Russie
Le dopage, une épine au pied de Poutine

Pour redorer l'image de la Russie, Vladimir Poutine a investi de larges sommes dans le sport, mais le scandale de dopage d'État visant Moscou risque de ruiner ses espoirs d'installer son pays durablement comme une puissance sportive.

>>JO-2016 : la Russie retient son souffle avant la décision du CIO

Vladimir Poutine sur un tatami à Saint-Pétersbourg en 2010.

Alors que le pays retient son souffle, le Comité international olympique (CIO) doit décider dimanche 24 juillet de suspendre ou non le Comité olympique russe, ce qui pourrait priver tous ses sportifs ou presque des Jeux de Rio.

La Russie a déjà fait une croix sur la participation de 67 athlètes russes, après la confirmation par le Tribunal arbitral du sport (TAS) de Lausanne que la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) avait bien le droit d'exclure le pays des épreuves d'athlétisme des JO.

Si Vladimir Poutine a joué la carte de l'apaisement vendredi 22 juillet en martelant que le dopage n'a "pas sa place dans le sport", le coup est dur pour le président russe.

"Sous Poutine, la grandeur d'un pays n'est pas seulement mesurée par le nombre de missiles, ogives, tanks ou avions, mais aussi par le nombre de médailles gagnées, de victoires ou de championnats remportés", explique Konstantin Kalatchev, analyste politique.

Le site olympique de Sotchi en Russie en 2014.

Pour le président, estime-t-il, les Russes "doivent revenir à ce qui (les) rendait fier sous l'URSS : le sport".

Renforcer le patriotisme

Huitième dan de judo et hockeyeur amateur, Vladimir Poutine a multiplié les efforts pour se construire une image d'homme sportif et a fait du sport un élément clé de sa politique.

Ainsi, il n'a pas hésité en 2007 à se rendre au Guatemala lui-même et à s'adresser dans un discours en anglais aux membres du CIO pour les convaincre d'accorder à la ville russe de Sotchi l'organisation les Jeux d'hiver 2014.

Supervisés directement par le président russe, les travaux pour ces JO-2014 ont été les plus chers de l'histoire et la Russie y a raflé 33 médailles, dont 13 en or.

En 2010, renforçant sa position retrouvée de puissance sportive, la Russie a obtenu l'organisation du Mondial-2018 de football, et un chantier gigantesque mobilise onze villes et d'immenses ressources financières alors que le pays traverse une grave crise économique.

Le président russe Vladimir Poutine (gauche) et le ministre des Sports, Vitali Moutko, à Sotchi en Russie en 2015

"Comme sous l'URSS, le sport est utilisé pour des raisons de politique intérieure: en ce moment, c'est pour renforcer le patriotisme, augmenter le prestige des autorités au sein du pays", résume Evgueni Sliousarenko, directeur adjoint du site d'informations sportives Championat.com.

La RDA comme «idéal»

Accablants, les rapports de l'Agence mondiale antidopage (AMA) accusant la Russie d'avoir organisé un vaste système de dopage ne risquent pourtant pas d'avoir un impact sur la popularité de M. Poutine en Russie, d'après les experts.

Selon eux, beaucoup de Russes sont convaincus que ces accusations représentent la dernière tentative en date de l'Occident pour déstabiliser la Russie, au même titre que la crise ukrainienne ou les réticences occidentales à l'opération militaire russe en Syrie.

Une vision des choses partagée par l'élite politique russe, et notamment par le ministre des Sports, Vitali Moutko, qui a qualifié de "politique" la décision du TAS.

Le Kremlin a de son côté dressé un parallèle avec l'instrumentalisation du sport lors de la Guerre froide, comparant le risque d'exclusion des Russes des Jeux de Rio au boycott des Jeux de Moscou de 1980 par les Américains et une cinquantaine de leurs alliés, et à celui de Los Angeles en 1984 par les Soviétiques et une quinzaine de pays de l'Est.

"Les événements récents, l'atmosphère inquiétante planant sur le sport international et le mouvement olympique rappellent sans le vouloir le début des années 1980", a ainsi déclaré le Kremlin mardi 19 juillet. "Nous assistons à une récidive dangereuse d'ingérence de la politique dans le sport", a-t-il ajouté.

Pour l'analyste Konstantin Kalatchev, "beaucoup aiment dire que la République démocratique allemande (RDA) est l'idéal de Poutine", qui y a été en poste pour le KGB de 1985 à 1990.

"Or, les succès sportifs de la RDA reposaient très largement sur le dopage. L'histoire est maintenant en train de se répéter", remarque-t-il.

Si le CIO enterre le 24 juillet les espoirs olympiques de la Russie, comme le craignent certains journaux sportifs russes, Vladimir Poutine devra revoir ses ambitions à la baisse.

AFP/VNA/CVN

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