Plusieurs députés sont unanimes sur une application limitée de la peine de mort et son abolition pour plusieurs crimes, notamment pour fabrication et commerce de vivres, aliments et médicaments contrefaits, détournement de biens publics, corruption, capitulation, atteinte à la paix et déclaration de guerre, crime contre l'humanité... Toutefois, l'abolition de la peine de mort pour viol, recel et transport de drogue demeure une pomme de discorde.
Le député Huynh Nghia (de Dà Nang) demande à l'AN d'"examiner profondément" l'abolition de la peine capitale pour viol car ce crime porte gravement atteinte à l'honneur, à la dignité, à la santé de la victime, à l'ordre public et à la sécurité. D'autant plus que cette catégorie de criminalité a tendance à augmenter. La peine d'emprisonnement à perpétuité ne suffit pas à réprimer et à dissuader les criminels ainsi qu'à défendre les victimes.
Pour leur part, Vo Tong Thiên (de Son La), Nguyên Thi Thanh Hoà (de Bac Ninh), Dô Thi Lan (de Quang Ninh) et Trân Van Kiêt (de Vinh Long) considèrent que le maintien de la peine de mort pour ce crime est nécessaire en insistant sur les conséquences durables pour la victime.
Recel, transport et trafic de drogue
En revanche, Vo Minh Phuong (de Lâm Dông) et Duong Ngoc Nguu (de Thanh Hoa), estiment que même en prenant en compte les risques actuels, il n'est pas nécessaire de maintenir la peine capitale, la perpétuité étant suffisante pour "dissuader et châtier" les criminels.
Concernant l'Article 194 sur le recel, le transport et le trafic de stupéfiants, les avis sont très divergents. Les uns demandent l'abolition de la peine de mort pour recel et transport de drogue. Les autres inclinent vers le maintien des dispositions actuellement en vigueur. Pour Phuong Thi Thanh (de Bac Kan), Vo Tong Thiên (de Son La), Trân Van Kiêt (de Vinh Long) et Ly Kim Khanh (de Cà Mau), le transport et le trafic de drogue sont une "chaîne d'actes" présentant les mêmes dangers. La division de l'Article 194 en 2 avec des incriminations différentes facilitera l'exploitation des vides juridiques au profit des criminels.
Vo Minh Phuong (de Lâm Dông), Hà Công Long (de Gia Lai), Vi Trong Lê (de Phu Tho) remarquent qu'en réalité, le nombre d'accusés condamnés à la peine capitale dans les affaires de stupéfiants sont des toxicomanes ou des démunis ayant de faibles connaissances en droit et pour eux la peine capitale s'avère dans ce cas "trop lourde". Nguyên Thi Hang (de Nam Dinh) ajoute que la division de l'Article 194 en 2 permettra de lutter plus efficacement contre la drogue.
À ce sujet, Lê Thi Thu Ba, chef de la Commission de la justice de l'AN, souligne lors d'une rencontre avec la presse en marge de cette session qu'il vaut mieux diviser cet Article 194 en 2 afin d'"individualiser" la responsabilité pénale pour chaque acte, ce qui obligera par ailleurs les services d'enquête à faire de meilleures procédures d'instruction. "Si l'on maintient cet Article tel quel, la peine de mort sera appliquée plus souvent", explique-t-elle.
S'agissant du transport et du recel de stupéfiants, Lê Thi Thu Ba livre son propre point de vue selon lequel un simple transport de drogue ne justifie pas l'application de la peine capitale. En effet, faute de connaissances de la loi, des personnes effectuent de telles opérations moyennant honoraires. Dans le cas de transport de drogue en vue de son trafic, il faut l'assimiler au commerce pur et simple, avec condamnation éventuelle à la peine de mort.
Détournement de biens publics
Quant au détournement de biens publics et à la corruption qui deviennent de plus en plus complexes et dont les conséquences sont particulièrement graves et portent directement atteinte à la confiance de la population dans le Parti, l'État et le pouvoir, le maintien de la peine de mort est nécessaire pour dissuader et prévenir cette criminalité, toujours selon Mme Thu Ba.
Commentant le maintien ou l'abolition de la peine capitale pour d'autres incrimination du projet de Code pénal, Mme Thu Ba souligne que l'AN a bien pris la mesure de cette question, en se fondant sur une application moins large de cette peine, conformément à la tendance dans le monde et sur les exigences en termes de prévention et de lutte contre la criminalité.
Pour l'heure, le gouvernement a soumis à l'AN une proposition de suppression de la peine de mort pour 17 crimes et dont 8 ont été agrées par la plupart des députés. Toutefois, ces points demeurent à l'ordre du jour, l'AN devant prendre l'ultime décision.
Giang Ngân/CVN