Yên Bái
En sirotant du café à Mù Cang Chai

La province de Yên Bái abrite un grand nombre de minorités ethniques avec une diversité culturelle et gastronomique authentique et riche en couleurs. Siroter son café en découvrant le trésor culturel abondant de ces ethnies, un pur bonheur pour tous.

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La beauté des rizières en terrasses de Mù Cang Chai, province de Yên Bái, au Nord.
Photo : Anh Tuân/CVN

Dès mon jeune âge, des noms géographiques aux consonances mystérieuses tels que Hoàng Su Phì, Mèo Vac, Mù Cang Chai m’ont toujours incité à aller à la découverte des lieux qu’ils désignent. J’ai eu l’occasion de voir Hoàng Su Phì et Mèo Vac.

C’est seulement au printemps 2009 qu’il m’a été donné de faire connaissance avec Mù Cang Chai, aussi dans la haute région du Nord comme Hoàng Su Phì et Mèo Vac.

Contrairement à notre attente, le chef-lieu de district de la province de Yên Bái, à plus de 150 km au nord de Hanoï, ne présente rien de forestier, de primitif. Il étale sur une colline des boutiques, des habitations et des bâtiments publics flambant neufs. Ce n’est que la façade, parce que Mù Cang Chai avec 90% de la population appartenant à l’ethnie H’mông est une région de montagne très pauvre.

Province multiethnique et pluriculturelle

En attendant le guide local qui nous conduira au ban (village) le plus proche, 3 km, je sirote du café dans une gargote avec le folkloriste Hà Lâm Ky, directeur de l’École secondaire de la culture, des sports et du tourisme de la province. J’en profite pour lui poser des questions sur les cultures ethniques de Yên Bái.

La province de Yên Bái, au Nord, compte cinq groupes de H'mông.
Photo : CTV/CVN

Yên Bái est l’habitat d’une trentaine de groupes ethniques. J’ai appris que la couleur locale n’y manque pas : chant quan làng pour accueillir la mariée chez les Tày de Yên Bình, danse xoè, chez les Thái Noirs de Muong Lò, fête du pilage de riz jeune (côm) ou quen luong chez les Tày de Van Chân, que sais-je.

En ce qui concerne les recherches sur les H’mông, le numéro un du palmarès doit revenir à Minh Khuong qui, renonçant à sa carrière politique, a consacré toute sa vie à l’étude des H’mông de Yên Bái. Dommage que la mort ait interrompu son œuvre très élaborée.

Huu Ngoc : Je ne manquerai pas de lire ses ouvrages. Pourriez-vous me parler un peu des H’mông et de leurs coutumes ? Je voudrais en particulier savoir quelque chose sur les H’mông, ce peuple fier et courageux qui s’isole en vivant au-dessus de 1.500 m d’altitude.

Hà Lâm Ky : Nous avons dans le Yên Bái cinq groupes de H’mông : les H’mông Hoa (H’mông bigarrés) de Mù Cang Chai dont la langue peut être considérée comme critère linguistique de l’ethnie, les H’mông Đo (Rouges), les H’mông Trang (Blancs), les H’mông Đen (Noirs) et les H’mông Xanh (Verts). De là une grande variété de coutumes. La cellule sociale est le giao (village), construit sur les hauts sommets, près des champs de maïs et de riz aménagés sur les pentes, parfois en terrasses. Chaque giao comprend quelques foyers, peut atteindre au maximum quelques dizaines.

Huu Ngoc : J’ai entendu dire que les femmes H’mông accouchent en position assise. Est-ce vrai ?

Hà Lâm Ky : C’est vrai. Les H’mông expliquent cette pratique en disant que l’expulsion chez la femme de matières internes, urine, excréments se fait dans la position assise.

Huu Ngoc : À propos du mariage, est-ce que la coutume de l’enlèvement de la fiancée avant le mariage persiste ?

Hà Lâm Ky : Oui, mais pas dans le sens du kidnapping moderne, enlèvement pour obtenir une rançon. C’est devenu un rite pré-matrimonial, un pseudo-enlèvement arrangé à l’amiable par les deux parties par un intermédiaire. L’opération consiste en ce que l’homme tire la main ou prend la main de sa future conjointe pour l’emmener chez lui. Il n’est pas question de violences, de contrainte, de mariage forcé.

Voici quelques cas typiques d’enlèvement pré-matrimonial.

Le garçon et la fille s’aiment. Mais lui et sa famille sont trop pauvres. De connivence avec son aimée, le garçon organise un enlèvement. La famille de la fille est obligée de ne demander que des arrhes matrimoniales modestes.

Dans le cas où la famille de la fille refuse un prétendant choisi par celle-ci, on fait l’enlèvement. Le garçon charge un intermédiaire d’aller demander pardon pour cet acte et de proposer le mariage. Après deux ou trois refus, on a recours au fait accompli, le mariage est consommé.

Il arrive que la famille de la fille, faute de main-d’œuvre domestique, retarde la date du mariage. Le garçon manœuvre pour enlever son aimée, avec son consentement, pendant qu’elle ramasse du bois dans la forêt ou récolte du maïs.

L’intermédiaire, pour être objectif, ne doit pas faire partie de l’une des deux familles. Pendant l’enlèvement, l’homme doit porter la femme sur son dos, dos à dos, jamais le sein contre le dos masculin. Elevée, la fille reste quelques jours dans la famille du garçon, il lui est interdit d’avoir des relations sexuelles avec lui. L’échéance terminée, elle peut rentrer chez elle si les conditions ne lui plaisent pas, le mariage est alors rompu. Si elle ne rentre pas, c’est que les fantômes de la famille du garçon l’ont acceptée, on peut célébrer le mariage.

Huu Ngoc : Ainsi l’enlèvement pré-matrimonial est-il une pratique de société "civilisée". Elle évite le mariage forcé qui n’a pas cessé chez les Kinh ou Viêt, ethnie majoritaire du Vietnam. Et qu’en est-il de la coutume selon laquelle à la mort de son mari, la femme épouse le petit-frère encore célibataire du défunt ?

Hà Lâm Ky : Il n’y a pas de contrainte. On fait un travail de persuasion auprès du petit-frère. Dans le même temps, on met quelques vêtements du défunt dans la chambre de la veuve. Si elle les rejette, le remariage n’aura pas lieu. Il se peut aussi que l’homme épouse la femme de son petit-frère décédé, mais toujours sans contrainte des deux côtés.

La femme H’mông aime passionnément, sa fidélité est exemplaire, d’après ce que j’ai entendu dire. C’est ce que révèlent les chansons populaires et les contes H’mông. Dans le conte "Nù Play", l’homme va au ciel pour apprendre à jouer de la flûte khèn. Son aimée l’attend année après année, misant sur la couleur verte des bambous. Dans le conte "Kê Tâu", une belle princesse épouse un jeune paysan petit et laid. Elle lui reste fidèle malgré les tentatives de séduction faites par de beaux danseurs et d’excellents joueurs de khèn. Finalement, grâce à un peigne magique, son mari s’est transformé en un jeune homme accompli, brave guerrier et souverain aimé du peuple.

Huu Ngoc/CVN
(Juin 2009)

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