Le verdict de La Haye : une contribution importante à la paix en Mer Orientale

Les revendications chinoises des «droits historiques» et de la «ligne en neuf traits» en Mer Orientale ont été rejetées le 12 juillet par la Cour permanent d’arbitrage de La Haye. Une base importante permettant aux pays concernés d’évaluer complètement leurs revendications.

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La Cour permanente d’arbitrage de La Haye.

Les revendications de la Chine des «droits historiques» pour les zones maritimes situées à l’intérieur de la «ligne en neuf traits» sont contraires à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM) de 1982. La Chine n’a aucune preuve historique sur ces zones maritimes en Mer Orientale et n’a pas de bases juridiques pour prétendre à des «droits historiques» sur les ressources naturelles dans la soi-disant «ligne des neuf traits». Telle est la conclusion de la Cour permanent d’arbitrage (CPA) dans un verdict rendu public le 12 juillet depuis son siège à La Haye, aux Pays-Bas. Il s’agit de la première décision judiciaire internationale sur les différends territoriaux existants dans cette zone maritime.

Des dommages graves à l’environnement marin

«Le tribunal juge qu’il n’y a aucun fondement juridique pour que la Chine revendique des droits historiques sur des ressources dans les zones maritimes à l’intérieur de la +ligne en neuf traits+, une délimitation en +neuf pointillés+ apparue sur des cartes chinoises datant des années 1940», a expliqué la CPA dans un communiqué.

Dans sa décision de 479 pages donnant raison aux Philippines qui avaient saisi formellement la justice internationale le 22 janvier 2013, le Tribunal arbitral a conclu, en outre, que la Chine a infligé des dommages irréversibles aux récifs coralliens de l’archipel de Truong Sa (Spratly), détruit de façon permanente des preuves sur l’état naturel des éléments en question, et qu’elle a violé les obligations qui lui incombent de s’abstenir d’aggraver ou d’étendre les différends entre les parties au cours du processus de règlement.

La CPA considère également que la Chine cause des risques à long terme à l’écosystème corallien de l’archipel de Truong Sa. Les activités récentes de poldérisation à grande échelle et de construction d’îles artificielles menées par la Chine sur sept éléments de l’archipel de Truong Sa ont causé des dommages graves à l’environnement des récifs coralliens. La Chine a manqué à ses obligations de préserver et protéger l’environnement marin abritant des écosystèmes délicats, ces derniers étant des lieux d’habitats pour des espèces en déclin, menacées ou en voie d’extinction.

La décision de la CPA a affirmé qu’aucune île relevant de l’archipel de Truong Sa ne pouvait justifier l’existence de zones économiques exclusives au profit de Pékin. Ce pays n’a aucune base historique sur cette zone maritime ni de base légale établissant ses déclarations de «droits historiques» sur les ressources dans les zones situées à l’intérieur de la «ligne en neuf traits», a affirmé le verdict.

La Chine n’a donc pas de droit sur la zone économique exclusive située dans un espace de 200 milles marins de Bai Vành Khan (Mischief Bank) ou de Bai Co May (Thomas Bank). La CPA a également affirmé que l’élément découvert à marée basse à Ba Binh (ou île de Itu Aba) relevant de l’archipel de Truong Sa est un rocher. C’est pourquoi Ba Binh ne constitue pas une zone économique exclusive ou de plateau continental.

La CPA a également souligné que la Chine avait porté atteinte aux droits traditionnels de pêche des Philippines dans le récif de Scarborough. Selon cette instance, les actes de la Chine aggravent les différends avec les Philippines qui font actuellement des efforts pour les régler.

Suite à la décision de la Cour permanente d’arbitrage de La Haye (CPA) sur la procédure engagée par les Philippines contre la Chine concernant les différends en Mer Orientale, le ministre philippin des Affaires étrangères, Perfecto Yasay, a affirmé, dans son discours prononcé lors du 11e Sommet Asie-Europe (ASEM 11) en Mongolie, que son pays respectait le verdict du 12 juillet, avant d’appeler les parties impliquées à faire preuve de retenue. «Les Philippines vont œuvrer pour une solutions pacifique et travailler avec les parties concernées pour apaiser les tensions dans la région», a-t-il dit avant de souligner que son pays poursuivrait les relations mutuellement bénéfiques avec tous les pays.

