En Roumanie, les manifestants font plier le gouvernement qui retire son décret

Le gouvernement roumain a cédé à la pression d'une vaste contestation populaire et annoncé l'abrogation du décret assouplissant la législation anticorruption, espérant ainsi apaiser la colère des centaines de milliers de Roumains descendus dans les rues pour manifester.

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Des manifestants demandent l'abrogation d'un décret controversé assouplissant la législation anticorruption, le 4 février 2017 à Bucarest.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Demain, nous nous réunissons pour abroger ce décret", adopté le 31 janvier sans l'aval du parlement, a annoncé le 4 février le Premier ministre Sorin Grindeanu. Il a affirmé qu'il ne souhaitait pas "diviser la Roumanie" avec cette réforme pénale qui visait à réduire sensiblement les peines encourues pour abus de pouvoir et introduire un seuil minimum de préjudice de 200.000 lei (44.000 euros).

Des cris de victoire ont salué ce revirement parmi la foule rassemblée à Bucarest devant le siège du gouvernement, épicentre de la contestation. Mais les protestataires, dont beaucoup demandaient aussi la démission du gouvernement en place depuis un mois, ont promis de rester mobilisés, nombre d'entre eux envisageant de poursuivre les rassemblements.

"Ce ne sont que des mots, il faut voir dans la pratique", confiait ainsi Aura Oprea, une chef d'entreprise, alors que plus de 300.000 personnes, selon les médias, sont descendues le 4 février dans les rues à travers tout le pays pour la cinquième soirée consécutive. Les manifestations quotidiennes ont rassemblé environ 200.000 personnes dans toute la Roumanie, un record depuis la chute du communisme dans ce pays de vingt millions d'habitants qui a traversé de nombreuses turbulences politiques au cours des dernières décennies.

"Les gens vont rester très vigilants avec ce gouvernement, ils ont montré qu'ils voulaient s'impliquer davantage dans la vie politique, c'est une nouveauté pour la Roumanie", saluait Raluca, une trentenaire. "Il s'agit du futur de nos enfants", lançait Georgiana Dragoi, une femme au foyer. "Nous voulons que justice soit faite." Le président de centre droit Klaus Iohannis, en guerre ouverte avec le gouvernement, a salué "un pas important vers une normalisation".

Système "terrifiant"

Le Premier ministre a réaffirmé que la motivation du gouvernement avait été de mettre le code pénal en conformité avec la Constitution. Le gouvernement disait aussi vouloir ainsi désengorger les prisons. Un nouveau projet de loi sera rédigé et cette fois-ci soumis au parlement. Il n'introduira pas de seuil de 200.000 lei de préjudice pour les délits d'abus de pouvoir, a-t-il précisé.

Le Premier ministre roumain Sorin Grindeanu a annoncé, le 4 février 2017 à Bucarest, l'abrogation du décret controversé assouplissant la législation anticorruption.

Ce texte faisait craindre une régression de la lutte anticorruption alors que, sous la pression de l'UE et de magistrats très offensifs, des centaines de dossiers sur des malversations ont été instruits ces derniers années en Roumanie, marquant un tournant pour la justice du pays. Le gouvernement a été critiqué pour avoir voulu mettre à l'abri de la justice le chef du parti social-démocrate (PSD), actuellement en procès dans une affaire d'emplois fictifs. La Commission européenne et le département d'État américain avaient exprimé leur préoccupation.

M. Dragnea, qui a déjà écopé de deux ans de prison avec sursis dans un précédent dossier, s'est défendu d'être l'un des bénéficiaires du décret, dénonçant une campagne de désinformation. Mais Alexander, un manifestant de 30 ans, a perçu le décret gouvernemental comme une provocation dans une société qui vit la corruption au quotidien: fonctionnaire, il explique voir le système de l'intérieur et "c'est terrifiant", assure-t-il. "Pour chaque chose, il faut payer, il faut faire des queues interminables", décrit ce père de famille poussant un landau.

Le gouvernement a par ailleurs transmis cette semaine au parlement un projet de loi, également critiqué, visant à gracier 2.500 détenus, dont certains pourraient être des élus condamnés.Chassé du pouvoir fin 2015 par des manifestations contre la corruption, mais triomphalement réélu aux législatives de décembre, le PSD, au centre de la vie politique depuis la fin du communisme, a été particulièrement touché par les enquêtes du parquet national anticorruption (DNA), qu'il accuse de procéder à une chasse aux sorcières.Le parti jouit d'une solide base électorale dans les milieux ruraux et défavorisés, qui l'ont à nouveau plébiscité il y a deux mois sur fond de promesses de hausse des prestations sociales.


AFP/VNA/CVN

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