En passant par Muong Lò

Muong Lò est un nom archaïque donné par le groupe ethnique Thái à une région devenue province de Nghia Lô, rattachée aujourd’hui à celle de Yên Bái (Nord).

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Une danse de l’ethnie Thái à Muong Lò.
Photo: CTV/CVN

Située à plus de 750 km au nord de Hanoï, à proximité du Nord-Ouest auréolé par Diên Biên Phu, la cité de Nghia Lô était une forte place jalousement gardée par les Français pendant la Première Guerre d’Indochine, jusqu’en 1952.

Ce qui nous intéresse le plus au cours de notre randonnée printanière à Yên Bái, ce sont les cultures ethniques de cette province habitée par des Thái, Tày, Nùng, H’mông...

Deux sortes de riz

Ce matin-là, nous avons quitté la ville de Yên Bái à l’aube pour pouvoir goûter au fameux riz gluant de Muong Lò au petit déjeuner.

Au Vietnam, on distingue deux sortes de riz: le riz ordinaire (gao te, ou com quand c’est cuit) et le riz gluant (gao nêp, ou xôi quand c’est cuit). La ration quotidienne pour les gens de la plaine est le com. Le xôi, plus cher, est une offrande rituelle. Il ne se mange qu’au petit déjeuner et aux jours de fête.

Les peuples minoritaires de la montagne ne consommaient naguère que le riz gluant. Un adage populaire du Nord-Ouest dit: "Nhât Thanh, nhì Lò, tam Than, tu Tâc" (Les quatre greniers du pays sont Muong Thanh à Diên Biên Phu: 1er, Muong Lò: 2e, Than Uyên à Lai Châu: 3e, et Muong Tâc à Son La: 4e).

Une gargote au bord de la route nous accueille avec du riz gluant chaud et parfumé, qui flatte notre palais, surtout quand c’est accompagné de muôi vung (sésame salé grillé et pilé) ou du ruôc (viande de porc pilé et salé). Le restaurateur nous recommande: "Faites comme les montagnards. Ne vous servez pas de baguettes, prenez du riz gluant avec vos doigts pour en faire de petites boules, ça donne le meilleur goût".

Danse des chapeaux de l’ethnie Thái à Muong Lò.
Photo: CTV/CVN

Nous suivons sans hésitation son conseil. Une dame d’âge mûr de notre groupe relate à ce propos un souvenir de jeunesse: "Quand je faisais mes études en Union soviétique, mon professeur de russe, une dame, a invité quelques étudiants vietnamiens à dîner chez elle. Elle nous a servis des cuisses de poulet rôti. Comme nous nous servions de nos fourchettes, elle nous a arrêtés en rappelant un dîner officiel donné par Nehru en Inde. Comme les diplomates russes se servaient du couteau et de la fourchette pour découper les cuisses de poulet, le Premier ministre indien leur a dit en souriant: +Manger du poulet avec fourchette et couteau, c’est fait la cour à une dame avec l’aide d’un interprète+".

Un plaisantin de citer une boutade populaire plutôt égrillarde, deux vers:

Thit gà, com nêp, đàn bà
Ca ba thu ây đêu là câm tay

(Poulet, riz gluant, femme,

Avec ces trois-là, il faut se servir des doigts).

Le ventre plein et l’esprit en fête, nous repartons pour nous enfoncer à Muong Lò, cuvette entourée de hautes montagnes ceintes d’écharpes de nuages blancs. C’est le fief des Thái venus en pionniers dans la région.

Que signifie Muong Lò? Muong est un terme géographique très vague, qui peut désigner un village, un district et même une région. Lò pourrait être le nom de famille de l’ancêtre Lò Lang Truong qui, à la tête d’une tribu d’émigrés Thái venus du Nord, se serait arrêté au bord du lac Nâm Thia au XXe siècle pour défricher la forêt et créer des rizières.

Folklore riche

Le folklore des Thái de Muong Lò est très riche.

L’année commence avec la Fête des fleurs ban (bauhinie blanche) dans la grotte Thâm Le au pied de laquelle coule un torrent limpide. Tandis que toute une forêt de ban se couvre d’un manteau de fleurs blanches, garçons et filles y viennent en barque pour s’amuser et jouir du printemps. Et aussi pour se remémorer l’histoire d’un amour malheureux: la jeune fille, ne pouvant se marier avec son amant, pleura tellement que ses larmes donnèrent naissance à ce ruisseau où flottent toute l’année algues et mousses.

À l’occasion du Têt (Nouvel An lunaire), l’invitation à boire est un véritable rite de courtoisie. Quand un hôte arrive, le maître de la maison l’accueille solennellement à l’échelle menant au plancher de la maison sur pilotis. Après avoir échangé quelques mots d’usage, la boisson coule à flots, bien que les plats offerts soient parfois très maigres. Les libations durent parfois jusqu’à minuit, agrémentées de chants et danses au son de la flûte de Pan khèn.

La femme Thái sait soigner sa beauté faite de réserve et de douceur, et préserver longtemps sa sveltesse. Plusieurs adages le disent: Kinh côm nôn tang (corps élancé, seins haut remontés), Eo kin mang po (Taille de guêpe). Pour réaliser ce critère, la petite fille porte dès l’âge de 10 ou 11 ans une ceinture en soie, de couleur verte, devenue violette à l’âge de 20 ans.

La veste courte côm à col brodé, ornée de deux rangées parallèles de boutons d’argent, serre le buste de la femme, mettant en valeur sa gorge et sa taille. La jupe noire porte une bordure brodée de blanc, laquelle est en étoffe rouge à l’intérieur. Le turban piêu et les bracelets d’argent s’ajoutent au charme.

Les cheveux noirs d’ébène et brillants sont bien entretenus, lavés avec de l’eau de riz et des infusions du fruit à savon bô kêt. Ils sont noués en chignon sur la nuque quand on est célibataire et en chignon vertical après le mariage. On ne laque plus les dents en noir. Pour les nettoyer, on se sert de l’herbe odorante nhu xay ou d’un morceau de noix d’arec, ce qui évite la carie dentaire, consolide la denture et en préserve l’émail.

Huu Ngoc/CVN
(Juin 2009)

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