Désavouée par la CPA sur la Mer Orientale, Pékin n’a pas attendu pour réagir avec véhémence. Le ministère chinois des Affaires étrangères a souligné dans une déclaration publiée le même jour que la Chine «n’accepte pas, ni ne reconnaît» cette décision. C’est une décision nulle et non avenue, selon ce ministère.

Trois ans d’examen sur le droit de la mer

Des Vietnamiens participant au meeting pour saluer la sentence de la CPA, le 18 juillet à Varsovie (Pologne).

Dans sa requête introduite en 2013, les Philippines demandaient à la CPA de déclarer que les prétentions chinoises sont une violation de la CNUDM de 1982, dont les deux pays sont signataires.

Le verdict rendu le 12 juillet à La Haye dans le contentieux territorial entre les Philippines et la Chine marque un jalon important dans les efforts pour régler les différends en Mer Orientale par des mesures pacifiques et conformément au droit international.

Après plus de trois ans d’examen minutieux sur la base de l’Annexe VII de la CNUDM de 1982, la CPA a rejeté les revendications de Pékin des droits historiques sur les zones maritimes à l’intérieur de la «ligne en neuf traits», surnommée la «langue de bœuf».

La «ligne en neuf traits» est une délimitation en «neuf pointillés» apparue sur des cartes chinoises datant des années 1940. Le fait que la Chine a unilatéralement proclamé ses revendications de la «ligne en neuf traits» et ne cesse depuis plusieurs années de mener des activités pour les «matérialiser» a essuyé de vives critiques de la part de la communauté internationale. Preuves historiques et juridiques à l’appui, plusieurs pays ont déjà démontré l’absurdité des prétentions chinoises de souveraineté sur la quasi-totalité de la Mer Orientale.

La sentence unanime de la CPA rendue en vertu de la CNUDM manifeste le rôle du droit international dans le règlement des contentieux par le biais des mesures pacifiques, y compris les processus diplomatiques et juridiques, le non-recours à la menace ou à l’emploi de la force. L’arbitrage international, le premier concernant les différends territoriaux en Mer Orientale, contribue à l’objectif partagé d’en régler d’autres et ce pacifiquement et conformément aux dispositions du droit international, notamment celles de la CNUDM.

La Mer Orientale est un carrefour de routes maritimes vitales où s’entrecroisent les intérêts de nombreux pays. Maintenir la paix, la stabilité, la sécurité, la sûreté, la liberté de navigation et de survol dans cette région reste la priorité des priorités. Les parties concernées devraient faire preuve de responsabilité s’agissant du respect du droit international, a fortiori le respect du principe de primauté du droit dans la Mer Orientale. Toute réaction excessive, tout bafouage du droit international ne font qu’exacerber les tensions et envenimer la situation.

Réactions des pays suite à la décision de la CPA

La Chine mène des activités illégales de construction et de remblaiement d’une île artificielle sur le récif Vành Khan (Mischief Bank) de l’archipel vietnamien de Truong Sa.

En réponse au verdict, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a appelé le 12 juillet les parties en conflit à respecter le droit international et à ne pas mener d’actes risquant de provoquer un surcroît de tensions. Il a également espéré que les consultations en cours sur le Code de conduite en Mer Orientale (COC) entre l’ASEAN et la Chine, sur la base de la Déclaration sur la conduite des parties en Mer Orientale (DOC), parviendrait à un approfondissement de la compréhension mutuelle entre parties.

Le vice-président américain Joe Biden a, pour sa part, déclaré que la Chine devait respecter les normes et les décisions de la CPA. Dans un commentaire sur le journal Sydney Morning Herald publié le 16 juillet, il a espéré que la Chine observerait les normes internationales comme les autres pays, ajoutant que les États-Unis appellent la Chine et les Philippines à respecter les décisions de la Cour internationale. Pour sa part, le porte-parole du Département d’État américain a également indiqué que la décision de la CPA était une «contribution importante à l’objectif partagé de régler les querelles en Mer de Chine méridionale de manière pacifique».

Le président du Conseil européen, Donald Tusk, a partagé son espoir que cette décision apportera une contribution importante et active au règlement des questions en Mer Orientale. Dans une autre déclaration rendue le 12 juillet, il a souligné «qu’un ordre international basé sur le droit est dans notre intérêt commun, et la Chine comme l’UE doivent le protéger».

