>>Découverte de poteries incas dans la citadelle de Machu Picchu
Une tour funéraire pré-incas en Bolivie. |
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Les tours funéraires carrées de couleur rosée, appelées localement des "chullpas", ont été construites à base de terre, de paille et, en moindre quantité, de pierres. Percées d’une petite porte, elles mesurent entre 2 et 8 m de haut, et entre 2 et 4 m de large.
Situées non loin du village de Condor Amaya, à environ 130 km au sud-ouest de la capitale La Paz, elles ont été édifiées à deux époques différentes: la période des Aymaras (pré-incas) puis celle des Incas-pacajes, explique le spécialiste Guido Mamani.
Les tours les plus anciennes remontent aux années 1.400-1.500 avant J.C., complète Irene Delaveris, une archéologue grecque en charge du site. Le coutume de construire de telles tours remonte aux Xe et XIe siècles après J.C. à l’époque des Aymaras. La pratique s’est ensuite poursuivie jusqu’à la période inca (XIIIe-XVIe) et l’arrivée des premiers Espagnols. Elles servaient de lieu de sépulture pour les membres de la famille royale ou de l’élite religieuse et militaire.
Il n’existe aucune liste officielle des "chullpas" visibles dans le pays. Dans le seul département de La Paz, environ 300 ont été recensées, selon des chiffres du ministère de la Culture de 2018.
Dans les environs de Condor Amaya, 39 tours sont visibles, dont certaines ont subi les outrages du rude climat andin. Avec l’aide de la coopération suisse, le ministère de la Culture a participé à la restauration de 11 d’entre elles, dont les huit qui se dressent presque en enfilade. Des constructions similaires existent également au Pérou voisin, certaines de formes circulaires.
"Comme du textile"
Les tours funéraires pré-incas se trouvent à environ 130 km au sud-ouest de la capitale La Paz, en Bolivie. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
"Pour moi, c’est l’expression d’une ingénierie unique au monde, parce qu’aucune autre construction n’a été édifiée ailleurs dans le monde avec une telle technique", confie Irene Delaveris.
Les murs des "chullpas” sont faits à partir d’"un mélange de paille (abondante sur place) et de boue" ce qui "créé une fibre comme du textile", dit l’archéologue. Il a également été établi qu’"est présent un composé organique qui n’a pas encore été identifié, mais qui pourrait être du collagène provenant d’os de lamas ou d’une plante locale, ce qui a donné une solidité qui a permis la préservation des tours pendant des siècles".
Toutes les portes des tours de Condor Amaya sont orientées vers l’est, où se lève le soleil, omniprésent dans la mythologie sud-américaine. Cette disposition a engendré des légendes sur les maléfices de l’astre solaire.
Selon des explications plus ration-nelles, cela permettait d’éviter les effets négatifs du vent et des pluies qui arrivent de l’ouest.
Severina Flores, qui élève des moutons dont elle tisse la laine, se souvient que quand elle était enfant les tours suscitaient la crainte. "Quand j’étais +wawa+ (enfant), on nous disait de ne pas nous approcher", raconte cette femme de 29 ans, mère de quatre enfants.
Une légende circule qui dit qu’autrefois les tours pré-incas "vivaient avec la lune" et "se promenaient sur la terre". Parmi d’autres mythes, l’un raconte que la terre a changé de position et que le soleil a cessé de se lever à l’ouest pour naître à l’est, "brûlant" les "chullpas" qui s’ouvraient dans la direction opposée.
"C’est un mythe, mais c’est précieux, car la mythologie fait aussi partie du patrimoine", souligne Irene Delaveris.
AFP/VNA/CVN