Aimez-vous les choses croquantes?

Si vous aimez les choses croquantes, je vous inviterai à prendre un morceau de keo siu Triu Châu, une sorte de bonbon qui fait la réputation de la province de Nam Dinh (Nord) depuis longtemps.

>>Nam Dinh, une terre riche en patrimoines

Le keo siu de la province de Nam Dinh est un cadeau très prisé des Vietnamiens.

Le keo siu Triu Châu (bonbons aux arachides de Triu Châu) se présente sous un aspect rustique, assez vulgaire même avec son enveloppe de farine de riz gluant parfumé des champs de Quân Liêu qui le protège contre l’humidité tropicale. Il éclate sous vos dents en menus morceaux odorants, brillants comme du verre ambré. Vous y verrez des arachides grillées dans une casserole de cuivre avec la farine de riz gluant germé jusqu’à la caramélisation sous un feu convenable (tout un art!) de charbon de bois.

Un encas qui a inspiré les poètes

Cette friandise fait les délices des petits et des grands, des hommes du peuple et des fins lettrés. Le romancier Nguyên Hông n’oubliait jamais d’apporter chaque année à ses beaux-parents, comme cadeaux du Têt, un paquet de keo siu Triu Châu. Le poète Xuân Diêu évoquait la saveur de ces bonbons quand il faisait des conférences sur les poètes de Nam Dinh. Le musicien Van Ky y faisait allusion dans son opéra L’île lointaine. Au cours de la guerre américaine au Sud Vietnam, des soldats originaires de Nam Dinh s’amusaient à pasticher une chanson populaire bien connue pour assouvir leur nostalgie du terroir : «Je grimpe au sommet du Mont Thiên Thai, Et vois deux tigres en train de croquer des bonbons keo siu».

Le keo siu se fabrique partout au Vietnam. Le Dictionnaire anamite-chinois-français du Père Gustave Hue (1937) le traduit par «dragées chinoises». S’il est d’origine chinoise ou non, c’est un point à discuter. En tout cas, les fameux keo siu Triu Châu de Nam Dinh, contrairement à une version admise, sont la spécialité de la confiserie sise au N°4 rue Hàng Sat (Articles en fer) (1) dans la ville de Nam Dinh, célèbre depuis les années 1860.

En 1880, Dô Quang Nhât, le patron, donna à la maison le nom de Nguyên Huong («Parfum intact»), voulant souligner que les ingrédients arachide et sucre de riz gluant germé conservent leur odeur dans le bonbon fabriqué. La boutique se trouvait presque devant le temple de la Congrégation des immigrants chinois de Triêu Châu (Chao Zhou), district de la province de Phuc Kiên (Fujian). La prononciation vietnamisée de Triêu a donné Triu, puis Siu d’où keo siu, ce qui expliquerait l’origine chinoise de cette spécialité vietnamienne.

Nam Dinh, une terre chargée d’histoire

La province de Nam Dinh se trouve à 90 km de la capitale Hanoï.
Photo : CTV/CVN

Si vous passez par Nam Dinh, en dehors des bonbons keo siu, n’oubliez pas ses exquises petites «bananes royales» (chuôi ngu) ainsi appelées parce qu’elles étaient une offrande au roi. Cette ville a été toujours connue pour sa filature et son usine textile. Elle faisait partie avec Hà Nam de l’ancienne province ou trân de Son Nam, région rizicole du fleuve Rouge qui a une réputation nationale à plusieurs titres.

Là se trouve le village Tuc Mac, lieu de naissance des fondateurs de la dynastie des Trân (1225-1400) vainqueurs des agresseurs mongols au XIIIe; de nombreux palais et temples furent construits dans l’ancienne préfecture de Thiên Truong. La pagode de la Tour (Chùa Thap) ou Phô Minh vaut la peine d’être visitée. Son stûpa, élevé vers l’an 1300 pour recevoir les reliques du Saint-roi bouddhiste Trân Nhân Tông, est une tour haute de 21 m et composée de 14 étages. Il a été réédifié au XVe siècle et restauré plusieurs fois. Le Son Nam était célèbre par ses lettrés et ses maîtres d’école de village. Le plus grand titre de gloire de Nam Dinh est le poète satirique Tu Xuong (bachelier Xuong). Ce dernier réservait des flèches acérées aux mandarins domestiques des colons français, aux prostituées qui les servaient, etc. On lui doit aussi des poèmes sur le sort de la Patrie. Voici sa méditation mélancolique sur la transformation de la rivière natale Vi Hoàng en rizière, rues et maisons début de l’occupation française :

«Qui a comblé la rivière,
La transformant en rizières ?
Ici s’élèvent des toits
Là-bas poussent maïs et patates
Les coassements des grenouilles
Emplissent mes oreilles
Et je sursaute chaque fois,
Croyant que quelqu’un appelle le bac
»…


Huu Ngoc/CVN

(1). Je jure mes grands dieux que si je donne cette adresse, ce n’est pas pour toucher une prime publicitaire, mais par simple souci historique et par amour de gourmet.

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