Répondant aux questions de la presse sur cette décision de la CPA, le porte-parole du ministère singapourien des Affaires étrangères a précisé que Singapour examinait ses conséquences sur le pays et toute la région, avant d’insister sur le soutien de Singapour d’un règlement des différends par des mesures pacifiques, conformément au droit international, dont la CNUDM de 1982, sans recourir à la force ni menacer d’y recourir.

Il faut trouver des mesures constructives

Un soldat de la Marine populaire du Vietnam en garnison dans l’archipel de Truong Sa.

Le même jour, le ministère thaïlandais des Affaires étrangères a rendu publique une déclaration appelant au maintien de la paix, de la stabilité et du développement durable en Mer Orientale. Il a souligné l’importance du maintien de la paix et de la stabilité en Asie du Sud-Est et dans ses alentours, ainsi que de l’instauration de la confiance entre les pays de la région en vue d’édifier un environnement favorable à la prospérité et au développement durable.

Dans sa déclaration, le ministère malaisien des Affaires étrangères a précisé qu’il était important pour maintenir la paix, la sécurité et la stabilité, de s’abstenir de tout acte susceptible de complexifier les différends ou d’intensifier les tensions. Il faut pour cela ni recourir à la force ni menacer d’y recourir. La Chine et les parties concernées peuvent trouver des mesures constructives pour encourager le dialogue, les négociations et les consultations, maintenir la prédominance du droit pour la paix, la sécurité et la sûreté de la région.

L’Inde, pour sa part, a publié le 13 juillet sa déclaration sur la décision de la CPA. Elle la reconnaît et soutient la liberté de la navigation maritime et aérienne. Elle soutient aussi les activités commerciales dans le respect du droit international, dont la CNUDM de 1982. Les pays doivent régler les différends par le biais de mesures pacifiques.

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a également abordé la question de la Mer Orientale dans son discours à l’ASEM 11, en soulignant la nécessité de régler les différends dans cette région par des mesures pacifiques et sur la base du respect du droit international.

Dans une déclaration, le ministère sud-coréen des Affaires étrangères a souligné le point de vue de ce pays selon lequel les différends doivent être réglés en conformité avec les accords conclus concernés ainsi que les règles du droit international.

La ministre australienne des Affaires étrangères, Julie Bishop, a appelé toutes les

parties en Mer Orientale à régler les conflits d’une manière pacifique, affirmant que son pays continuerait d’exercer la liberté de la navigation maritime et aérienne dans cette zone maritime et de soutenir les pays qui font de même.

La décision de la CPA a été saluée par des parlementaires, experts et la presse du Canada. Ils ont espéré que les parties concernées la respecteront pleinement.

Ce verdict est une résolution des différends

Exposition «Hoàng Sa, Truong Sa du Vietnam- les preuves historiques et juridiques» en avril 2016 à Bac Ninh.

Selon Gregory Poling, directeur de l’Asia Maritime Transparency Initiative (AMTI) du Centre pour les études stratégiques et internationales (CSIS), basé à Washington DC, cette décision unanime invalide effectivement toute revendication chinoise des droits historiques mal définis sur des ressources dans les zones maritimes comprises dans la soi-disant «ligne en neuf traits».

La sentence de la CPA montre clairement que la Chine viole le droit international avec l’ambition de s’accaparer une grande zone maritime qu’elle a délimité par la ligne en neuf traits. C’est ce qu’a souligné le professeur Eric David, de la Faculté de droit relevant de l’Université libre de Bruxelles (ULB), dans un entretien avec des correspondants de l’Agence Vietnamienne d’Information (VNA) en Belgique.

Selon lui, le verdict du 12 juillet de la CPA signifie beaucoup pour toute la région, notamment les Philippines, le Vietnam, la Malaisie, l’Indonésie ou encore le Brunei, tout en contribuant à renforcer la confiance dans la région. Quant au peuple chinois, il verra que son gouvernement a mis en œuvre des politiques contraires au droit international. Pour l’opinion internationale, la Chine a montré une mauvaise image, eu égard à sa position dans les relations internationales.

«À long terme, la décision du 12 juillet de la CPA dans le cadre du procès intenté par les Philippines contre les revendications chinoises en Mer Orientale contribuera positivement à la paix et à la stabilité dans la région», a estimé Trân Viêt Thai, directeur adjoint de l’Institut des études stratégiques de l’Académie diplomatique.

Le porte-parole du ministère vietnamien des Affaires étrangères, Lê Hai Binh.


Recueillis par Nguyên Hà/CVN

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