Le ministre du Logement Julien Denormandie et le maire de Marseille Jean-Claude Gaudin, le 5 novembre à Marseille. |
"Huit personnes auraient été susceptibles de se trouver dans l'immeuble", a déclaré le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner arrivé sur place lundi soir, se disant "peu optimiste face à la situation". "Deux passants seraient susceptibles d'avoir été emportés dans l'effondrement", a-t-il ajouté. "Nous sommes dans l'inquiétude pour ces huit personnes", a encore dit M. Castaner. Il y a "peu de chance que l'on puisse trouver des poches de survie, en s'effondrant un troisième immeuble (tombé en fin d'parès-midi, NDLR) a écrasé les gravats des deux premiers".
Mais "tant qu'il y aura le moindre doute, nous rechercherons", a assuré le ministre. Parmi les personnes disparues, figureraient une femme qui n'est pas allée chercher sa fille à l'école et une autre femme "qui ne sortait jamais de chez elle", avait indiqué auparavant le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Renaud Muselier, évoquant au moins 7 habitants de ces immeubles disparus. En visite à Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle), le président de la République, Emmanuel Macron a fait part dans la soirée de "l'affection et la solidarité de la nation toute entière".
"Course contre la montre"
"Ce qui compte c'est qu'on trouve le moins de morts possible, mais nous pensons qu'il y en aura", avait prévenu dans l'après-midi le maire LR de Marseille, Jean-Claude Gaudin. Peu après l'effondrement des deux premiers bâtiments mitoyens, vers 09h00, les sauveteurs avaient pris en charge deux blessés légers, des passants.
Les secours "travaillent d'arrache-pied pour savoir si des individus sont coincés" sous les décombres, dans des "poches de survie où ils auraient pu se réfugier", avait déclaré sur place le ministre du Logement Julien Denormandie dans l'après-midi. Pour cette "course contre la montre", comme l'a qualifiée M. Denormandie, près de 100 marins-pompiers et 33 véhicules ont été déployés dans cette rue commerçante du quartier populaire de Noailles, à deux pas du Vieux-Port et de la Canebière. Les recherches pourraient durer plusieurs jours. Sur l'amas de gravats blanchâtres, de 4 à 5 mètres de haut sur 10 à 15 mètres de profondeur, qui obstrue la moitié de la voie, des marins-pompiers, casque de protection sur la tête, fouillaient les décombres de ces deux bâtiments de quatre et cinq étages.
D’importants moyens étaient déployés devant les deux bâtiments écroulés, à deux pas du Vieux-Port et de la Canebière, avec l'objectif de rechercher d'éventuelles autres victimes sous les décombres. |
Plusieurs témoins ont confirmé la présence possible de personnes dans les bâtiments au moment de l'effondrement. Une enquête a été confiée à la police judiciaire, qui doit déterminer l'origine de la catastrophe, dans ce quartier défavorisé du centre-ville qui compte de nombreux immeubles dégradés voire insalubres. L'un des deux bâtiments, au 63 de la rue, était "fermé et muré", selon la mairie, qui l'avait racheté après avoir pris un arrêté de péril en 2008. Cependant, l'immeuble était "entièrement sécurisé", a martelé l'adjointe au maire chargée du logement, Arlette Fructus.
"Désinvolture et indifférence"
À numéro 65, dans l'autre immeuble, 9 appartements sur 12 étaient en revanche habités, selon les pompiers. En copropriété, il avait fait l'objet le 18 octobre "d'une expertise des services compétents qui avait donné lieu à la réalisation de travaux de confortement permettant la réintégration des occupants", selon la mairie.
Un troisième immeuble, au numéro 67, s'est partiellement effondré dans la soirée. "On a décidé d'intervenir avec une pelleteuse pour enlever la partie fissurée. Le mur a commencé de tomber tout seul au départ puis (...) est tombé d'un coup", a expliqué l'amiral Charles-Henri Garié, qui commande les marins-pompiers de Marseille.Ce troisième immeuble avait été abandonné et muré depuis l'été 2012. "Ce dramatique accident pourrait être dû aux fortes pluies qui se sont abattues sur Marseille ces derniers jours", selon une hypothèse avancée par la mairie qui a relogé 100 personnes évacuées dans les immeubles à proximité.
Mais plusieurs représentants de l'opposition ont fait le lien avec l'ampleur du problème du logement indigne à Marseille, notamment dans le centre. "Derrière la carte postale idyllique on mesure une fois de trop les échecs de la politique de l'habitat et du centre-ville", a déclaré la sénatrice PS Samia Ghali. "Ce sont les maisons des pauvres qui tombent et ce n'est pas un hasard", a tonné le chef de file des Insoumis et député du secteur Jean-Luc Mélenchon, regrettant "une drôle d'odeur de désinvolture et d'indifférence à la pauvreté". La mairie a engagé depuis 2011 un vaste plan de requalification du centre-ville, mais sans pouvoir véritablement remédier au problème. La cité phocéenne est particulièrement concernée: selon un rapport remis au gouvernement en 2015, le logement indigne menace la santé ou la sécurité de "100.000 habitants" de la ville.
AFP/VNA/CVN