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La laque poncée "Vuon xuân Trung Nam Bac", du peintre célèbre Nguyên Gia Trí, avant d’être endommagée. |
Photo: Archives/CVN |
Les lacunes dans la conservation-restauration des œuvres picturales ont été révélées récemment au Musée des beaux-arts de Hô Chi Minh-Ville: Vuon xuân Trung Nam Bac (Jardin printanier Centre - Sud - Nord), une laque poncée de grande valeur du célèbre peintre Nguyên Gia Trí (1908-1993), a été gravement endommagée après avoir été nettoyée.
Cas tragique d’un trésor national
De fin 2018 à février 2019, Vuon xuân Trung Nam Bac, reconnue "trésor national" fin 2013 et exposée au Musée des beaux-arts de Hô Chi Minh-Ville, a fait l’objet d’un "nettoyage" qui a provoqué des dommages irréversibles. Le vernis superficiel a été endommagé à environ 30% au cours du processus en raison du manque de connaissances du "restaurateur" qui a utilisé du liquide vaisselle, de la poudre à polir et du papier de verre.
"L’œuvre a perdu une partie de sa couche de peinture superficielle ainsi que la bonne liaison entre ses différentes parties", a déclaré Vi Kiên Thành, chef du Département des beaux-arts, de la photographie et des expositions. D’après lui, le musée a fait preuve de négligence, alors que les œuvres classées "trésors nationaux" doivent être stockées et préservées dans des conditions optimales.
Le Service de la culture et des sports de Hô Chi Minh-Ville a donc demandé au Musée municipal des beaux-arts de mettre en œuvre un projet visant à remédier aux dommages causés à cette peinture. Il a suggéré que la restauration soit confiée au peintre Nguyên Xuân Viêt, expert et aussi élève de Nguyên Gia Trí. Pourtant, il sera très difficile de lui redonner son état original.
Vuon xuân Trung Nam Bac a été achetée au début des années 1990 au prix de 100.000 dollars par le Comité populaire de Hô Chi Minh-Ville qui l’a offerte ensuite au Musée municipal des beaux-arts. Avec ses 540 cm de long et 200 cm de large, il s’agit de la plus importante peinture de Nguyên Gia Trí qu’il réalisa durant 20 ans, de 1969 à 1989. Elle représente des jeunes femmes en costumes traditionnels du Nord, du Centre et du Sud du Vietnam, qui se rendent à une fête du printemps sur fond d’arbres et de pagodes.
La peinture à l’huile "Em Thúy" (La fillette Thúy) du peintre Trân Van Cân (1910-1994). |
Photo: Archives/CVN |
Au Vietnam, les objets ayant une valeur culturelle et historique majeure sont reconnus comme trésors nationaux. Jusqu’à présent, huit peintures ont reçu cet honneur, mais la plupart ne bénéficient d’aucun soin particulier. Le Musée national des beaux-arts, où sont conservés six trésors nationaux, n’a pas de lieu spécifique pour les exposer et les préserver. Ils sont ainsi traités de la même manière que les autres ouvrages.
"Les œuvres d’art sont d’époques et de thèmes différents, nous ne pouvons donc pas les rassembler dans une zone d’exposition séparée", a expliqué Trân Dung Tiên, directeur du Centre de conservation et de réparation des œuvres d’art au Musée des beaux-arts du Vietnam. "Les travaux exposés sont tous précieux, alors les efforts de préservation sont uniformes, a-t-il indiqué. Les trésors nationaux bénéficient cependant d’une meilleure présentation, d’une description plus détaillée de sa valeur et de meilleures conditions d’éclairage".
Manque de fonds et de compétences
C’est un fait, les œuvres de grande valeur ne bénéficient pas encore de soins particuliers à la hauteur de leurs valeurs culturelles. "Les travaux de conservation dans les musées ne sont pas professionnels", a déploré le peintre Uyên Huy, président de l’Association des beaux-arts de Hô Chi Minh-Ville.
La laque poncée "Nam Bac môt nhà" du peintre Nguyên Van Ty. |
Photo: Archives/CVN |
D’autres experts ont reconnu que les musées ne disposaient pas de personnel qualifié. Il n’existe en effet aucun cours spécifique dans les écoles d’art. De nombreux membres du personnel des musées vietnamiens apprennent par eux-mêmes ou auprès de leurs collègues. Dans le meilleur des cas, ils bénéficient d’une formation à court terme organisée par des experts étrangers. S’y ajoute le manque d’installations pour conserver les peintures. "Nous devons les commander à l’étranger, d’où des coûts élevés qui grèvent nos maigres budgets", a informé Trân Dung Tiên.
Le Musée national des beaux-arts utilise des briques en fonte pour presser des parties cloquées de la peinture alors que les outils spécifiques pour bien traiter ce problème existent à l’étranger. Les œuvres Hôi chùa (Fête de la pagode) de Lê Quôc Lôc et Nam Bac môt nhà (Le Nord et le Sud réunis) de Nguyên Van Ty ont aussi été remises en état à l’aide de briques. "Chaque musée veut investir davantage dans les équipements, mais le problème essentiel demeure le budget limité", a déclaré Vi Kiên Thành.
L’un des rares trésors nationaux qui aient été correctement restaurés est la peinture à l’huile Em Thúy (La fillette Thúy) du peintre Trân Van Cân (1910-1994). Sa remise en état a été prise en charge par Asia Link, une organisation d’art internationale, qui a envoyé un expert étranger au Vietnam.
Le peintre Nguyên Gia Trí