour la femme et mixtes. «À chaque catégorie son usage spécifique», explique Mme Kên.
Petit florilège de turbans. De gauche à droite et de haut en bas : pour la cérémonie de longévité, pour le rite hâu dông, pour les mariés et pour les enfants. |
Photo : TT/CVN |
Une fabrication en grande partie manuelle
De prime abord, le turban apparaît comme un accessoire vestimentaire assez simple qui ne doit pas nécessiter trop de travail. Mais les apparences sont trompeuses. En fait, minutie et savoir-faire bien rodé sont nécessaire à toutes les étapes de la fabrication, qui sont au nombre de sept. «Auparavant, toutes se faisaient à la main. Maintenant, quelques-unes sont assurées par des machines. Mais les plus importantes sont toujours réalisées à la main : coudre l’étoffe, l’enrouler sur le moule, peindre les motifs... Un gage de qualité», détaille Nguyên Van Viên, 60 ans, qui gère un grand atelier.
D’abord, la pièce d’étoffe, de 5 à 8 cm de large et longue de 2 ou 3 m, est enroulée sur des moules en bois de gabarits variables. Puis, elle est fixée avec de la colle et arrangée par l’artisan pour avoir la forme désirée. La peinture des motifs est la dernière étape. La complexité d’un turban décidera de son prix, de 15.000 à 30.000 dôngs. Généralement, les pièces pour les rites hâu dông (une performance rituelle composée de musique accompagnée de chants et de danses pour communiquer avec les divinités par l'intermédiaire d’un chaman), les mariages ou les cultes du génie sont plus chères que celles utilisées lors des fêtes traditionnelles ou des cérémonies de longévité.
Sachez enfin que lors des cérémonies de longévité ou de culte des génies, il faut respecter des règles strictes concernant la couleur du turban. à partir de 50 ans, le khan xêp frappé de l’idéogramme Tho (Longévité) calligraphié ou en han (écriture démotique chinoise), est de règle. Quant à la couleur, c’est une question d’âge : noire de 50 à 69 ans, rouge de 70 à 89 ans, et jaune au-delà. Excepté lors de ces événements, presque toutes les couleurs sont acceptées pour les moins de 50 ans.