Sentier de traverse

Charmes cachés du Vietnam, dit la pub. C’est vrai que dès que l’on prend les sentiers de traverse, le Vietnam nous offre un spectacle bien différent de celui des vitrines d’agences de voyages. Prenons la route ensemble !

La station climatique de Dà Lat, dans la province de Lâm Dông (hauts plateaux du Centre).
Photo : Wikipédia

Aujourd’hui, je vous emmène sur l’ancienne route qui relie Nha Trang (province centrale de Khánh Hoà) à Dà Lat (province de Lâm Dông, hauts plateaux du Centre) : de la mer à la montagne.

Après un dernier regard sur les plages de Nha Trang, qui se couvriront de vacanciers adeptes des plaisirs balnéaires, filons en direction de Phan Rang - Tháp Chàm, où nous quitterons la nationale 1 pour monter vers Dà Lat par la route 27 !

Dès les premiers kilomètres dans la campagne, une curieuse impression : le paysage du littoral semble familier, et pourtant, il y a comme un subtil changement. Cependant, les parcs à crevettes alignent les mêmes maisons sur pilotis, l’air est toujours chargé d’iode et de sel, les rizières sont peut-être d’un vert un peu plus terne, mais elles ondulent toujours de la même façon sous le vent de l’aube.

Adieu littoral

Franchement, il y a quelque chose qui change, mais quoi ? Et soudain, en admirant les montagnes qui se profilent au loin, à droite de la route, la réponse surgit, évidente. Là, devant les silhouettes montagneuses, caressées par le souffle léger du vent marin, ils défilent comme à la parade au bord des rizières : les cocotiers. Ils se dressent fièrement et semblent nous narguer : «Tu approches des tropiques mon coco, et donc la flore devient tropicale !»

Et comme pour faire bien comprendre cette évidence géographique, voilà que les premières cultures de mangue apparaissent, suivies dans le lointain de plantation de tabac. Il faut se faire à l’idée que nous entrons dans le vestibule du delta du Mékong, à la végétation luxuriante.

Mais, autre surprise ! Sur la gauche, sans doute une hallucination : entre mer et route, des moutons broutent paisiblement une herbe rare et sableuse. Et même de gras moutons. J’étais persuadé qu’il n’y avait pas de moutons au Vietnam, et même les vendeuses de mon marché de Hanoi me prennent pour un illuminé quand j’ose leur demander de la viande de mouton. Une photo des placides ovins pour se convaincre que nous ne rêvons pas, et nous poursuivons notre route dans un paysage pour gourmand et fumeurs.

Voici Phan Rang - Tháp Chàm, capitale de la province de Ninh Thuân (Centre). Dans une petite gargote au toit de chaume, nous rassasions nos estomacs, humidifions nos gosiers, et vidons nos vessies. Pour cette dernière et prosaïque contingence matérielle, il me faut souligner que je suis toujours surpris de voir avec quelle désinvolture les Vietnamiens se soulagent au bord des routes. Alors qu’en France, pour éviter d’être mis aux fers et objet de l’opprobre publique, nous cherchons le bosquet salvateur ou le champ de hauts épis de maïs, ici hommes, femmes et enfants se délestent de leur trop-plein en pleine nature, sans chercher à se cacher du regard des passants. Pratique d’autant plus curieuse que sur les plages, alors qu’en France on exhibe volontiers tout ce qui différencie l’homme de la femme, ici, les tenues de bain sont plutôt prudes.

Mais, foin de ces considérations hygiéniques et coutumières, reprenons la route qui doit nous conduire à Dà Lat ! C’est une route en piteux état qui, sur 100 km, nous fait escalader les 1.500 m de dénivelé entre le littoral et la ville aux fleurs.

Phan Rang, province de Ninh Thuân (Centre).
Photo : Wikipedia

Bonjour sommets

Malgré les cahots de la route, nous prenons le temps d’admirer, en traversant les villages, les nombreuses pagodes qui ressemblent à des églises, et les nombreuses églises qui ressemblent à des pagodes. Curieux syncrétisme religieux architectural.

Bientôt la route devient très raide et sinueuse. Pendant plus de 20 km, nous allons croiser, tantôt dessus, tantôt dessous, l’imposante conduite forcée qui alimente la centrale hydroélectrique de Tan Son.

Le paysage devient franchement alpin : forêt de feuillus et de pins sylvestres qui s’entrelacent, en laissant apparaître des torrents qui cascadent sur les rochers. Heureusement, elle est peu fréquentée par les camions, et hormis quelques bus touristiques, nous ne la partageons qu’avec de rares motos, préoccupées comme nous à éviter les innombrables «nids de poules» qui lui donnent un air de champ de bataille. Juste avant le col Song Pha, dans un virage, la vue est fabuleuse. Le regard embrasse toute la plaine jusqu’à la mer.

Choux et pagodes : insolite spectacle !
Photo : Gérard/CVN

D’ailleurs, les touristes ne s’y trompent pas, car trois cars ont déjà déversé leur cargaison de vacanciers qui s’extasient dans toutes les langues.

Au sommet du col à 1.000 m d’altitude, des cabanes de fortune abritent des familles qui proposent des ananas, des noix de coco et des cristaux de pierre polis.

Nous nous arrêtons pour profiter des hamacs mis à disposition des voyageurs. Une tasse de thé vietnamien à la main, mollement bercé par un lent mouvement de tangage, il faut lutter contre le sommeil.

Après les félicitations d’usage de nos hôtes, nous emmenons nos motos gravir le second col, 500 m plus haut. La route est encore pire, car elle est de moins en moins fréquentée, une nouvelle route étant ouverte depuis quelques années. Qu’importe, le paysage est d’une beauté sauvage qui nous fait oublier la musculation forcée de nos épaules et de nos fessiers ! Juste après le col, dit des Français, un petit village me donne le sentiment que nous sommes en France : mêmes maisons aux toits de tuile et aux fenêtres à croisées, mêmes jardins alignant laitues et carottes, mêmes tracteurs garés dans les fermes ! Seuls les «nóns» (chapeau conique) des paysans nous indiquent que nous sommes au Vietnam.

En arrivant sur le plateau à proximité de Dà Lat, nous sommes accueillis par d’immenses plantations de thé en terrasse, puis, juste avant la ville, par une profusion de serres qui annoncent la couleur : Dà Lat, c’est le potager et le jardin horticole du Vietnam.

Et ce n’est pas le marché couvert, véritable orgie de fruits, légumes et fleurs à faire pâlir n’importe quel maraîcher breton, qui nous contredira !

Gérard Bonnafont/CVN

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