Fêtes jubilatoires

«Je t’invite à mon anniversaire !». Le Vietnamien met autant de cœur à célébrer l’arrivée de ses descendants que la disparition de ses ancêtres. Et aujourd’hui, c’est à un anniversaire d’enfant que je vous convie !

>>Vie de famille

>>En signe de gratitude

>>Un an de plus en moins !

Depuis que je suis au Vietnam, il m’arrive souvent d’être invité à partager le recueillement familial pour commémorer le décès d’un ancêtre et lui rendre hommage. Mais pour autant, je suis invité autant de fois à des fêtes d’anniversaire pour partager le bonheur d’enfants qui soufflent une bougie de plus. Dans les deux cas, la joie est de mise, mais la forme diffère quand même ! Petite incursion dans des fêtes d’anniversaire enfantines.

C’est pas un cadeau...

Ma femme vient de me prévenir : notre voisin vient de téléphoner pour nous inviter à l’anniversaire de sa fille qui aura 10 ans demain. J’en suis honoré, mais j’éprouve également un tout petit regret. Autrefois, quand on était invité à un événement fût-il proche de chez soi, on avait droit à un charmant mot d’invitation, parfois dessiné par une main puérile, qui donnait à l’intention une valeur particulière. Aujourd’hui, un coup de fil et l’affaire est emballée ! Ceci dit, je ne vais pas me la jouer nostalgie en une pareille occasion. D’autant plus que ma femme me précise que, certes, nous sommes invités, mais cela désigne plutôt ma fille que l’ensemble de la famille. En d’autres termes, les parents sont invités à fournir un cadeau tandis que ma fille participera à l’ensemble des festivités. Curieusement, si à l’occasion du Têt ou de cérémonies de mariage, il est de coutume d’offrir des enveloppes contenant quelques billets, aux anniversaires, un tel cadeau serait déplacé.

Plutôt que de me pencher sur ce délicat problème, je délègue lâchement à mon épouse le soin de trouver ce qui pourrait faire plaisir à une petite fille vietnamienne qui gagne un chiffre de plus à son âge, en une seule journée ! Quelques heures plus tard, elle revient avec un magnifique coffret enrubanné, digne de bijoux les plus luxueux. C’est d’ailleurs la première idée qui me vient à l’esprit : mon épouse aurait-elle contribué à donner à cette innocente enfant l’amour des vitrines de joailliers ? Sa réponse me renvoie à une évidence que j’avais déjà oubliée : ici, le contenant est autant important que le contenu ! La beauté de l’emballage est proportionnelle à la marque d’estime que l’on veut montrer au récipiendaire. Et, de fait, cette boîte mordorée, rouge et or, aux rubans de satin rose, ne cache qu’un modeste vêtement de nuit pour une fillette de 10 ans.

Moi, j’aurais plutôt offert un jouet, mais là encore, c’est sans compter sur l’esprit pratique et utilitaire du Vietnamien. Le jouet, c’est à l’occasion quand on se promène et qu’on tombe nez à nez avec un magasin qui offre tellement de tentations qu’il est difficile de résister. Un anniversaire, ce n’est pas une occasion : c’est sérieux !

Même au clair de lune, des bougies d’anniversaire, ça se souffle !

... mais c’est une sacrée fête

Le soir venu, tous les mineurs de 12 ans de la ruelle se dirigent, accompagnés de leurs parents, vers la maison du voisin, semblables à ces enfants suivant le joueur de flûte. Pourquoi les moins de 12 ans ? Pour deux raisons : il n’y a pas plus âgés dans la rue ; et à l’âge de l’adolescence balbutiante, en matière de «parties», on préfère celles qui ont des surprises. Si les parents sont vêtus comme à l’habitude, les enfants, essentiellement des filles, ressemblent à des fées échappées d’un livre d’images : robes à froufrous, à pans, à traîne, scintillantes, moirées, satinées. Ma fille a récupéré le diadème d’une de ses poupées pour s’en faire une coiffure de reine.

Je regarde tout autour de moi, m’attendant à voir surgir une kyrielle de princes charmants venant offrir leur bras à toutes ces princesses ! Nous sommes accueillis à bras ouverts par les parents de l’heureuse élue, tandis que les enfants brusquement libérés se ruent sur elle avec de forts cris de joie. Des boissons partagées, les cadeaux présentés, les adultes repartent, laissant aux parents invitants la lourde tâche de gérer une meute d’enfants et un gâteau d’anniversaire à diviser en part égales.

À 10h00 du soir, ma fille n’est toujours pas revenue à la maison, et j’entends les cris de joie qui résonnent dans la ruelle. Quand je pense que ça va être pareil chez nous dans quelques mois !

Bougies en plein air

Le plaisir de l’anniversaire peut aussi se partager hors de la maison. Ce soir-là, c’est un ami qui nous invite à assister comme témoin à l’accession d’un nouvel automne pour sa fille. Cadeau habituel à la main, nous nous présentons à son domicile, pensant y trouver tous les enfants des ruelles environnantes.

Bizarrement, seul Tuân nous accueille ! Ne serait-ce son sourire épanoui, je pourrais croire qu’un incident grave de dernière minute a contrarié les festivités. Sur son invite, nous le suivons jusque sur le gazon de la grande avenue qui borde son quartier. Là, déjà installés en rond, comme pour une veillée autour d’un feu de bois, familles et amis, enfants et adultes, ont décidé de profiter de la fraîcheur vespérale pour célébrer l’événement en public. Je n’imagine même pas ça sur les grandes avenues de nos villes occidentales ! Les boissons fraîches arrivent du bar situé de l’autre côté de la rue, la nourriture apportée à dos d’homme s’étale sur des nappes toiles étendues sur le sol, et les enfants courent de-ci de-là, transformant la vénérable avenue en un immense terrain de jeu. Autour de nous, des gens vont et viennent, sans se soucier de notre bande de fêtards. D’autres s’arrêtent à notre hauteur pour effectuer des mouvements de gymnastique comme si de rien n’était.

Je me dis que malgré tout, ça ne pourra pas durer. On va bien finir par se faire expulser ! D’ailleurs, je vois arriver un monsieur vêtu de bleu, uniforme qui signe le responsable de ces espaces verts. Encore une fois, je devrais faire confiance à la sociabilité des Vietnamiens. En effet, la seule consigne que nous recevons est de laisser l’endroit aussi propre que nous l’avons trouvé en arrivant, accompagnée d’un grand sourire et d’un souhait de bonne soirée.

À propos, à l’heure où je vous écris, c’est mon anniversaire. Je dois vous quitter, ma fille n’attend plus que moi pour se précipiter sur mon gâteau !

Texte et photo : Gérard BONNAFONT/CVN

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